J’ai fini d’écrire en apprenant que le gouvernement turc venait de faire abattre un avion russe qui aurait traversé son espace aérien pendant vingt secondes. La volonté d’escalade est évidente de la part de ce gouvernement car il voit se mettre en place une coalition universelle qui contrarie ses objectifs régionaux. Mais le risque de guerre généralisée se confirme. On doit donc compter sur la sagesse du gouvernement russe pour éviter le pire.
Depuis le 14 novembre, d’une prise de parole à l’autre, j’ai pu dire bien des choses. Mais parler n’est rien en soi. Compte ce que les mots provoquent chez ceux qui les entendent. C’est pourquoi la prise de parole est une prise de responsabilité. Je traite ici d’abord de ce point. Donc, cette fois-ci encore je réserve mon appréciation sur le bilan du gouvernement. Ce n’est pas le plus urgent. Je me contente de dire que je n’aurais pas voté l’état d’urgence qui me semble créer davantage de problèmes qu’il peut en régler. Puis je viens sur ce que je considère comme l’essentiel : avoir une stratégie globale dans le contexte. C’est-à-dire une façon d’agir qui couvre tous les aspects du problème posé. De l’ordre du monde aux mécanismes intimes de construction de soi, tout se tient quand tout se défait
Mais tout en mettant en place la panoplie des moyens complexes et nombreux qui sont nécessaires, on ne devrait pas perdre de vue l’essentiel. Aucune action « terroriste » n’a jamais lieu en France autrement qu’en relation directe avec un conflit entre puissances. Dès lors, la priorité est de stopper la guerre dans la région de la Syrie et de l’Irak là où est l’enjeu pour tous les protagonistes.
Je ne dis rien des élections régionales. Sinon pour vous inviter à vous préparer à voter comme je le ferai moi-même. Pour le reste, l’état d’imbroglio permanent du Front de Gauche fait que je ne peux même pas nommer nos listes tant elles ont de configurations différentes selon les régions. Tous mes efforts pour obtenir une stratégie et un accord nationaux ont été vains. Ni les étiquettes en région, ni les classements du ministère de l’Intérieur ne permettent le plus souvent de s’y retrouver. Entre les listes « Front de Gauche » du seul PCF (comme par exemple en Nord-Pas-de-Calais-Picardie ou dans la région Centre), celles du Front de Gauche en entier, celles où le Front de Gauche est allié aux Verts et celles où seul le PG est allié aux Verts… c’est la grande tambouille. Donc, faites pour le mieux avec ce que vous avez sous les yeux. Pour moi c’est simple en région parisienne je vote pour la liste de Pierre Laurent, Clémentine Autain, Éric Coquerel. Pas de Verts. Ils n’ont pas voulu.
Au fil des heures, mon intention était de répondre à des besoins particuliers que l’expérience de situations similaires m’a fait connaître. Les chocs de la nature des massacres de la nuit du 13 novembre sont amples et profonds. C’est bien le but des meurtriers. Leur façon d’assassiner est faite pour cela. Ils ne visent ni une institution, ni un bâtiment, mais la société elle-même à l’endroit où elle se construit et s’organise selon des règles de vie communes : en nous-mêmes. Car, par empathie, dans les premiers instants, nous sommes frappés bien davantage que dans le cas de n’importe quelle autre situation qui mettrait en cause une institution ou ses personnels. Nous sommes tous couchés à terre dans le Bataclan, assis à la terrasse du café où la mitraille passe, puis, ensuite, parents, frères, sœurs, cousins, amis personnels, de ceux qui ne reviendront pas, dont les sourires ne se verront plus qu’en photos pour toujours.
De la sorte, ce qui s’est passé n’est pas un évènement extérieur à nous, cela n’est pas seulement arrivé « aux autres » mais à nous-mêmes aussi d’une certaine façon. Ce choc diffuse en chacun de nous des réactions qui se modifient d’heures en heures, de jour en jour, et nous font faire un parcours toujours unique où maintes douleurs enfouies sont réveillées, et bien des connexions intimes mises à vif et reconfigurées. L’instinct nous pousse à attribuer une cause à la douleur que nous ressentons. Nous voulons alors la nommer, lui donner un visage. L’ennemi, qui est-ce ? Que peut-on vouloir contre lui ?
C’est le moment de ne pas se tromper. Ce processus est un enjeu. Pour les amis du choc des civilisations le moment est trop beau. La figure de l’arabe musulman est immédiatement proposée à la vindicte publique. Et cette proposition se fait de bien des manières parmi lesquelles bien des insidieuses. Au bout du compte, il s’agit toujours de construire un lien qui part de l’arabe pour finir dans le terroriste comme s’ils allaient plus ou moins de soi. Il n’en est rien. D’aucune façon. C’est bien pourquoi sont si dangereux ces groupuscules prétendument identitaires qui lynchent des passants, attaquent des mosquées, et font des scènes d’hystérie collective contre les populations marginalisées. Pour ne rien dire des politiciens à deux balles qui proposent des solutions qui n’en sont pas et ne se distinguent que par leurs exagérations. Ceux-là comptent sur les frustrations que provoque le refus de leurs délires.
J’en reviens aux personnes que nous sommes. Nos réactions au lendemain des faits portent un double contenu : on ressent très fort et on réfléchit de façon tourbillonnante aussi. Affect et raison, le vieux couple est en scène. L’aide que je pense utile d’apporter par la parole veut se placer dans les deux registres. D’abord accompagner la sidération et l’angoisse tétanisante qui naît dans l’instant et s’infiltre partout ensuite des jours durant. Je ne suis pas spécialiste de cet état. Je connais juste l’importance de se tenir présent et proche et de tenir la main pendant que chacun fabrique ses anticorps et panse des plaies dont le voisin n’a pas idée. Et je sais que cela doit être fait, non seulement à titre privé, mais sur la scène publique quand on a l’honneur de s’y exprimer.
Après quoi il faut aussi venir à la discussion rationnelle. Donc aussi à la politique. Parler de politique participe aussi des soins car cela va mettre l’évènement à sa place dans le grand tout des faits qui font une vie. Là encore la parole est une action. Expliquer aide. Nommer l’ennemi et montrer ses buts pour proposer des façons de les déjouer et de les mettre en échec, c’est aussi replacer le monde dans la réalité concrète. C’est l’arracher aux brumes poisseuses des fantasmes et des cauchemars. C’est proposer une grille de lecture pour comprendre et affronter la suite des évènements qui vont se produire. Apprendre sur soi et sur le monde libère. Mais bien-sûr, au-delà de l’expérience individuelle, il y a le devoir d’agir en société. Mieux vaut affronter de face une réalité dangereuse. Point par point il faut déjouer la stratégie de l’ennemi. Il faut la traquer partout où elle agit. En soi et dans le monde. Nous avons besoin d’une approche rationnelle de la situation. Ici il s’agit de penser un combat : comment ôter à l’adversaire ses points d’appuis et de quels moyens nous doter pour marquer nos points contre lui ? Il faut pour cela se doter d’une vision ample et aussi globale que possible des paramètres de la situation.
Si l’origine des basses besognes des terroristes est dans la guerre en Irak et Syrie comment la stopper là-bas ? Il faut d’abord pour cela ne pas se tromper sur ce qu’elle est. Prenons un instant pour nous souvenir d’un commencement que les moins de 24 ans n’ont pu connaître.
J’ai voté en 1991 contre la guerre en Irak d’où est parti tout le chaos actuel. À l’époque, le président des USA, George Bush avait annoncé qu’avec cette guerre allait naître un « nouvel ordre mondial » après l’effondrement de l’URSS. La théorie du « choc des civilisations » surgit en 1996 pour donner un habillage idéologique au nouvel âge de l’Empire enfin débarrassé de son adversaire et qui s’en cherchait un autre pour justifier son interventionnisme et ses budgets d’armement. On voit en quoi ce nouvel ordre consiste. Si vous voulez bien rire, cherchez les éditos d’alors signés par Alain Duhamel ou Jean-Pierre Elkabbach et des autres grands prêtres de toutes les guerres. Un an plus tard, en 1992 se tenait le premier « sommet de la Terre » sur le climat à Rio de Janeiro. J’étais dans la délégation française qui accompagnait François Mitterrand sur place.
Deux décennies plus tard, on sait ce qu’il en est des belles résolutions « non contraignantes » de l’époque. Le même Bush avait annoncé : « le mode de vie américain n’est pas négociable ». Dans l’un et l’autre cas, je ne dis rien de la façon dont furent traités les gens comme moi, qualifiés de suppôts des crimes de Saddam Hussein et « d’anti-américanistes primaires ». Ceci m’est l’occasion de vous dire combien le temps long est le temps du réel qui se construit tandis que le temps court des effets de communication et des emballements est un temps vain, source d’erreurs tragiques. Vous verrez bientôt ce que valent les décisions, élaborées en pleine crise émotive cette fois ci, le super état d’urgence et la reforme constitutionnelle décidée par François Hollande moins de 60 heures après le massacre du 13 novembre…
En ce qui concerne le nouvel épisode actuel de la guerre commencée en 1991, Alain Billon, mon maître en la matière, bien malade aujourd’hui, m’a enseigné à ne pas perdre de vue les niveaux qui s’empilent pour former le terrain du conflit. Mais c’est sur la dernière couche que fleurissent les évènements. Je laisse donc de côté ici le conflit israélo-palestinien. Les autres strates qui entrent en jeu sont souvent moins bien perçues en Europe. On connaît l’antique rivalité des Perses et des Arabes dans la région. On connaît aussi celle plus actuelle entre les monarchies et les autres régimes de la région qui ont à tour de rôle menacé leur existence archaïque : nassérisme, panarabisme, socialisme, baassisme (en Syrie et Irak) et à présent l’actuelle République tunisienne, du fait de sa constitution démocratique et de sa façon d’opérer la séparation du religieux et du politique dans les institutions. On sait quel rôle joue la question kurde et l’inflexible détermination du peuple kurde réparti entre quatre pays. Et on sait aussi que tous les conflits finissent par transiter par l’opposition religieuse entre sunnites et chiites, sans oublier celles qui opposent ou allient les sous-composantes de chacune de ces branches de l’islam dans la région, et ce n’est pas du tout un détail. Sans oublier non plus la prégnance du tribalisme. Évidemment, à mesure que les structures étatiques sont détruites, la société glisse par pans vers les autres niveaux d’organisation qu’elle contient et qui n’ont jamais été effacés.
Alors l’observateur superficiel peut croire que la situation qu’il voit a toujours été. En réalité, il ne voit qu’un état transitoire de décomposition de la société. Tout cela joue. Mais plus que tout joue l’accès au pétrole et au gaz, les points de passage des pipelines. Ils étaient les enjeux de la première guerre du Golfe. Ils étaient la vraie cause de l’intervention en Afghanistan. Ils sont au cœur de la lutte présente. Pour suivre les guerres et les combats actuels, suivez les pipelines.
En France aussi, la lutte contre les assassins de Daech appelle un réel changement de pied. Parler de « guerre intérieure » comme l’a fait Valls est un sidérant abus de langage. Nous avons besoin d’un vrai État, fort, respecté, efficace pour assurer la sûreté de tous. Parler de « guerre intérieure » c’est reconnaître un statut de guerriers à de lâches criminels qui tuent des gens sans défense. C’est aussi désigner sans le nommer un ennemi de l’intérieur support de tous les fantasmes. Il faut d’urgence au contraire priver ainsi nos ennemis du terrain pourri des ressentiments et des stigmatisations propices aux recrutements. Sur notre territoire, contre le terrorisme, on doit donc faire la police. C’est-à-dire réprimer ou prévenir des actes et poursuivre des personnes en particulier. Et non des idées, des concepts ou fantasmes. La surenchère sécuritaire ne sera pas efficace. Les Echos soulignaient ainsi récemment que 23 textes ont été adoptés en matière de renseignement depuis 1986. Depuis 2001, il y aura eu 10 lois contre le terrorisme adoptées : 4 lois de sécurité comprenant des dispositions anti-terroristes et 6 lois spécialement anti-terroristes. Déjà 3 lois antiterroristes ont été votées sous le mandat de François Hollande dont deux rien que dans cette dernière année. La loi sur le renseignement adoptée au printemps n’est pas encore entièrement en vigueur : seuls 5 des 12 décrets d’application ont été pris. Évidemment, aucun bilan, aucun rapport de synthèse n’a jamais été établi. Pourtant ! S’il a fallu revenir tant de fois sur le sujet cela signifie tout de même que l’on a été à côté de la plaque déjà 22 fois !
Faisons simple : le premier devoir est la reconstruction de l’État. La lutte contre le terrorisme passe par des moyens publics. J’en reste à la police. Remonter les filières, tarir les financements, démanteler les trafics mafieux, notamment d’armes de guerre, repenser les prisons, disposer d’un maillage territorial fin et régulier en matière de renseignement etc., tout cela demande de l’argent public, des fonctionnaires nombreux et formés, une politique qui ne se résume pas à de la communication ou à la politique du chiffre. Encore faut-il une police et une justice républicaines en état de fonctionner. En temps normal, les disfonctionnements et manques de moyens sont devenus la norme. L’urgence est de reconstruire l’État.
En la matière, pourquoi ne pas se fier à l’avis de l’ancien juge anti-terroriste Marc Trévidic. Selon lui, « ce ne sont pas les lois qui manquent, mais les moyens » pour les appliquer. Bien sûr, des moyens de police et de renseignement. Mais ce qu’il pointe surtout, c’est l’indigence des moyens de la justice anti-terroriste et de l’analyse du renseignement. C’est indispensable dans ces enquêtes longues et difficiles, où il faut remonter des filières, surtout si l’on veut pouvoir assurer l’efficacité des procédures et pas seulement la mise en scène d’opérations coup de poing. Ainsi, selon ce juge, « Nous faisons face à un goulet d’étranglement : quand près de 2.500 personnes travaillent au renseignement, en face, il n’y a que 150 personnes du côté judiciaire ». Et, il ajoute : « il importe de doubler les effectifs du département judiciaire de la DGSI. Cela permettra notamment d’éviter la situation actuelle où seulement la moitié des personnes qui se sont rendues en Syrie pour des raisons terroristes sont aux mains de la justice. Le reste circule librement en France, parce que nous n’avons pas les moyens nécessaires de traiter leur dossier ». François Hollande a annoncé la création de 2 500 postes dans la justice. Ils seront les bienvenus. Mais chacun devine que cela ne peut se faire du jour au lendemain. Les retards pris nous ont mis en danger.
Beaucoup comprennent enfin que la République a besoin d’un État présent et efficace. La politique libérale et d’austérité budgétaire se trouve ainsi condamnée par là où on ne s’y attendait pas forcément : la situation de la gendarmerie, la police, la justice, les douanes, l’armée dresse un réquisitoire terrible contre l’irresponsabilité des politiques publiques des libéraux… Le président de la République a donc dû faire volteface. Son annonce de plusieurs milliers d’embauches dans les services publics de sûreté sonne comme un terrible aveu d’échec pour lui et son prédécesseur. Souvenez-vous de M. Sarkozy moquant en 2007 qu’il y ait toujours des douaniers alors « qu’on a supprimé les frontières ». Ils ont perdu 2700 postes en 10 ans y compris sous le gouvernement Hollande. Résultat : moins d’un conteneur sur 1000 est fouillé ! Il aura donc fallu une tragédie pour obtenir ce que plusieurs grèves nationales des douaniers n’ont pas obtenu : l’arrêt des coupes et 1 000 embauches selon la promesse de François Hollande. Quant à la police et à la gendarmerie, là aussi, les chiffres sont accablants. 12 000 postes ont été supprimés par Nicolas Sarkozy. François Hollande avait promis en 2012 de créer 1 000 postes par an pendant son mandat dans ce secteur dans lequel il incluait la justice. Cela ne permettait pas de reconstituer les destructions sarkozystes. Mais selon le journal Le Monde, la situation est pire encore « sur les trois exercices clos du quinquennat Hollande (2012, 2013, 2014) les effectifs réels dans la police ont baissé de 143 997 à 143 050, et de 96 213 à 95 195 dans la gendarmerie. 2015 devrait être la première année du quinquennat Hollande à voir une hausse réelle ». Il y avait donc moins de postes au début de cette année qu’en 2012 ! Qu’en sera-t-il réellement des 5000 créations supplémentaires annoncées par François Hollande d’ici 2017 ?
Entendre François Hollande dire que « le pacte de sécurité l’emporte sur le pacte de stabilité » est un heureux changement de pied. On aurait aimé entendre cela à propos d’un pacte de solidarité ou d’égalité. Sans parler d’un pacte de santé publique face à l’effondrement en cours du système. Mais ne faisons pas la fine bouche. La mise en cause de la politique d’austérité, même du seul point de vue sécuritaire, est une respiration bienvenue que nous saurons pousser plus loin le moment venu. Dans ce contexte, certains sont particulièrement irresponsables. Ainsi le MEDEF et son président Pierre Gattaz. Dès le lendemain des annonces du président de la République en matière de moyens publics, il a appelé à ne « pas laisser partir à vau-l’eau les dépenses publiques ». Pour lui, comme pour d’autres, « il faut faire des économies par ailleurs, faire mieux avec moins ». Bonne idée : supprimons le versement des 40 milliards prévus dans le cadre du crédit d’impôts compétitivité. Mais on devine que ce n’est pas ce que veut dire monsieur Gattaz. Son raisonnement est irresponsable et indigne. Il ferait mieux de se demander si, malgré le professionnalisme des agents, ce n’est pas une bêtise d’avoir confié au secteur privé des tâches comme la sûreté aéroportuaire au prétexte que cela coûterait moins cher ? Peut-être pourrait-il cesser ses attaques contre le service public et sa mendicité fiscale pendant quelques temps ? Je le dis aussi à l’attention de Pierre Moscovici. Le commissaire européen a déclaré ce jeudi 19 novembre que les règles du pacte de stabilité « ne doivent pas être remises en cause ». Que valent de tels idéologues illuminés dans les circonstances que nous vivons ? Ils sont absurdes.
Ensuite nous devons reconstruire des frontières. Car la lutte contre le terrorisme condamne aussi le mythe rédempteur de la libre circulation des marchandises et des biens comme un bienfait permanent. La libre-circulation des capitaux et des marchandises permet aux armes et à l’argent de circuler sans contrainte. Sans parler du pétrole, du coton ou des œuvres d’arts pillés en Irak et en Syrie. L’absence de contrôle des personnes aux frontières extérieures et intérieures permet aux assassins de se déplacer quasi-impunément. Bien sûr, c’est une ligne de crête. Certains instrumentalisent cette question pour dresser des frontières mentales et affectives. Pour eux, les frontières doivent être des murs, si possible avec des barbelés et jusque dans les cœurs. Pour nous, les frontières sont des portes. On doit décider souverainement de les ouvrir ou de les fermer. Vouloir des frontières et des contrôles n’est pas vouloir la fermeture du pays. Simplement vouloir faire respecter la souveraineté des citoyens qui y vivent. On peut vouloir des contrôles aux frontières et refuser la surenchère sécuritaire ou identitaire, comme je le fais.
Enfin c’est une tâche prioritaire de renforcer les anticorps républicains de la population. L’unité du peuple de France est un enjeu. Je dois donc citer à cet instant l’idée d’une Garde nationale par conscription. Tous les Français, garçons et filles y seraient affectés à tour de rôle pour assurer un certain nombre de tâches de sûreté, de protection de bâtiments et de sécurité civile. J’en suis personnellement partisan de longue date. François Hollande a repris le mot sans que personne n’ait compris de quoi il parlait précisément. Le but de nos ennemis est de nous diviser et répandre la haine entre nous. Ne pas se laisser manipuler sur ce point c’est faire un grand pas vers notre victoire. Dans ce domaine c’est aussi faire acte de lucidité. L’islam ne poussa pas davantage au crime terroriste que n’importe quelle autre religion. Et il est temps de bien se dire qu’on ne nait pas djihadiste, on le devient. Si l’on veut tarir le mécanisme du recrutement, il faut écouter les spécialistes de ces questions et suivre leurs conseils plutôt que les délires et les fantasmes des rouleurs de mécaniques ou des racistes. Là encore, l’ancien juge anti-terroriste Marc Trévidic dit des choses qui doivent faire réfléchir : « ceux qui partent faire le djihad agissent ainsi à 90% pour des motifs personnels : pour en découdre, pour l’aventure, pour se venger, parce qu’ils ne trouvent pas leur place dans la société… Et à 10% seulement pour des convictions religieuses : l’islam radical. La religion n’est pas le moteur de ce mouvement et c’est ce qui en fait sa force ».
Samedi soir sur le plateau de l’émission « Salut les terriens », l’anthropologue Dounia Bouzar a très bien expliqué les mécanismes d’embrigadement. Sur la base des 700 jeunes dont elle a la charge, elle nuance l’approche qui unit mécaniquement misère et crime, islam et djihadisme. Elle nous apprend que sur ces sept cents jeunes à la dérive on compte bien des enfants « de professeurs, d’avocats, de médecins ». En revanche, elle confirme l’importance toute relative du milieu religieux. Plus de la moitié des jeunes radicalisés dont elle s’occupe sont issus de familles athées, chrétiennes et même juives ! Cela confirme que nous sommes bien face à un processus d’embrigadement mental comme y procèdent les sectes. D’ailleurs, la structure dans laquelle elle travaille s’appelle « Centre de prévention contre les dérives sectaires liés à l’Islam », elle parle de « secte totalitaire », de « retournement » des individus. La prévention, le signalement précoce, l’accompagnement, la mise en place de programme de déradicalisation sont donc des exigences absolues et urgentes.
La répression des fanatiques est un devoir dans ce contexte. Il ne peut y avoir d’excuses pour les meurtriers ni ceux qui voudraient les imiter. Je plaide donc pour ne pas se laisser aller à un misérabilisme compassionnel qui ne mène nulle part. Que dans le peuple des croyants, comme dans la société toute entière, les pauvres soient les plus nombreux ne donne nullement le droit d’établir un lien mécanique entre la pauvreté et le fanatisme. Et quand cela se trouve, la pauvreté n’est ni une cause unique ni une excuse. D’une façon générale, nul n’est jamais exempté de sa responsabilité personnelle devant ses actes. Le crime n’a pas d’excuses, même quand il a des explications. Et j’invite aussi à distinguer tout le temps entre les croyants et leur foi et les organisations qui les encadrent et parlent en leur nom.
Je n’ignore rien non plus de ceux qui tirent les ficelles : ce sont nos ennemis depuis bien longtemps, ici et partout comme l’ont montré les assassinats de Charlie Hebdo ou de nos camarades progressistes Tunisiens. La lutte de l’obscurantisme religieux contre les Lumières est une longue et vieille affaire. Il ne faut donc jamais donner non plus aucune excuse à aucune religion quand elle prétend imposer ses vues par la force ou l’intimidation. Dès lors je me prononce pour une répression sans faiblesse des prêches ou des manifestations propageant la haine religieuse. Il est bien dommage que rien ne soit fait contre les groupuscules qui sont descendus dans la rue pour frapper des immigrés, souiller des mosquées ou agresser nos camarades. La répression doit frapper rudement les fanatiques ethnicistes et religieux violents quelle que soit leur bannière. Pour l’instant, ce que nous voyons n’est vraiment pas bon. Ficher des manifestants qui militent contre l’état d’urgence est hors sujet et gravement attentoire à l’entretien de l’esprit civique. Interdire les manifestations syndicales, politiques ou écologistes tout en permettant les marchés de noël est un pari très risqué en même temps qu’une décourageante stigmatisation des citoyens qui s’engagent pour leurs idées.
116 commentaires
Le Père Duchesne
Je vote dans le Nord. A Gauche. je constate avec regret l’incapacité du Front de gauche à se présenter uni ici. Cette fois, il suffit, l’Humain d’abord ce sera sans moi cette fois, puisque confisqué par le PCF. EELV n’aura pas ma voix non plus. Je réprouve les replis sectaires et les alliances de convenance. Je voterai donc à gauche, en toute conscience au premier tour, pour la seule liste possible. Le second tour sera un autre problème.
Salut et Fraternité.
thierryjj93
Je partage toute l’analyse excellente faite par Jean-Luc Mélenchon sauf sur un point qui m’échappe. La raison de l’enclenchement de la première guerre du Golfe est l’annexion d’un pays, le Koweït, par un autre, l’Irak. Le Président de la République française à l’époque, François Mitterrand, n’a engagé la France dans la grande coalition seulement et uniquement dans un objectif clair, public, qui est le respect du droit international qui exclut l’annexion territorial d’un pays par un autre. Que les Etats-Unis aient eu d’autres objectifs, notamment le pétrole et accessoirement, la tête de Saddam Hussein, personne ne le nie. Après 6 mois d’intenses activités diplomatiques, vaines au final, la France a participé à l’opération militaire « Tempête du désert » qui n’a duré que 2 semaines. Les rares excursions de troupes alliées, notamment militaires américaines, en Irak ont été politiquement dénoncées et stoppées par François Mitterrand. De fait, le Koweït a recouvré la pleine souveraineté. L’Irak n’a pas été occupé par les alliés. Il a fallu attendre 2003 pour que les USA mettent en œuvre leur théorie du « choc des civilisations » en occupant l’Irak, à l’aide de mensonges d’Etat sur les fausses armes de destructions massives.
Vous aviez voté contre la décision de Mitterrand en 1991 pour des raisons qui se défendent mais qui ne s’appliquaient pas à l’action menée par le Président Mitterrand.
Makno21
Si je comprends bien, chaque fois que le droit international a été violé, nous sommes intervenus par la guerre. Le fait qu’il y avait du pétrole n’a donc rien à voir avec la première guerre d’Irak. Je suis vraiment soulagé.
Bingo
Clap clap. Merci pour votre post monsieur Mélenchon. Je vous verrai bien avec Monsieur Dupont-Aignan. On a très vite besoin d’un recours « sexy » pour les prochaines échéances électorales, sinon malheur.
J’ai envie de dire aussi, les attentats récents sont pour partie la résultante d’une porosité entre les systèmes mafieux et le radicalisme, qui n’ont trouvé de front que trop longtemps silence et inaction. On achète pas cher la paix sociale dans nos banlieues, on paye le prix fort.
Bonsoir.
naif
C’est une plaisanterie d’associer JL Mélenchon avec Dupont-Aignan ? Le recours « sexy » est à tomber.
Lilav38
Je sors tout juste d’un meeting de NPA, dans le 20ème, plein d’émotions. Dans le bus je lis ton texte. Je te sens désabusé pourtant j’ai envie de te dire qu’il faut lutter, lutter encore, descendre dans la rue avec nous. Lutte encore avec nous contre cet état d’urgence pour lequel tu dis ne pas avoir envie de voter, et qui moi m’effraie, mais qu’on nous prépare à supporter pour longtemps. A voir et conserver comme une normalité, la nouvlle normalité. Ne nous laissons pas faire, luttons. Lutte avec nous encore comme tu as su le faire, comme il faut que tu le fasses encore. Viens, viens la rue t’attend, es confiance. Es confiance en ce peuple que tu as tant défendu et que tu défendras encore car il le faut. Viens, viens…
CENTURION
Ne croyez-vous pas que Jean-Luc Mélenchon ne vous a pas attendu pour manifester dans la rue et ce plus qu’a son tour et certainement plus qu’a la majorité d’entre-nous ? Il fait largement sa part du travail démocratique, là ou il se trouve. Et si Jean-Luc se trouve désabusé, c’est aussi un peu a cause du NPA qui refuse toujours la main tendue depuis des années. Désolé de vous le dire camarade, mais le NPA porte aussi une lourde responsabilité dans notre impasse actuelle. Amicalement !
PrNIC
@centurion
« c’est aussi un peu a cause du NPA qui refuse toujours la main tendue depuis des années »
Simple info pour éviter de généraliser, la liste « Drome terre de gauche » pour les dernières législatives avait pour titulaire une PG et en suppléante une NPA, avec le soutien du MPeP, alternatifs, communistes PCF et NPA. Cette liste unitaire (comme celle de « Limousin terre de gauche ») a été torpillée la veille de l’ouverture de la campagne. C’était trop beau !
Michel Davesnes
J’eus aimé que dans ce billet, M. Mélenchon, vous nous disiez un mot sur le fait que le Front de gauche a voté la prolongation de l’état d’urgence et les lois d’exception qui vont avec. À ce propos, je trouve vos deux dernières phrases très en deçà de ce qu’il faudrait dire en pareille circonstance. Les militants qui ont manifesté dimanche dernier en soutien aux réfugiés ne sont pas seulement fichés. 58 personnes ont été contrôlées et identifiées par la police pour ne pas avoir obéi à l’injonction de ne pas manifester. Elles sont toutes convoquées au commissariat de la sûreté territoriale, 27 boulevard Bourdon (Paris, 4ème arrondissement) pour y être entendues et – peut-être – poursuivies. J’ose espérer que le Front de gauche va se mobiliser pour elles, y compris les élus nationaux comme André Chassaigne qui ont eu la faiblesse de voter les lois scélérates interdisant à l’opposition de gauche de manifester (tout en laissant dans le même temps les matchs de football et les concerts se dérouler).
PG
Bonsoir ,
Toutes ces interdictions ne sont en vérité destinées qu’ en vue des élections à venir et tout particulierement contre le PG .
Segeric
Je lis en diagonale, mais sur le conflit en Syrie, l’engagement des Russes aux côté de Bachar, pour quelles élections une fois la victoire contre Daech, s’allier aux Russes. Nous n’avons que des infos parcellaires. Je manque d’éléments. Quant aux terroristes, le cause de Daech est un prétexte pour… Le mal est plus profond, et bien tel que tu le décris, et là tu as mon soutien. Je reste perplexe sur la politique étrangère, parce que mal informé.
jean ai marre
Cruel dilemme en effet, si l’on casse Daech, on consolide Assad !
Nicks
Le principal, c’est de maintenir l’État fonctionnel. Ensuite les syriens décideront.
Clau
Il n’est pas étonnant que vous soyez mal informé lorsque notre gouvernement relayé par les médias a tout fait pour valider ses mensonges sur la Syrie. Le gouvernement et l’Etat syriens sont reconnus par tous les Etats. Assad n’est pas un dictateur qui assassine froidement son peuple mais le représentant d’une frange sociale laïque et socialiste (autrement que notre PS) en guerre civile contre une autre fortement encadrée par des islamistes. Même si nous avons un contentieux avec lui, cela reste la réalité ! Je vous conseille de lire ceci. Pourquoi cette attitude de nos gouvernants ? Je vous conseille de lire ceci.
Amicalement.
JeanLouis
Bravo Mr Mélenchon, magnifique texte qui donne du corps à mes réflexions personnelles.
Quelques remarques. D’abord au commentateur précédent, comme le dit JP Chévènement le régime syrien est un régime détestable mais il a le mérite d’exister et la priorité des priorités à court terme est Daesh, alors oui grande coalition avec les Russes et le problème Bachar sera celui du peuple syrien lui même. A ce propos je ne sais pas si vous avez vu le dernier revirement pitoyable du caniche Hollande devant son maitre Obama hier pour refuser cette grande coalition, j’avais honte d’être représenté ainsi !
L’état d’urgence commence déjà à faire ses méfaits, voir l’intervention musclée chez un pauvre restaurateur. J’ai un doute, pour la première fois ne serait on pas en face d’un mouvement qui ne prendra pas fin quand les conflits entre puissances comme vous dites cesseront ? C’est ce que pensent certains spécialistes ?
Enfin élection en PACA où je vote, c’est quand même effrayant de voir arriver le vote massif pour une jeune personne sans expérience aucune dont la seule « qualité » est de s’appeler Le Pen ! Quelles pertes de repères de nos concitoyens. Le peuple a toujours raison, oui… mais quand même ?
L. A.
Bonjour M. Mélenchon
D’accord, comme d’habitude, avec la majeure partie de vos arguments, je suis quand même perplexe, comme souvent, devant certains d’entre eux. Ainsi, quand vous énoncez : « Aucune action « terroriste » n’a jamais lieu en France autrement qu’en relation directe avec un conflit entre puissances. », il me revient vaguement en mémoire ce que vous-même teniez naguère à préciser, c’est-à-dire que les actes de terrorisme commis sur notre territoire ont été imputés dans la majorité des cas à des activistes d’origine locale (Bretons, Corses, Basques, extrême gauche radicale, groupes fascistoïdes, …).
Quant aux alliances politiques, on peut comprendre les réserves de diplomatie qu’un homme public tel que vous est astreint à afficher vis-à-vis des trahisons, abandons et défections qui nous ont causé de si grands préjudices (et qui continuent), mais pour nous autres, vulgum pecus, il est désormais hors de question de continuer à faire semblant d’y croire. Question de dignité.
Sur le point d’une conscription nationale républicaine, bien des choses peuvent être envisagées. En particulier cette idée d’un service national civil (secourisme, entretien des lieux publics, agriculture saisonnière, auxiliaires civils de toute sorte…), rémunéré correctement et sans aucune exemption.
En tout cas merci et bon courage à vous, nous finirons bien par sortir du tunnel.
PS : j’ai cliqué par erreur sur « répondre » au lieu de me servir de la case « poster un commentaire ». Ce n’est pas une réponse à « JeanLouis », que je prie de bien vouloir m’excuser.
Michèle
Conseil de quartier : la question de l’insécurité (incivilités, vols) occupe le débat sans que le lien soit fait avec les attentats dans les prises de parole, mais l’austérité, la disparition de la police de proximité, des médiateurs ont été pointés par les victimes comme responsables de la dégradation et inefficaces les interventions ponctuelles répressives. Etonnamment personne n’a évoqué l’état d’Urgence comme un atout et comme pour confirmer la démonstration.
marj
@segeric
Je vous recommande un reportage passé sur France Inter (j’ai halluciné), vendredi soir, et que l’on peut toujours écouter « Daesh, la fabrique d’un monstre« . Vous comprendrez ce que J-L Mélenchon veut dire.
Pourquoi la France ne dit mot de ceux qui ont financé Daesh et lui achètent le pétrole (Pays du Golfe, Turquie) ? Pourquoi n’aide t-on pas les Kurdes qui combattent Daesh au sol ? La phrase de J. Jaurès « Le capitalisme porte en lui la guerre, comme la nuée porte l’orage » est plus que jamais d’actualité, ou comment se créer ses propres ennemis.
naif
C’est peut-être « secret d’info » sur France inter vendredi à 19h20.
CEVENNES 30
Bonjour à tous,
La France intervient illégalement en Syrie sans autorisation du gouvernement syrien et sans mandat de l’ONU. Seule la Russie a un mandat officiel de l’état syrien. Partout où intervient l’Otan, il démantèle les états souverains, crée le chaos et subitement Daesh apparait, bien sur qu’ils sont les créateurs de ce monstre. Pour accaparer les richesses en gaz et pétrole de ces pays et permettre le passage de leurs pipelines, pour isoler la Russie et ne pas être dépendant de l’énergie russe. Quel jeu trouble joue Erdogan après avoir donner l’ordre d’abattre un bombardier russe qui ne menace pas les intérêts turcs mais les rebelles islamistes, ils fusillent un des pilotes en plein ciel. Il ne présente aucune excuse ni remords et court se réfugier sous le parapluie militaire de l’impérialisme étasunien. Cela suffit, il faut sortir de l’Europe et de l’Otan qui nous mènent à la ruine et à la guerre. Cordialement.
catherine dumas
Bonjour,
J’ai écouté attentivement l’émission BFM avec l’ancien juge Trevedic. Comment ne pas constater son découragement face au manques de moyens dont il a de nos jours pu constater les méfaits. Pourquoi lui avait on tant retiré de pouvoir, d’efficacité, là est la question. Et puis, lui qui connait bien le problème et ses ramifications, qu’attendons nous pour lui redonner toute son efficacité ?
Monsieur Mélenchon, certains politiques ne montrent pas l’exemple, depuis des années, comment voulez vous que l’on puisse encore en France croire à quelque chose d’efficace quand certains se moquent de la justice ouvertement. J’ose espérer que la moralité de nos élus devienne un exemple sinon la justice ne pourra rien sauver.
bertrand
Bonjour.
Reconstruire l’état, refonder une politique extérieure, s’affranchir de l’OTAN, réaffecter des moyens… Pourrons-nous appliquer ce juste programme au sein de l’Union européenne ? N’est-il pas temps de tirer les conclusions de tant d’années de descente aux enfers, de quitter l’UE et de s’ouvrir sur le monde ?
Le Roy
Ambiguïtés internationales, ambiguïtés nationales, régionales, électorales… Le flou artistique qui règne autour des listes FdG n’a d’égal que le monde dans lequel nous vivons ! Je suis musicien, donc habitué à certaines formes de « désorganisation » et à une certaine violence concurrentielle mais j’ai été frappé par l’ultra-violence de certains lorsque j’ai voulu militer activement dans ma ville. L’approche des élections transforme certains des plus idéologues d’entre nous en vautours égoïstes électoralistes. La 6ème vite car notre système encourage ce genre d’attitude !
François
Bonjour M. Mélenchon, merci de nous aider à rester lucides sur la politique et les événements actuels.
Vous m’avez de nombreuses fois ouvert les yeux et je vous en serai toujours infiniment reconnaissant. Mais enfin, pourriez-vous nous expliquer pourquoi aucun représentant du FdG n’a voté contre la prolongation à trois mois de l’état d’urgence ? N’y pouvez-vous vraiment rien ? Et si c’est le cas, pourquoi avez-vous aussi peu d’influence dans votre propre camp ? Ce n’est pas la première fois que les votes des députés de notre camp me désespèrent. Pourquoi ai-je l’impression qu’ils se moquent de nous, tout comme les autres ?
Vassivière
Le Front de gauche est historiquement un cartel de partis : PCF, PG, Ensemble, GA, GU, etc. Les efforts déployés par Jean-Luc Mélenchon pour unifier le mouvement et lui donner une cohérence politique, y compris lors des élections qui ont suivi la présidentielle de 2012, se sont heurtés au refus constant du PCF qui revendique une autonomie d’action et une conception du Front de gauche à la carte en fonction des opportunités électorales, sociales, idéologiques. Ainsi le PCF a-t-il également refusé l’ouverture du Front de gauche aux adhésions directes. A l’assemblée Nationale sur les 10 députés FdG, 8 sont PCF, 1 Ensemble, 1 ex-PG. A leur tête A. Chassaigne (PCF) qui revendique une autonomie intégrale, y compris par rapport à ses propres électeurs ! Donc le FdG est pour ces personnes, pourtant élues sur la base du programme l’Humain d’abord auquel adhèrent encore nombre de citoyens, au mieux un logo commode, au pire une escroquerie. On ne s’étonnera donc pas du discrédit qui atteint désormais le FdG lui-même, surtout quand croyant voter pour une gauche de propositions alternatives les électeurs sont appelés à voter pour le PS ultra-libéral.
Nicks
Plus le temps passe, plus la situation s’aggrave, fort logiquement malheureusement, et plus je suis convaincu que la seule solution pour appliquer une politique alternative est de créer un grand rassemblement sur le modèle du CNR, autour de quelques priorités comme la restauration de la souveraineté citoyenne, autour de la réhabilitation de l’Etat et de son contrôle, la mise en place d’une économie durable et équitable, etc. Je suis persuadé que des gens de bords différents aujourd’hui peuvent se retrouver sur des propositions fondamentales. Il est évident que Jean-Luc Mélenchon pourrait avoir un rôle de pivot dans la constitution d’un tel rassemblement.
magda corelli
Voyez du côté du Mouvement pour la 6ème République.
Nicks
Je suis signataire, mais pour le moment il nous faut une solution de crise avec des objectifs resserrés. Le M6R prépare un avenir de plus long terme…
Gérard MACHLINE
Bravo Jean-Luc,
Beaucoup de choses bien intéressantes dans ton texte. Suivre le trajet des pipelines, effectivement, les conflits sont avant tout de nature économique, voire géographiques (cf l’excellent essai de Georges Corm sur la « nature profane des conflits« ), la religion étant utilisée pour chauffer les combattants.
Bien intéressante aussi la référence à l’émission animée par Dounia Bouzar sur les causes de la radicalisation qui n’est pas l’apanage des exclus de la société mais bien le résultat d’un lavage de cerveau. Pour autant, le type de société que nous construisons n’est pas étranger au phénomène et il n’est pas exclu qu’à la fin du voyage en nous retournant, nous nous trouvions face à notre pire ennemi, c’est à dire nous-même. Par ailleurs heureux de savoir que tu aurais été le 7ème élu à avoir le courage de ne pas voter l’état d’urgence.
Bon courage et amitiés.
agatha5116
Résistance et « on lâche rien » sont plus que jamais d’actualité. Nous devons tous nous aider à tenir donc soyons solidaires dans la résistance. Intensifions le dialogue intergénérationnel en famille comme à l’extérieur afin de protéger nos jeunes d’un avenir sans espoir et sans joie. Merci encore une fois, Jean-Luc, pour ton éclairage sur cette situation dramatiquement complexe.
PIETRON
Le paysage politique français est en recomposition. D’un duo (PS, UMP), nous sommes passés à un trio (PS, UMP, FN). Le PS a été le grand édificateur du troisième nommé. Les années Mitterrand prépondérantes en la matière (absorption du PCF et abandon des valeurs de gauche). Le front de gauche est un front sincère de la base, mais pas des édiles de quelques partis, dont le PCF, composant le FdG. Ils sont atteints par des ambitions personnelles malsaines et gravissimes. Le « front sincère » aura du mal à s’y retrouver entre un Laurent favorable au PS au second tour et des « écolos » complètement dingues. Le parti de gauche, quant à lui, un peu trop marqué par son origine, ayant parfois du mal à qualifier l’origine des maux : le capitalisme. Le paradoxe, provisoirement, va conduire à l’américanisation de la société française. 50% et + d’abstentions, des élus à 20% se targuant d’être légitimes. Le changement ne pourra venir que de la base dès lors que le terrain sera réinvesti et les fouteurs de merde en quête d’un poste à tout prix, évincés.
Le terrorisme a une bien plus longue histoire que Jean-Luc Mélenchon ne l’explique. En fait elle remonte à l’intervention de l’URSS en Afghanistan à la demande de l’état Afghan (tout comme la France l’a fait au Tchad de la même manière). USA, Royaume uni, avec l’aide de la France, ont financé à tout va les futurs terroristes (talibans, toutes variétés confondues). Stratégie idéologique, et économique de l’époque. Çà a…
JeanLouis
Arrêtez de tout ramener à Mitterrand ! Deux remarques. En 81 un programme de gauche comme jamais dans ce pays est mis en œuvre, des ministres communistes. Et en 91 l’attitude ce même Mitterrand par rapport à la représentation nationale, à l’intervention, et à la ligne vis à vis de Bush père, rien à voir avec ce qui se passe de nos jours.
mutti
Comme @françois et @nick, je pense que vient peut-être assez vite le moment pour Jean-Luc Mélenchon de s’affranchir des organisations partisanes et de prendre la tête d’un grand rassemblement citoyen. Il faudra bien nous dépêtrer de la toile gluante des groupes partisans qui très vite retombent dans les travers du désir et de l’appropriation du pouvoir à des fins égotiques.
Ça a un côté « homme providentiel » assez gênant voire dangereux, mais comment avancer autrement ? Il nous faut bien un porte parole et je n’en vois pas de meilleur. Bien heureux qu’il nous éclaire avec intelligence et humanité.
jean ai marre
Oui, Jean-Luc, faisons simple, mais lucide. Qui a enfanté ces monstres ? Ce sont les Etats Unis. Qui nous a foutu dans ce merdier ? Sarko avec la Libye et Hollande avec la Syrie. Quelle bétise d’être rentrée dans l’OTAN. Aujourd’hui, nous n’avons plus de souveraineté. Ficelés, enfagotés, nous sommes à la traine de Poutine et de Obama ! Et cette coalition ? Comment faire converger les priorités, les objectifs et ambitions de 60 pays membres de la coalition ? L’Arabie Saoudite, les Emirats Arabes réunis, la Turquie, les Etats-Unis, la Russie, n’ont pas les mêmes attentes. Comment vont ils faire pour faire basculer les tribus sunnites du bon coté ? C’est l’enjeu principal. Comment vont ils faire pour trouver une opposition Syrienne modérée ? Qui va geler le financement de Daech ?
Et nous nous pleurons nos morts de leur guerre.
PIETRON
Rapidement en réponse à @Jean Louis. En 81, la plupart des idées du programme commun « exceptionnel » étaient en grande partie issues du PCF pour l’amener vers le PS de l’époque. En 84, Mitterrand lui même déclarait: « que voulez vous que l’on fasse contre les marchés? » de là un revirement à 300°. Un fait. Le reste c’est de l’habillage. Mitterrand était un homme très cultivé. Cela ne signifie en rien une « moralité politique » avérée. Très cultivé, très habile. Mais est ce que cela fait les grands hommes (politiques) ? Non. L’histoire globale globale en atteste.
« Rien à voir avec ce qui se passe de nos jours », dites vous. Bigre. Le capital se nourrit des renoncements. Et de renoncement en renoncement il accouche des pires barbaries. Cela dit, c’est surtout le pouvoir exorbitant donné à un seul homme qui est en cause. C’est c’est la véritable démocratie qu’il dévore par la volonté de puissance. C’est aussi ce à quoi il faut s’attaquer.
JeanLouis
Je ne vais pas polémiquer avec vous au delà de ce message. Vous ne m’avez pas répondu sur son comportement lors de la première guerre du Golfe pour arrêter une invasion d’un autre pays, rien à voir avec aujourd’hui et sur les mesures de 81, si ça vous fait plaisir de penser qu’il ne croyait en rien à ce qu’il a proposé libre à vous. Mais nous n’en sommes plus à cette époque et il faut reconnaitre qu’aujourd’hui et depuis des mois, le seul qui dans les media a essayé de porter un autre message est JL Mélenchon sur les cause du terrorisme, la nécessité de s’attaquer aux réseaux financiers de Daesh, sur la besoin d’une autre vision géopolitique dans laquelle la Russie devait prendre toute sa place, en gros ce que tout le monde dit aujourd’hui sauf sur l’inefficacité prévisible de tout renforcement de l’arsenal répressif et sur l’état d’urgence sans pour autant lui en reconnaitre les mérites.