Depuis de nombreuses années, je me bats pour défendre l’objet de culture et de civilisation qu’est le vin. Cette page regroupe mes contributions sur le sujet.
- 18 avril 2009 : « Quel modèle viticole ? » – Note de blog
- Avril 2012 : « La France doit devenir la championne des vins bio » – Interview dans La Revue du vin de France
- Octobre 2013 : « Faut-il faciliter les exportations de vin depuis le Kosovo ? » – Explication de vote au Parlement européen
- Janvier 2014 : « Régression dans la protection du vin » – Explication de vote au Parlement européen
- 20 janvier 2014 : « Le Parlement européen vote la régression dans la protection du vin » – Article du blog Europe
- 14 février 2014 : « La Commission contre le vin » – Question à la Commission européenne
- 15 avril 2014 : « L’impasse écologique et productive des politiques d’arrachage de vignes » – Question à la Commission européenne
- 21 mai 2014 : « À la rencontre des viticulteurs de Montagnac » – Vidéo
- 21 mai 2014 : « Discours à Montpellier » – Vidéo
- 22 mai 2014 : « Le vin, le marché transatlantique et la civilisation » – Vidéo – Des paroles et des actes
- 20 mai 2015 : « Le vin en résistance au Parlement européen » – Vidéo – Initiative parlementaire
- 6 octobre 2015 : « En commençant par le vin… » – Vidéo – Documentaire
- 23 octobre 2015 : « La Commission européenne ne comprend rien au vin »
En commençant par le vin…
Quel modèle viticole ?
Note de blog du 18 avril 2009
Il a vendu la mèche! L’interview de François Hollande dans l’hebdomadaire l’Express est davantage qu’une façon de se singulariser pour exister. Encore faut-il lire attentivement ce qu’il a dit pour en mesurer toute la force. Une autre chose édifiante est la nature des commentaires qu’on fait les autres dirigeants socialistes en réaction aux propos de l’ancien premier secrétaire. Aucun ne condamne le fond. Voila qui est spectaculaire. Même Claude Bartolone, et Benoit Hamon flétrissent seulement le manque d’à propos. «Il ne met pas les wagons dans le bon ordre» dit le premier! «Les Français s’en moquent et ils ont raison» dit le second. Dans cette note je parle de cela. Et aussi de mon passage dans l’Aude. Chez les vignerons. La question du marché du vin, à la quelle je ne connaissais rien il y a un mois, me parait à présent tellement emblématique de l’effondrement libéral des ancrages les plus identifiants de notre société ! Car le vin est un produit marchand bien sûr. Mais c’est aussi une culture. Et un identifiant. Non? Je commence par ça. Le vin.
Un vin collectiviste
Au début du siècle le jeu du marché avait déjà produit ses merveilles: un désastre qui failli emporter toute la viticulture. Pour produire et produire encore à bas prix, tous les dumpings se déchainèrent, fraude incluse. Dans le sillage de la révolte de 1907 et du mouvement coopératif la France s’est dotée, d’un système de régulation collective et administrative du secteur viticole. Retenons juste un exemple des piliers de ce modèle. Afin de garantir la qualité et de protéger la valeur des «appellations» au bénéfice de tous les vignerons, les AOC, appellations d’origine contrôlées, sont créées en 1935. Le libre jeu du marché est alors fortement limité. On ne peut pas planter de vigne sans droit à plantation octroyé par l’INAO (institut national des appellations contrôlées), en lien avec les syndicats d’appellation. Et le règlement de chaque appellation fixe non seulement les contours de zones de production mais détermine aussi les cépages qui peuvent être utilisés, ainsi que les rendements et pratiques œnologiques admises pour produire le vin de cette appellation. Il faut mesurer ce que cela implique comme délibération et savoirs mis en commun. Ca compte au moins autant que les implications politiques. L’ensemble de cette réglementation codifie ce que l’on appelle le «terroir». Dans ces conditions celui-ci est la rencontre entre un sol, un climat et des pratiques viticoles affinées au fil des expériences. Cet encadrement est très strict. Il va jusqu’à préciser l’espacement admis entre les pieds de vigne. Il impose les techniques de taille et de palissage qui varient d’une appellation à l’autre. Si rigoureux et tatillon qu’il puisse paraître ce système «collectif» est très majoritairement défendu par les vignerons. Pour deux raisons: il fait l’objet d’une coproduction permanente entre l’État et la profession. Et surtout il garantit la «bonne monnaie» des AOC. Ainsi il empêche le dumping agricole et social. Mais aussi environnemental. En effet, par exemple, on ne peut pas augmenter artificiellement les rendements par l’irrigation pour concurrencer le voisin!
Le modèle viticole du libre marché
Ce système très collectif est radicalement différent du modèle viticole adopté aux Etats-Unis et chez les producteurs de vin du Nouveau monde : Australie, Nouvelle-Zélande, Afrique du Sud, Argentine, Chili. Dans ces pays, la production et la fabrication du vin obéissent surtout au libre jeu du marché. Ce modèle a conduit à une industrialisation rapide du secteur. Et aussi a une concentration caractéristique du modèle capitaliste. En Australie 4 firmes contrôlent 60 % de la production. En France les 10 premières firmes viticoles n’en contrôlent que 25 %. Le modèle viticole «libéral» du Nouveau Monde conduit à développer toutes sortes de pratiques œnologiques pas toujours vraiment compatibles avec la qualité du produit et la santé du consommateur. L’accent est mis sur la fabrication «artificielle» du vin beaucoup plus que sur la culture des raisins. La notion de terroir délimité par une Appelation d’origine controlée (AOC) est très marginale. Certains tenants de ce modèle viticole «anglo-saxon» vont jusqu’à dire que «le terroir n’existe pas» D’ailleurs le mot est intraduisible en anglais. Donc il n’y a besoin d’aucune réglementation particulière pour produire du vin. C’est ce modèle viticole qui prend aujourd’hui le dessus au niveau mondial. L’Union européenne, cheval de Troie de la généralisation du modèle anglo saxon, veut donc normaliser le modèle européen. Facile. Il faut déréguler là aussi!
La réforme qui tue le vin et favorise le liquide vineux
La Commission européenne a présenté en 2006 un projet de réforme de l’organisation du marché du vin destiné à mettre la viticulture européenne au standard du marché mondial. Il s’agit d’améliorer sa compétitivité, bien sûr! L’approche des têtes d’œuf en charge de ce mauvais coup est évidemment totalement idéologique. Elle méconnaît souvent la culture du vin telle qu’elle est vécue en Europe et surtout en France. Cette réforme a été discutée pendant 2 ans. Pour finir elle a été adoptée en 2008, en dépit de la résistance de la France. Mais il est vrai que la résistance du sieur ministre Michel Barnier qui la représentait fut des plus molles. Car son souci était surtout de jouer le bon élève de l’Europe davantage que le défenseur de la viticulture française. Cette réforme prévoit une nouvelle campagne d’arrachages subventionnés. La Commission tablait au départ sur 400 00 hectares à arracher. Elle a du se contenter de 180 000. Mais surtout elle met fin à la plupart des mécanismes de régulation des prix et des productions. La tuerie est donc libre ! C’est à peine s’il reste la possibilité de distillation garantie des excédents en cas de forte crise du marché. Et pire encore, cette réforme comporte des principes d’organisation lourds de dangers pour le système viticole «à la française».
Appellations contrôlées détruites
Première trouvaille: la fin du système des «droits à plantation». C’est la mort du système des appellations contrôlées. C’est un échec terrible de la France. Notre pays demandait à pérenniser ce régime des droits à plantation qui est consubstantielle au système des AOC. En effet, en opposition au système libéral, le système français assume qu’on ne plante pas ce qu’on veut où on veut. On plante là où on en a le droit. Et on plante ce qui est prévu là! La France n’a obtenu que le report de 2013 à 2015 de cette fin des «droits à plantation». Il a été cependant convenu de pouvoir le maintenir à titre dérogatoire en France, jusqu’en 2018. Reste que sur le principe, tout le système des plantations va être dérégulé d’ici 2018. Et ceux qui le savent, les viticulteurs, prennent leurs dispositions en conséquence dès maintenant! Désormais on pourra donc planter autant de vignes que l’on veut où l’on veut, au gré du jeu du marché. La commission table ainsi sur un ajustement du secteur par «le libre jeu de la concurrence». On comprend l’idée simplette: favoriser et accélérer les plantations là où c’est rentable et abandonner la vigne là où ça ne l’est pas. Ce n’est ni le savoir faire ni le résultat œnologique qui fera la différence, mais le libre jeu des investisseurs censé régulé le tout. Raisonnement doublement aberrant. D’abord parce qu’il risque de déboucher à court terme sur de nouvelles surproductions. Il est donc contradictoire avec la politique d’arrachage impulsée par ailleurs. Ensuite et surtout il méconnaît complètement la notion de «terroir» sur laquelle reposent les AOC et donc une grande partie des raisons de l’écoulement de la production. La commission ignore que le marché du vin est un marché du goût. Du bon goût! Elle croit que le vin est un liquide alcoolisé à base de raisin fermenté! Le raisonnement de marché de la Commission passe donc à côté de la réalité de la culture du vin qui repose sur une production viticole de qualité. Or celle-ci est contrainte par les types de sols. Par définition ceux-ci ne sont pas extensibles à l’infini. Par exemple, on ne peut pas dire que parce que les appellations Saint-Emilion ou Châteauneuf du Pape sont très rentables, il faut massivement planter là-bas et pas ailleurs. On ne pourrait le faire qu’au détriment de la qualité globale de ces AOC, en élargissant leur périmètre à des terroirs plus hétérogènes et moins qualitatifs. A terme la fin des «droits à plantation» risque donc de faire s’effondrer le système des AOC. Adieu la réponse collective trouvée dans les années 20 et 30 pour sortir du désastre du marché sauvage du vin. Retour de la piquette?
Normaliser le goût pour faire un marché unique.
Autre point très grave que la France a finalement laissé passer. Jusque là la liste des pratiques œnologiques admises ou interdites était du seul ressort des Etats au Conseil. A présent cette compétence est transférée à la Commission. Evidemment dans sa logique d’alignement sur le marché mondial, la Commission veut normaliser les pratiques européennes sur le modèle des pratiques de l’industrie viticole du Nouveau Monde. Parmi ces pratiques, jusque là honnies, on trouve notamment le mélange de vins de diverses origines ou couleurs. Ou encore l’adjonction au vin de toutes sortes d’additifs: des copeaux de bois, aux levures OGM en passant par des additifs aromatiques voire des colorants. Sans parler de techniques de vinification dignes de l’industrie chimique: osmose inverse pour concentrer les mouts issus de raisins à trop gros rendements, utilisation de neige carbonique pour conduire les macérations … Toutes ces innovations, courantes dans le «nouveau monde», ne visent évidemment qu’un seul objectif. Il s’agit de réduire les coûts de fabrication à court terme. Mais surtout à standardiser le plus possible le goût du produit sur de très grandes quantités. Par exemple, l’élevage en barrique de chêne étant jugé trop long et coûteux, on va utiliser les déchets de menuiserie, les fameux copeaux, très peu couteux, pour boiser les vins à grande vitesse.
Ecologie et modèle viticole
On le comprend, le modèle «œnologique» de la commission participe d’un modèle viticole productiviste et industriel. Pas besoin de ménager les sols ou la plante quand on peut reconstruire le goût du vin dans sa fabrication. Ce modèle laisse donc libre cours à l’irrigation, aux engrais de synthèse et aux pesticides, au service de l’augmentation des rendements. Là où la quête de qualité du modèle des AOC conduisait au contraire à les réduire. Les pratiques œnologiques «modernes» du Nouveau Monde nécessitent aussi souvent des installations technologiques peu compatibles avec une agriculture paysanne de petites exploitations.
L’affaire du «rosé» de mélange
C’est exactement cette logique de marché qui a prévalu avec la décision récente d’autoriser d’appeler «rosé» du vin produit en mélangeant du rouge et du blanc. Cette horreur est une pratique employée en Australie, aux Etats-Unis et en Afrique du Sud pour recycler les invendus de vin blanc de mauvaise qualité. Car pour faire du rosé par coupage il faut beaucoup de blanc et un peu de rouge. Le tout au détriment de la qualité et même de la santé des consommateurs. Pour ceux qui ne le savent pas les blancs de faible qualité sont peu digestes et génères divers troubles… La Commission a commencé à inscrire cette trouvaille grotesque dans un projet de règlement qui est soumis au Conseil depuis janvier 2009. Le gouvernement français s’est alors illustré en parfait bon élève libéral de l’Europe sur de dossier. En effet, lors de la première réunion consultative du Conseil agriculture sur ce sujet le 27 janvier, le ministre Barnier n’a formulé aucune opposition. Alors même que certains pays contestaient le règlement proposé par la Commission, à commencer par l’Allemagne. Barnier dénonce donc aujourd’hui une mesure à laquelle il n’a rien trouvé à redire quand il était à Bruxelles. La réponse de la Commission aux critiques sur le rosé n’est pas moins révélatrice. Plutôt que d’essayer d’argumenter sur le fond du dossier, elle a renvoyé la question à l’OMC, qui doit rendre un avis sur le sujet d’ici juin. La décision finale du Conseil sur ce dossier est donc reportée d’autant. L’OMC! Si c’est pour s’en remettre à l’OMC a l’heure de défendre une production qui est en même temps une culture quasi identitaire, alors à quoi bon l’Union Européenne ?
Retour à Hollande et Bayrou
Qu’a dit Hollande ? Très exactement. D’abord cette phrase ciselée dans la meilleure tradition du «balancement circonspect» des énarques: «Le PS ne doit céder ni à la diabolisation sans raison ni à la séduction sans principe.» Tout est dans la nuance. Imaginez une diabolisation avec des raisons. Ou une séduction avec des principes! L’effet visé est de paraître mesuré, raisonnable. Il s’agit de disqualifier les postures actuelles en le dépassant. L’objectif sémantique est de reformuler une problématique totalement discréditée. Comment? Réponse: «proposer une clarification des convergences et des divergences.». Qui peut être contre une clarification, en général? Donc en particulier? Hollande vous a fait faire la moitié du chemin. Vous qui pensiez que le centre c’est la droite, il vous reste à admettre l’idée d’avoir une nouvelle vision de ce Centre. Une vision basée sur une «clarification» de ce qui vous paraissait pourtant parfaitement clair jusque là. C’est de cette façon que François Hollande vous conduit au seuil de l’autre moitié du chemin qui reste à faire. Attention balancement circonspect en vue. «Si les divergences l’emportent sur les convergences, chacun comprendra le refus de l’alliance. Si c’est l’inverse, alors il faudra en tirer les conclusions.» Faites une pause car vos poumons pourraient éclater. Car vous voilà rendu au point où vous allez avoir des conclusions à tirer. Parti de l’idée d’une clarification vous voila rendu au point ou vous pourriez avoir une conclusion à tirer a l’inverse de ce vous aviez toujours cru. Laquelle? «Si nous avons suffisamment à faire ensemble, disons-le, sans avoir peur de perdre notre âme.» Nous y voilà. Tout le monde s’y attendait. Quel est le sens de tout cela? Quel but vise François Hollande? Le changement d’alliance. En présentant la méthode qui le rend praticable pour le socialiste. Rien d’autres. Il ne s’en cache pas. «Je fais de la pédagogie.» explique-t-il. «J’ai posé les principes d’une stratégie d’alliance pour le Parti socialiste lors des municipales : le rassemblement de la gauche sur un projet avec des partenaires liés par un contrat. C’est sur le respect de ces principes qu’ont été acceptées des alliances locales avec le Modem.». Donc c’est bien ce que j’expliquais à l’époque. Les municipales ont été le banc d’essai d’une nouvelle stratégie. C’est l’aveu. Qui peut l’affronter sur cette base? Martine Aubry qui a elle-même fait cette alliance alors qu’elle n’en avait même pas besoin arithmétiquement. C’est parce qu’il enferme Aubry dans ses propres contradictions qui l’empêchent de réagir que Jean Christophe Cambadélis déclare au sujet de Hollande: «pervers pépère est de retour». Une fois ce bilan du passé rappelé, il semble que, pour François Hollande, la clarification annoncée au début de l’interview soit faite, vingt lignes plus bas! Voici l’aveu: «C’est la même stratégie que je propose pour les scrutins à venir.» Cette ultime phrase comporte un pluriel que les autres socialistes ont soigneusement oublié de relever… «Les scrutins à venir»! Tous ont fait comme s’il s’agissait de la présidentielle de 2012. Mais le pluriel désigne aussi les prochaines élections régionales. Pourquoi les chefs socialistes n’ont-ils pas protesté contre cette idée? Parce qu’ils se préparent à la mettre en œuvre. C’est pourquoi le niveau de la réplique à François Hollande est aussi faible et hypocrite. Tous lui reprochent le tempo. Pas le fond. D’ailleurs certains mettent les pieds dans le plat. Comme Pierre Moscovici. Il estime que l’initiative de François Hollande est « juste sur le fond ». Pour lui, cette position « tranche avec certaines hypocrisies, de la part de ceux qui jurent, la main sur le cœur, qu’ils ne pactiseront jamais avec le centre, alors qu’ils se sont alliés avec lui dans leur commune ou s’interrogent sur le deuxième tour des élections régionales ». C’est exactement ce que j’explique. Je suis donc d’accord avec Moscovici: Hollande a le mérite d’avoir vendu la mèche. Il a mis sur la place publique ce que les autres essayaient de reporter à demain, quand les électeurs n’y seront plus, juste après les européennes. C’était le cœur de nos divergences au PS, du temps où j’en étais membre. La question met en cause l’identité de la gauche. C’est la pente de toute la social-démocratie européenne. C’est ce qui a conduit la gauche italienne au néant. Tout cela, je l’ai analysé des dizaines de fois sur ce blog, dans mes livres et articles. J’en épargne donc le rappel. Reste ceci. L’élection européenne prend un sens parfaitement clair aussi sur ce point. Si le score du Front de gauche est suffisant, le PS se verra fermer la possibilité de faire son alliance au centre car il perdrait autant et même plus sur sa gauche. Il sera donc au contraire contraint à l’alliance à gauche sans exclusive. Il sera contraint de discuter un programme et d’organiser une dynamique en relation avec cette alliance de gauche. Le vote pour le Front de gauche est donc la garantie anti alliance au centre. Le moyen de maintenir la gauche à gauche dans le pays. Et donc de rendre possible une autre majorité parlementaire en France.
La France doit devenir la championne des vins bio
Interview d’avril 2012 parue dans La Revue du vin de France
Lorsque la France vend un Airbus, la nouvelle est toujours largement commentée. À l’inverse, les bonnes performances des vins français à l’exportation (10 milliards d’euros d’excédent commercial en 2011) sont peu relayées par les élus. Trouvez-vous cela logique ?
La défense du vin français est une bataille culturelle autant qu’économique. On soutiendrait mieux les vins français en défendant leur qualité et leur spécificité territoriale plutôt qu’en copiant les vins américanisés à bas coût qui déferlent sur le marché mondial. Il existe une bataille mondiale pour imposer des standards de goût. Le vin subit de plein fouet la course au gras et au sucré de l’industrie agro-alimentaire anglo-saxonne. Contre cette mac-donaldisation du goût, la France doit lutter au niveau international pour un haut niveau d’exigence qualitative dans la production des vins d’appellation. Il faut lutter contre les tendances actuelles au dumping par la course aux surfaces sur des terroirs non qualitatifs, la montée des rendements par l’irrigation et la vinification industrielle. La France doit défendre une viticulture paysanne d’excellence et devenir la championne mondiale des vins issus de raisins cultivés en bio. Le mouvement coopératif doit en particulier être soutenu pour poursuivre cette conversion écologique et qualitative de la viticulture française. Il est le meilleur rempart économique contre le recul de l’emploi viticole et la baisse du nombre d’exploitations. Mais pour cela les marchés et les prix doivent à nouveau être encadrés à rebours de la dérégulation actuelle dans laquelle le vin français a tout à perdre.
Le professeur Dominique Maraninchi, alors directeur de l’Institut national du cancer (INCa), a affirmé : « Le vin est cancérigène dès le premier verre ». Que valent les efforts de la France pour exporter son vin si des personnalités rémunérées par l’Etat tiennent de tels propos ?
D’autres avis scientifiques et médicaux moins catégoriques existent et s’expriment dans le débat public. Je note que le fondateur et premier président du même Institut, le cancérologue David Khayat de la Pitiè Salpétrière, considère qu’une consommation modérée de vin n’est pas cancérigène. Nous devons surtout veiller à ce que les choix de santé publique ne soient pas pris en otage par des lobbies, qu’ils soient d’inspiration hygièniste et prohibitioniste ou au contraire liés à des intérêts commerciaux. Je rappelle d’ailleurs que le marketing agressif et consumériste vient plus de l’industrie des alcools forts que des producteurs de vin. Et la lutte contre les addictions doit être globale et ne pas laisser de côté les médicaments et notamment les psychotropes dont les prescriptions massives sont un désastre de santé publique largement méconnu.
La loi Evin a été votée il y a vingt ans. Elle n’a pas enrayé la montée de l’alcoolisme chez les jeunes (notamment le binge drinking). Doit-on en conclure que cette loi n’a pas atteint son objectif ?
Un bilan public, argumenté et raisonné doit être fait de cette loi pour la rendre plus efficace. Il ne faut pas baisser la garde contre l’alcoolisme qui est un fléau de masse. Mais le développement des addictions chez les jeunes est un des symptômes de la précarité qui est devenue le seul horizon social des jeunes générations. Le saccage libéral de la protection de l’enfance et de l’éducation nationale aggrave cet abandon des jeunes. Le Front de Gauche veut abolir ce précariat pour sortir notre peuple de la peur du lendemain dans la formation, l’emploi, le logement, la santé. Dans tous ces domaines, notre programme « l’Humain d’abord » propose des solutions concrètes pour répondre aux besoins fondamentaux des jeunes.
« POUR GARANTIR LA QUALITÉ (DU VIN FRANÇAIS), ON NE PEUT PAS (LE) FAIRE N’IMPORTE OÙ ET N’IMPORTE COMMENT »
Que pensez-vous de la suppression actée à Bruxelles des droits de plantation ?
La production viticole française repose sur une régulation collective très poussée qui a permis de développer la qualité des vins français. Pour garantir cette qualité, on ne peut pas faire du vin n’importe où et n’importe comment. La fin des droits à plantation est la déclinaison dans la viticulture du principe de la concurrence libre et non faussée qui régit le traité européen. Elle entraînerait la dérégulation complète du secteur. Elle menacerait directement la qualité des vins et condamnerait les exploitations familiales et artisanales au profit d’une viticulture productiviste qui privilégie grandes surfaces et hauts rendements aux dépens des terroirs qualitatifs. A terme c’est tout le système des appellations d’origine contrôlée qui serait menacé. Nicolas Sarkozy a beau jeu de s’opposer aujourd’hui à l’application de cette réforme alors qu’il en a soutenu le principe en 2008 au niveau européen.
Que pensez-vous de l’accord européen sur les vins bio ?
C’est un accord à minima dicté par les grands groupes qui veulent augmenter leurs profits en commercialisant une quantité beaucoup plus importante de vins bio. Les consommateurs en sont en effet très demandeurs. Et à juste titre puisque la viticulture est le premier utilisateur de pesticides en agriculture. Malheureusement la qualité recherchée ne sera pas au rendez-vous. Car le cahier des charges des vins bio ne fixe pas des exigences suffisantes par rapport aux autres vins. C’est un exemple typique de l’harmonisation par le bas auquel nous conduit l’Europe libérale dans tous les domaines.
Quels vins aimez-vous partager ?
J’ai longtemps privilégié le Bordeaux comme valeur sure. Mais j’ai découvert depuis quelques années certains excellents crus du Beaujolais, notamment de délicieux Saint-Amour.
Faut-il faciliter les exportations de vin depuis le Kosovo ?
Explication de vote au Parlement européen d’octobre 2013
Sur le rapport : Iuliu Winkler, PPE (A7-0293/2013) procédure législative 1ère lecture
J’ai voté contre ce texte
Voici mon explication de vote
Ce rapport vise à faire bénéficier le Kosovo des mêmes préférences commerciales pour l’exportation de vin vers l’UE que celles déjà accordées aux pays des Balkans. Ces préférences sont accordées en vertu du processus de stabilisation et d’association liant ces pays à l’UE. D’une manière générale la libéralisation des échanges que promeut ce processus est néfaste en l’absence d’harmonisation sociale, écologique et sanitaire des conditions de production. Ce problème se pose particulièrement pour le vin. Ses conditions de production peuvent être mauvaises sur le plan écologique, nuire à la santé des citoyens (exposition aux pesticides) et aux productions locales de qualité victimes de dumping. Je m’oppose donc par principe à ce texte qui contribue un peu plus à la libéralisation des échanges sans contrepartie. Je considère que l’ensemble de la politique commerciale de l’UE devrait être revue dans le sens d’un protectionnisme solidaire et écologique.
S’agissant en particulier du Kosovo, je déplore que l’UE ait engagé avec ce territoire un processus d’association alors qu’il n’est pas reconnu internationalement comme un Etat. Je m’oppose donc aussi à ce texte car il s’inscrit dans le cadre de la reconnaissance par l’UE d’un prétendu État, qui n’est en réalité qu’une ceinture autour de la plus puissante base militaire US en Europe.
Régression dans la protection du vin
Explication de vote au Parlement européen de janvier 2014
Sur le rapport : Paolo Bartolozzi (PPE) (A7-0158/2012) Législatif 1ère lecture
J’ai voté contre ce texte?
Voici mon explication de vote
Ce rapport soutient une nouvelle réglementation assouplie des « produits vinicoles aromatisés ». Cette proposition aggrave encore le règlement de 1991 qui accordait à des préparations alcooliques aromatisées la qualification de « produit vinicole », en cohérence avec la libéralisation commerciale mondiale ayant affecté l’Organisation Internationale du Vin. Or historiquement ne pouvait être appelé vin que le produit exclusif de la fermentation alcoolique du raisin. En donnant le qualificatif « vinicole » à toutes sortes de produits qui n’ont rien à voir avec le vin, cette « simplification » a marqué une régression pour la protection du vin. Le règlement européen proposé aggrave cette banalisation. Il étend aux produits aromatisés, édulcorés, colorés des qualifications qui étaient jusqu’ici réservées au seul vin, comme la mention du cépage ou de l’origine géographique. Cette évolution, favorable aux produits alcooliques industriels standardisés, va se faire au détriment des producteurs de vin de qualité, qui perdent progressivement leurs protections spécifiques. C’est une très mauvaise nouvelle pour l’avenir et la diversité des vins européens. Et c’est un signe supplémentaire de l’absence de bon goût de la technostructure arrogante et vulgaire qui invente un tel crime contre la civilisation européenne. Je vote absolument contre.
Le Parlement européen vote la régression dans la protection du vin
Article du blog Europe du 20 janvier 2014
Le rapport Bartolozzi voté mardi dernier au Parlement européen permet une nouvelle réglementation assouplie des « produits vinicoles aromatisés ». Cette libéralisation s’inscrit dans le cadre de la réforme de la PAC qui allège les réglementations pour soumettre tous les produits agricoles à la concurrence libre et non faussée. La proposition aggrave encore le règlement de 1991 qui accordait à des préparations alcooliques aromatisées la qualification de « produit vinicole », en cohérence avec la libéralisation commerciale mondiale ayant affecté l’Organisation Internationale du Vin. Or historiquement ne pouvait être appelé vin que le produit exclusif de la fermentation alcoolique du raisin. En donnant le qualificatif « vinicole » à toutes sortes de produits qui n’ont rien à voir avec le vin, cette « simplification » a marqué une régression pour la protection du vin.
Le règlement européen proposé aggrave cette banalisation. Il étend aux produits aromatisés, édulcorés, colorés des qualifications qui étaient jusqu’ici réservées au seul vin, comme la mention du cépage ou de l’origine géographique. Cette évolution, favorable aux produits alcooliques industriels standardisés, va se faire au détriment des producteurs de vin de qualité, qui perdent progressivement leurs protections spécifiques. C’est une très mauvaise nouvelle pour l’avenir et la diversité des vins européens. Et c’est un signe supplémentaire de l’absence de bon goût de la technostructure arrogante et vulgaire qui invente un tel crime contre la civilisation européenne. J’ai voté contre sans pouvoir l’empêcher.
La Commission contre le vin
Question à la Commission européenne du 14 février 2014
Les cépages Noah, Othello, Isabelle, Jacquez, Clinton et Herbemont sont interdit en Europe par le règlement sur le classement européen des variétés de raisins n° 2005/1970 du 6 octobre 1970 (annexe, titre I, sous-titre II). Or, cette interdiction ne repose ni sur un quelconque argument scientifique en rapport avec les normes actuelles ni sur des arguments économiques proportionnés. C’est d’ailleurs pourquoi, en 2003, la France a aboli la loi de 1934 qui listait ces cépages prohibés.
Ces cépages font partie intégrante du patrimoine végétal des Cévennes depuis 1820 et offrent certaines particularités : on peut les cultiver sans les greffer, ils sont naturellement résistants aux principales maladies de la vigne (oïdium, mildiou, phylloxera…) et présentent une palette aromatique originale et étonnante. Le Jaquez contient également du resvératol, molécules aux propriétés anti-vieillissement. Leur interdiction ne va t-elle pas à l’encontre des objectifs de biodiversité défendus par l’Union européenne ?
Cette interdiction pénalisant les viticulteurs français, soucieux de développer le patrimoine viticole de leurs régions, quand la Commission compte-t-elle revenir sur ce règlement ?
L’impasse écologique et productive des politiques d’arrachage de vignes
Question à la Commission européenne du 15 avril 2014
L’Union européenne impulse depuis plusieurs années des politiques d’arrachage de vignes, au nom de la régulation de la production. Cette politique a consisté à des campagnes massives d’arrachages de 2008 à 2011, grâce à des primes dépassant les 6 000 euros à l’hectare. 160 000 hectares ont ainsi été arrachés en Europe, dont 22 000 en France. Cette politique est très coûteuse puisque près d’un milliard d’euros ont été dépensés pour cela depuis 2008, dont 135 millions rien qu’en France. Malgré l’abandon des grandes campagnes d’arrachage, cette politique se poursuit de manière larvée avec la nouvelle PAC sous forme d’aides à la reconversion et à la restructuration des exploitations, qui comportent souvent des arrachages.
Comment la Commission peut-elle défendre ainsi une régulation à la baisse de la production viticole alors qu’on assiste à une augmentation rapide de la demande mondiale de vin ? Le rôle de la PAC ne devrait-il pas plutôt être de conforter le potentiel productif viticole européen ?
Les arrachages massifs ont ainsi amputé le potentiel productif du vignoble français alors qu’il faudrait le renforcer. Loin de permettre une réorientation qualitative du vignoble, les politiques d’arrachage sont largement aveugles et indifférentes aux enjeux écologiques, commerciaux et culturels de la viticulture. Ainsi, 40 % des vignes arrachées en France étaient classées en Appellation d’origine contrôlée. Elles représentaient un potentiel de 20 000 emplois perdus.
La moitié des surfaces arrachées sont restées en friche, au détriment de l’aménagement du territoire, ou ont été rendues constructibles, contribuant ainsi à la logique nuisible d’étalement urbain. Ces arrachages ont ainsi conduit à une baisse de la valeur ajoutée des territoires concernés. Ils ont fragilisé les outils collectifs de production (coopératives viticoles) et de gestion des sols (SAFER).
Quel bilan raisonné la Commission européenne tire-t-elle de cette politique ? ?Va-t-elle continuer à soutenir des mesures d’arrachage dans le cadre des politiques de restructurations d’exploitations ? ?Comment compte-t-elle empêcher que les terres arrachées tombent en friche ? ?Entend-elle conditionner toute mesure d’arrachage à une reconstitution qualitative et écologique des vignobles arrachés ?
Alors que le productivisme agricole est néfaste pour l’environnement comme pour la qualité des produits et des emplois agricoles, compte-t-elle intégrer plus largement la nécessité d’une agriculture paysanne et biologique dans sa politique viticole ?
À la rencontre des viticulteurs de Montagnac
21 mai 2014
Le mercredi 21 mai Jean-Luc Mélenchon rencontrait les vignerons de Montagnac. Il a été accueilli à la cave coopérative (qui regroupe 400 vignerons) par le président René Moreno, en présence des administrateurs, dont Serge Azaïs. Il a ensuite rencontré les syndicats paysans Modef et Confédération paysanne.
Discours à Montpellier
21 mai 2014
Le 21 mai, Jean-Luc Mélenchon était en meeting du Front de Gauche à Montpellier, dernier de cette campagne européenne. Parmi les grands sujets : le manque de démocratie dans l’Union européenne, le Grand Marché Transatlantique, qui menace nos productions agricoles comme le vin ou le poulet fermier, la cogestion en Europe de la droite et des sociaux-démocrates… Sur le vin, voir à partir de 13:30.
Le vin, le marché transatlantique et la civilisation
Des paroles et des actes, le 22 mai 2014
Le 22 mai 2014, Jean-Luc Mélenchon était l’invité de l’émission « Des paroles et des actes ». À cette occasion, il a parlé du grand marché transatlantique et a expliqué pourquoi le vin et la civilisation qu’il contenait étaient menacés par ce marché.
Le vin en résistance au Parlement européen
Parlement européen, le 20 mai 2015
Retrouvez ici la vidéo de l’initiative que j’ai organisée au Parlement européen le 20 mai 2015 sur le vin et l’agriculture biologique.
En commençant par le vin
Documentaire publié le 6 octobre 2015
Dans cette vidéo, le vin est abordé en tant qu’objet de civilisation. Les intervenants expliquent en quoi l’élaboration des normes viticoles a fait l’objet d’une lutte sociale. Le film montre ensuite que ces normes sont aujourd’hui menacées par le projet de Grand Marché Transatlantique. Enfin, la nécessaire transition écologique de l’agriculture est défendue à travers l’exemple de vignerons bio.
Vous trouverez dans cette vidéos des interventions (par ordre d’apparition) de :
– Serge Azaïs, viticuteur coopérateur à Montagnac (Languedoc)
– René Morenao, Président de la cave coopérative de Montagnac (Languedoc)
– Jonathan Nossiter, cinéaste artisan
– Jean-Pierre Frick, vigneron bio (Alsace)
– Claude Buchot, vigneron bio (Jura)
– Valentin Morel, vigneron bio (Jura)
La Commission européenne ne comprend rien au vin
Question à la Commission européenne
Applicable au 1er janvier 2016, le nouveau régime européen des autorisations de plantation de vignes prévoit que ces « droits » auront une durée de validité de 3 ans maximum, contre 8 ans actuellement.
Or, les cycles d’arrachage/replantation de vignes nécessitent souvent une période de repos du sol, « sans plantation », supérieure à trois ans. La politique agricole commune promeut d’ailleurs la rotation des cultures et la jachère.
La Commission a-t-elle conscience que les durées d’autorisation désormais prévues ne sont pas compatibles avec les cycles de la viticulture ?
Cette incitation à replanter plus vite, avant même que les sols ne soient restructurés, fragilise les nouvelles vignes et diminue leurs espérance de vie. Cette logique mercantile à court terme diminuera de facto la part de « vieilles vignes » considérées comme les plus qualitatives.
La Commission a-t-elle conscience que ces mesures nuiront à la qualité et la compétitivité des vins européens ?
Enfin, la nécessité de laisser reposer les sols après un arrachage est renforcée par l’enjeu de dépollution, de fertilisation naturelle et de lutte contre l’érosion promu par l’agriculture biologique en plein développement.
Quelles modifications la Commission envisage-t-elle pour corriger son erreur d’appréciation ?