Interview parue dans Le Progrès du 22 octobre 2015
Emmanuelle Cosse, secrétaire générale d’EELV, a indiqué vouloir fusionner avec le PS dans l’entre-deux tours des élections régionales. C’est une position à laquelle vous souscrivez ?
Je ne me positionne pas. Ce sont les listes qui décideront, ou les assemblées représentatives de citoyens. La décision sera nécessairement collective. La liste n’appartient pas à sa tête de liste.
Il y a un risque pour que la gauche marque un fort recul à ce scrutin…
En effet. Qui l’aura voulu ? Les électeurs ! Dès lors, c’est aux battus de réfléchir sur leurs responsabilités. Mais vous savez comme moi que le PS ne se pose aucune question. Il pense que s’il y a un problème, c’est la faute des autres. Je pense exactement le contraire. Les citoyens se détournent des urnes et se détournent de « la gauche » qu’ils assimilent au PS, c’est à cause de l’immoralité de ce parti.
À l’issue d’une conférence sociale houleuse, comment peut-on faire pour retrouver un dialogue apaisé entre les acteurs sociaux ?
Je pense que les choses iraient mieux si le gouvernement se comportait d’une manière moins unilatéralement engagée du côté de la partie la plus dure, c’est-à-dire du Medef. Le gouvernement lui donne sans cesse raison, reprend son vocabulaire et toutes ses demandes. Du coup, il y a une extrême tension car les représentants des salariés ont le sentiment que la partie est complètement biaisée et que ce ne sont pas des rencontres honnêtes. Le Président de la République n’arrange pas les choses par ses remarques fielleuses sur les syndicats. « Réformer » c’est en réalité leur reprendre toutes les conquêtes sociales et régresser. Le « dialogue » revient à demander des redditions sans concessions. Sur les retraites complémentaires par exemple, les salariés qui y ont accès viennent de se faire voler deux ans de pension. Si le chef de l’État dit que c’est ça le modèle du dialogue social, comprenez que tout le monde soit assez tendu. Et puis le Medef fait la loi, mais il n’est pas représentatif de la plus grande partie du patronat français.
Vous vous êtes élevé contre la demande de relaxe du parquet de Lyon à l’endroit de Marine Le Pen, prévenue de provocation à la discrimination ou à la haine. Mais le rôle du parquet, c’est quand même de faire droit ?
Bien sûr que le rôle du parquet c’est de faire du droit. Mais en France, les magistrats du parquet ne sont pas indépendants, ils agissent sur la base d’instructions qui sont données par le gouvernement. Peut-être que ce procureur-là a estimé que la situation juridique ne lui permettait pas de demander autre chose que la relaxe. Un autre aurait peut-être envisagé les choses autrement. Quelle est la ligne de référence ? Il n’y en a pas ! Mme Le Pen est en train de dresser les Français les uns contre les autres sur la base de la religion. Elle proteste contre les prières de rue, qui ne sont pas acceptables, mais pas contre celles des illuminés catholiques anti-IVG. Sa cible, ce sont les musulmans. C’est une attitude délibérée que je considère de guerre civile. Faute d’instruction générale du gouvernement, elle se trouve protégée. Ça prouve qu’elle est très utile au système.
Propos recueillis par Geoffrey Mercier
– Lire l’argument : « Le Medef : un groupuscule nullement représentatif »
– Voir la vidéo : « Le Medef contre l’intérêt général »