J’ai écrit par discipline de travail. Rien de mieux pour commencer une année d’un bon pas. Comme la fabrication de l’actualité a ralenti, on peut lui tourner le dos mieux que d’habitude. Je traite du plus difficile : commenter les vœux de François Hollande. Ensuite une petite cuillère d’économie. Puis je vous parle d’un professeur de lettres classiques et de littérature comparée de Lons-le-Saunier.
Je crois que François Hollande aura aussi tué ça. Les vœux du président ont perdu 45 % de leur audience depuis qu’il les prononce. Dès lors, il aura au moins dit la vérité sur un point : ces vœux-là en effet, « ne ressemblent à aucun des précédents » car jamais il n’y a eu aussi peu de monde devant la télé pour les entendre à l’heure dite. Le contenu politique était d’une bonne facture de droite assez traditionnelle et pauvre en imagination. Et le reste s’apprécie selon l’humeur de chacun. Pour ma part, j’ai mal vécu les envolées paternalistes : « Français, je suis fier de vous », « mon devoir est de vous protéger » et ainsi de suite. Je ne suis ni de sa parentèle ni de ses protégés pour accepter qu’il se donne ce rôle infantilisant pour ceux à qui il s’adresse. Une fois de plus, on sent la main lourde des communicants. Ils ont dû tellement lui farcir la tête avec « le rôle protecteur attendu par les Français » que l’autre l’a repris à la lettre. Ça me rappelle le coup de l’animateur qui demande à une personne « dites bonjour au micro » et la personne de répliquer « bonjour micro » !
Quant au plan politique, je vous invite à juger sévèrement son propos. Car l’emballage sécuritaire et paternaliste du début proposait ensuite une marchandise bien frelatée. Lourd artifice ! On se demande d’ailleurs pourquoi les vœux du président devraient donner lieu à un discours programme de Premier ministre. En tous cas, les trouvailles les plus éloignées de ce pour quoi il a reçu son mandat présidentiel ont été resservies. Juste avant le repas, c’était très indigeste et peu apéritif. La destruction du code du travail, les sottises sur l’apprentissage, les stages pour qualifier les chômeurs et ainsi de suite, bref : toutes les lubies déjà rabâchées par la droite dans le passé ont été représentées à la table du réveillon.
Dès lors je suis bien triste de lire dans un sondage qu’il y a autant de gens pour vouloir qu’il soit candidat en 2017 qu’il y en a pour vouloir la même chose s’agissant de moi : 24% ! Notez que si ceux qui veulent que je sois candidat votent aussi pour moi, il est bien certain que Hollande devra penser à une autre occupation. Mais que comprendre aux sondages. L’un dit que 100% des sondés (ou presque) veulent le « renouvellement de la classe politique », mais 56% voudrait bien que Juppé soit candidat… Mais bon, d’accord, ça donne aussi un coup de vieux à tous ceux qui faisaient les manifs contre lui pour défendre la retraite à soixante ans. C’était au siècle précèdent, c’est vrai. Mais comme Hollande l’a repoussée à 66 ans ça ferait presque de Juppé un gauchiste.
C’est avec ce tohu-bohu que commence l’année médiatique. Vivement la prochaine agression bidon au cutter, le prochain sketch du faux imam de Corse au 20 heures. Au moins ça fait rire des journalistes, et on regrette quand on l’a manqué en direct. Qui a regretté de n’avoir pas vu en direct Hollande ?
Cette publication a été effectuée sur ma page Facebook :
LES VŒUX D’ARTIFICES DU PRESIDENT Je crois que François Hollande aura aussi tué ça. Les vœux du président ont perdus 45…
Posté par Jean-Luc Mélenchon sur samedi 2 janvier 2016
Au cours de l’année écoulée, nous avons été témoins bien des fois de la puissance des « effets d’annonces » pour amortir le choc de la réalité jusqu’au point souvent de l’effacer du tableau. On pourrait croire que ce ne saurait être le cas à propos des questions de l’économie, domaine où règnerait la froide objectivité des chiffres et des « lois naturelles ». Balivernes. C’est même parfois le contraire. C’est là que souvent la communication est le plus efficacement une action. Naturellement, ceux qui vous administrent l’hallucinogène ne viennent jamais ensuite faire le dégrisement. Pire. Sans vergogne, ils administrent de nouvelles doses d’illusions euphorisantes ou de paniques aveuglées.
Pour qui veut penser sur ces sujets, il faut donc toujours commencer par extraire les faits de la gangue des annonces qui les ont fait disparaître des radars. Pourquoi a-t-on entendu annoncer « la reprise » tant de fois alors qu’il n’en était rien ? Où sont passés les reculs mensuels du chômage ? Qu’est devenu le « plan de relance de l’économie européenne » d’un montant prétendu de 120 milliards d’Euros, destiné « prioritairement à la jeunesse », que François Hollande prétendait avoir obtenu dès son élection et sa première visite à Merkel ? Qui peut dire ce qu’est devenu le plan de relance européen, pour un montant double, annoncé par Jean-Claude Junker, nouveau président de la Commission ? Qui se souvient de la décision à son de trompe du banquier central européen injectant dans l’économie mille milliards entre décembre 2011 et février 2012. Et puisque son successeur a décrété avec un mégaphone géant un plan de rachat mensuel de titres de dettes des États possédés par les banques à hauteur de 80 milliards par mois, où ces montagnes d’argent sont-elles passées ? Pourquoi n’en lit-on et n’en discute-t-on aucun bilan nulle part ? Pourquoi tout cela n’a-t-il produit aucun redémarrage de l’activité où que ce soit ? Quel sont ces mystères ?
Le capitalisme financier de notre temps s’est posé comme une nouvelle peau sur tout le système de la production et de l’échange. Là où régnaient hier l’ingénieur et l’entrepreneur, règnent désormais le directeur financier et le directeur commercial comme les deux bouts de l’aiguille dans la boussole. A présent, l’argent tourne en rond dans la sphère financière sans jamais revenir sur le sol de l’activité réelle. Une belle grosse bulle d’argent, diffusée dans des montages de plus en plus périlleux pour continuer à cracher du rendement. Elle est aussi nourrie par l’énormité des excédents financiers européens. Ceux-là se heurtent comme de juste à l’anémie de la consommation et de l’investissement que les politiques d’austérités budgétaires provoquent. Puisqu’on dédaigne la demande d’équipements publics et qu’on préfère laisser les infrastructures de toutes sortes se dégrader plutôt que de les remettre à niveau, puisqu’aucun plan de transition énergétique n’est mis en œuvre, par exemple, où investir ? Et comme c’est la guerre du dumping social et fiscal entre les 28 pays de l’Union, et puisque tous sont orientés vers l’export en vue de faire des excédents, où investir le flot grossissant de liquidités disponibles ?
Il se jette donc dans la sphère financière aussi mécaniquement que le fleuve à la mer. Mais dans cette sphère, il reste encore brûlant dans les mains de ceux qui le manient. Leurs cocktails financiers sont de plus en plus instables et bien explosifs. Alors se produit le plus drôle. Ceux qui tiennent la taverne des ivresses se gardent de l’eau pour la soif. Ainsi, bien des banques et des établissements financiers refusent de revendre au banquier central les titres de dette des États qu’elles possèdent et qui sont censés être du papier chiffon si l’on en croit les agences de notation. Pourquoi ? Parce que ces titres sont considérés comme « plus sûrs » que les montages inventifs que composent les petits Mozart de la finance…
Cette anecdote en dit long sur le niveau d’hypocrisie des agences de notation qui se tordent les mains d’angoisse devant les dettes des États et en font augmenter les taux d’intérêts du fait de leurs mauvaises notes, mais recommandent qu’elles servent de socle aux compositions folles des montages financiers privés. Elle en dit long aussi sur le niveau d’asphyxie d’un modèle économique devenu incapable de faire un usage concrètement utile de sa puissance. Dans une telle atmosphère de volatilité, tout faux mouvement peut-être terriblement dangereux. Si ici ou là une des composantes, même très locale, s’écroule, l’effet en impactera toute la sphère. Exactement comme un seul coup d’épingle fait éclater la totalité d’une bulle de savon. Tout le monde se tient donc à l’œil. Un mouvement brusque de retrait ici ou là et tchouff, tout peut se déclencher.
Il y a deux semaines le regard portait sur les USA. En effet la banquière centrale nord-américaine a décidé de renchérir ses fournitures en dollars auprès de ceux qui viennent en chercher. En même temps, elle améliore la rétribution des excédents que les banques placent dans ses mains. Une variation certes microscopique pour un œil extérieur. Mais il est d’impact colossal pour ceux qui doivent investir et donc emprunter, ou pour les banques et institutions financières qui ont sur les bras d’immenses masses d’argent à placer. Celles-ci sont parfois coûteuses à loger surtout quand des pays comme le Brésil ou d’autres « émergents », qui stimulaient les appétits, exigeaient des dépôts de garanties pour les placements ! Il leur est même arrivé de fixer un impôt sur les investissements étrangers. L’inconvénient est que si des flots se retirent brusquement, ils assèchent mortellement leur point de départ. C’est alors un peu plus qu’un coup d’épingle imprévu. Sans compter que si ce petit rien décidé par la banque centrale américaine est un régal pour certains, il est cependant impossible que cela stimule l’activité puisque le crédit sera plus cher et que les Américains sont drogués au crédit. Guettez bien si ce ralentissement ne vient pas impacter celui de la zone euro. Et l’aggraver mécaniquement. Avec les risques que cela contient. Tel est le capitalisme de notre époque. À tout moment tout peut sauter.
Il est une nouveauté dans l’Histoire. En effet c’est la première fois que l’économie humaine ne repose plus principalement sur la circulation de biens réels. Le gonflement de la masse de dollars en circulation a fait naître un monde parallèle où l’essentiel des transactions financières ne correspondent à aucune réalité matérielle. En 1970 il s’échangeait 20 milliards de dollars par jour. Dès les années 1990 on en était à 1 500 milliards quotidiens. En 2010 c’était 4 000 milliards de dollars par jour. À la même date, les biens et les services réels et concrets échangés atteignaient à peine 40 milliards par jour. Cent fois moins.
La capitalisation boursière a suivi le même chemin extravagant. Elle est passée de 1 400 milliards de dollars en 1975 à 63 000 milliards en 2007 à la veille de la crise des subprimes aux États-Unis. La « valeur » des entreprises a donc été multipliée par 45 en trente-deux ans. Mais pendant ce temps la richesse matérielle réellement produite par ces entreprises n’a été multipliée que par 3,5.
Dans ce contexte, les accidents graves deviennent de plus en plus réguliers. Certes, le capitalisme n’a jamais été un système stable. De 1816 à 1929, soit à peine plus d’un siècle, il y a eu 14 crises ! Mais le rythme s’est accéléré. Depuis 1973, juste après la décision du président Nixon qui a rendu possible l’explosion de la bulle de dollars, il y a eu 12 crises ! En moins de quarante ans, presque autant qu’en un siècle ! Et depuis 1992, déjà 8 crises en vingt-deux ans. Le monstrueux bug dit « des subprimes » en 2008 a mis à genoux les États et les peuples chargés de renflouer les banques. Nous sommes encore en train de le payer. Des promesses de prudence et de moralisation furent alors faites. On sait qu’il n’en reste rien. On devait par exemple séparer les activités des banques d’affaires de celle de dépôts.
De cela, en France, Moscovici a fait une pantalonnade qui impacte à peine deux pour cent du bilan des banques concernées. Celles-ci peuvent donc continuer à jouer avec l’argent des déposants. Qui a pu protester alors, à part ceux qui comme nous ne croient pas que la spéculation soit l’horizon indépassable de l’activité financière ? Peut-être va-t-il en aller autrement à présent. Car la création de l’Union bancaire européenne a abouti à une situation très nouvelle pour ceux qui ont plus de cent mille euros de dépôts dans une banque. Ne croyez pas que ce soit seulement peu de monde. Ce sont surtout des gens influents et décideurs. Leurs craintes compteront donc. Dorénavant, en cas de faillite d’une banque, les actionnaires devront payer pour le renflouement. Mais les « gras comptes » aussi. Ceux de ces gens-là. Evidemment, ils ont bien besoin que leur argent soit placé là où il rapporte le plus. Mais ils ont surtout besoin aussi de ne pas le perdre.
À cette heure, la bulle est repartie de plus belle. La part européenne s’y accroit vite, stimulée par les injections de liquidités, la fraude et « l’optimisation fiscale », toutes calamités qu’aggrave la politique de féroce concurrence des États de l’Union entre eux au plan fiscal et social. Elle reste donc mollement pendue au-dessus du vide d’investissements en Europe et à la merci d’une bourrasque qui la ferait éclater. Dans le système actuel il ne peut en être autrement.
Mais pensons à ce que nous pourrions faire ! Nous trouverions à peu de frais beaucoup d’argent pour notre plan de relance de l’activité réelle. En partant des besoins concrets, économie de la mer ou transition énergétique par exemple, nous trouverions un ample champ de crédits possibles avec une contrepartie matérielle visible et tangible. La possibilité d’un compromis dynamique avec le capital entrepreneurial existe. Les fonds aussi. Par exemple on sait qu’un euro sur deux aujourd’hui placé dans l’assurance vie est utilisé à l’étranger. Tout cela se discuterait plus utilement que les cadeaux sans contrepartie du système Hollande, Valls et Macron. La politique de la demande se pilote. L’État maître du temps long des investissements et du plan y est une garantie centrale. Celle de l’offre ne peut rien produire d’autres que des effets d’aubaines conjoncturels. Et surtout, elle finit d’intoxiquer un système productif déjà lourdement drogué aux enrichissements sans cause.
Bref, une distribution de vin chaud dans une salle d’alcooliques réfrigérés.
L’activité politique est doucement repartie. J’ai donc l’opportunité d’utiliser cet espace pour une circonstance plus personnelle qui cependant parlera, je l’espère, sans doute à beaucoup de ceux qui me liront. Nous avons tous « un prof » dans notre vie, non ? Homme ou femme, nous lui devons cette sorte de passage à gué pour l’esprit, là où il y a un avant et un après. L’intervention dans notre vie de « notre » prof nous aura souvent poussés dans nos choix, d’une manière décisive, sur un chemin ou sur un autre. Le plus souvent, cette rencontre ne reste pas purement intellectuelle dans ses conséquences. C’est-à-dire qu’en nous faisant découvrir ceci ou cela, ou bien des fois par son seul comportement à notre égard ou devant toute sa classe, ce prof rayonne pour toujours en nous. Cela parce que nous savons très intimement qu’il en est résulté un grand chambardement ou bien une de ces infimes modifications qui aura ensuite élargi de façon incroyable son influence sur nous toute notre vie. C’est pourquoi le métier d’enseignant est un art si délicat. Les profs savent qu’ils sont en face d’êtres en formation, ils sentent leur responsabilité et leur impact humain. D’autant qu’eux aussi ont eu leur prof. Et peut-être est-ce de son exemple qu’ils ont tiré à leur tour l’envie d’enseigner.
Beaucoup d’entre nous marquent une fidélité profonde à ces héros anonymes qui ont changé discrètement nos vies. Et moi comme vous. J’ai tout annulé pour être à l’heure de son rendez-vous cette semaine, puisque c’est l’heure de l’accompagner pour sa dernière demeure. Il s’agit de Rémi Jobard, professeur de lettres classiques et de littérature comparée au lycée Rouget de l’Isle de Lons-le-Saunier. J’en parle en pensant à tous ces maîtres qui ont été sur nos parcours.
Il affichait une simplicité autant par principe philosophique que par goût spontané. Au début, nous ne savions pas que nous l’admirions. Nous, la petite troupe de littéraires passionnés dont ses cours étaient le centre du monde. Puis le temps ayant passé, nous avons su qu’il était en réalité devenu l’une de nos références essentielle. Il nous enseigna Montaigne. Jeune homme embrasé, j’en restais à l’impression d’une soupe tiède. Mais sa manière de faire m’avait tout de même immédiatement inculqué le sentiment que je ne comprenais pas quelque chose. Je lui dois ce doute. Il fit son effet. Lui nous avait proposé mieux qu’un savoir : une curiosité.
Oui Montaigne est décisif ! Je le sais à présent. La voix de Rémi Jobard résonne dans ma tête quand je lis que toutes « nos vacations sont farcesques » et me vois encore si agité et obsédé d’action. Et je fais de Montaigne un horizon mental. Comme le fit François Mitterrand pour sa photo officielle, car le livre qu’il tient ouvert devant la rangée des livres (encore) fermés, c’est bien « les Essais » de Montaigne. Mais quand il nous fit connaître et comparer Antigone d’Anouilh et celle de Sophocle, je sus que je touchais à l’essentiel de ce qui serait une trame de vie pour moi comme peut-être pour quelques-uns de mes condisciples. Sans doute n’en tirèrent-ils pas les mêmes engagements que moi. Il me reste donc à apprendre. Mais j’ai le cœur plein de gratitude pour cette rencontre décisive avec Antigone mais aussi avec Créon. C’est-à-dire avec l’art de maintenir la société par le respect de la loi et d’en rester à sa discussion ou bien celui de n’entendre que la voix de sa conscience quand bien même le devoir qu’elle vous assigne vous rend seul, vulnérable et dérisoire dans vos obstinations. Mais c’est de là qu’est ancrée notre liberté la plus intime. Celle qui vous identifie à vos propres yeux. Une autre fois, les Pensées de Pascal en main, il arpentait l’estrade. J’ai compris que j’avais de bonne raison d’être « inquiet » comme le dit le philosophe. C’est-à-dire sans quiétude. C’est-à-dire en mouvement. Bon sang, j’en suis toujours là !
Mes lecteurs me pardonneront ces digressions littéraires qu’un jeune homme loin dans le temps fait vivre en moi à cette heure. Je n’ai pas de chagrin. « Le bon maître est celui qui apprend à se déprendre de lui » pour penser. Comme pour vous peut être, mon prof siège dorénavant comme conseiller au tribunal de ma conscience. Peut-être rallumerez-vous en me lisant l’image en vous de « votre » prof. On dira donc qu’on commence l’année en pensant à ceux dont c’est le métier de nous rendre meilleurs.
120 commentaires
Lépiné
Une maitresse de l’école maternelle qui me fit apprendre à lire, écrire, compter avant d’entrer à l’école primaire, un instituteur qui me fit redoubler parce qu’il ne me trouvait pas assez mature pour entrer en sixième à neuf ans, un professeur de français, au lycée, qui ne parvenait pas à se convaincre qu’il ne pourrait pas lire tous les livres. Je sais quelles sont mes dettes, et ce que dois à l’école de la république. C’était avant, avant l’ère LR-PS.
Denis F
Que de nostalgie dans tous ces commentaires…
La nostalgie du passé équivaut au refus du présent, à l’évidence le temps présent nous porte vers ce refus. Cela vient quand le présent n’est pas à la hauteur des promesses du passé. Alors quittons ce pathos qui n’est guère propice au combat. N’oublions jamais que nous sommes en guerre de classe et que c’est l’oligarchie bourgeoise qui nous l’a déclaré. Je doute qu’il y ait beaucoup de prolétaires à lire ce commentaire, néanmoins, je leur dis : ne vous laissez pas endormir. Aux autres, je vous demande de nous rejoindre, car vous êtes les prochains sur la liste d’extermination, il y a trop de bouches à nourrir, donc trop de dépenses sociales qu’ils réduisent selon l’austérité programmée.
PIETRON
Je ne pense pas que la nostalgie équivaut au refus du présent. Nul besoin de la nostalgie pour refuser le présent (j’espère). Non c’est un sentiment humain qui permet de faire resurgir les uns et les autres, tel ou tel aspect d’une vie. La nostalgie peut être une forme de futur, y compris politique en matière de lutte. Il faut conserver son humanité dans ce cloaque capitaliste.
Cela dit je relève qu’il serait donc possible de faire des compromis avec le « capitalisme entrepreneurial ». Eh bien cela c’est le genre de « nostalgie » qui pose question (rejet pour moi). On voit bien où cela a mené… une amplification de la domination de classe.
Denis F
@ PIETRON
Je crois qu’il y a mal entendu concernant le « capitalisme entrepreneurial », vous m’avez certainement mal lu, je m’excuse de remettre ma remarque une seconde fois, mais les choses doivent être claires et ne pas portées à confusion.
« Que voilà une méthode bien étrange pour lutter contre le capital et réduire la propriété lucrative ! »
Le Père Duchesne
Nostalgique, sans doute. Mais lucide aussi. Illusions perdues sont forces d’avenir.
BADIOU Marie-Andrée
Ah ! ces profs détestés ou adorés! détestables ou adorables. Faisant partie de nos figures tutélaires. Moi, j’en avais un à domicile, mon père. Quel temps passé à m’aider, m’expliquer que l’erreur est salutaire pour pouvoir réfléchir. Au lycée ses collègues l’appelaient « le rouge ». Eternel combattant pour l’émancipation, il demandait les classes dites difficiles. Sa vie est remplie de luttes pour l’exploration des savoirs au profit des plus humbles. Une vision politique du statut et du pouvoir que chacun peut s’approprier en se libérant de la conscience magique. Son dernier livre a fait l’objet d’un envoi au Parti de Gauche, à l’attention de Jean-Luc Mélenchon et son équipe. Il n’a jamais eu de retour. Il n’en reste pas moins qu’il suit passionnément votre réflexion, vos actions, votre parcours cher Jean-Luc. « A quoi nous sert il de parler de culture quand c’est la vie qui s’en va ? » dit Antonin Artaud. L’ailleurs est aussi avec vous.
jean ai marre
Mes profs m’ont appris et m’ont aussi montré de belles choses. A chaque entrée du janvier par civilité et par gentillesse on se souhaite de bonnes choses.
Tous mes voeux, Jean-Luc Mélenchon.
Francis
@PIETRON
ça vaut peut-être la peine d’attendre un développement avant de rejeter. D’autant plus que le secteur coopératif est lui-même d’essence capitaliste.
PIETRON
@Denis F
J’avais bien entendu. Je relevais la déclinaison de Jean-Luc Mélenchon (j’aurais du le préciser). Je suis totalement d’accord avec votre remarque initiale.
@Francis.
J’attendrai en effet le développement. Cependant, quand il est écrit une telle déclinaison politique, il faut toujours, un tant soit peu, développer, pour lever « l’ambiguïté » s’il y a. Dans une société d’essence capitaliste, il n’existe pas d’îlots socialistes. Les coopératives ne peuvent être que d’essence capitalistes. Le socialisme se construit en profondeur, par l’expropriation capitaliste. Ceci demande une volonté majoritaire associée à une volonté politique.
Francis
@ PIETRON
« Ceci demande une volonté majoritaire associée à une volonté politique »
Je viens de lire dans l’Humanité une récente déclaration de Pierre Laurent qui nous livre le fond de sa pensée. Notons tout d’abord qu’il fait un distinguo entre Les gens du Front de gauche et les communistes et qu’ensuite il nous propose de repartir dans une alliance entre les socialistes (lesquels) les écologistes (lesquels).
« Il faut un candidat dans lequel se reconnaissent les socialistes, les écologistes, les gens du Front de gauche, les communistes, qui soit un véritable candidat de gauche »
Laquelle ? Alors, l’expropriation des capitalistes, ce n’est pas pour demain. Il faudra peut-être envisager quelques étapes transitoires.
sergio
J’aurais vraiment du mal à distinguer un ou une professeur parmi tous ceux que j’ai eu la chance d’avoir depuis l’école primaire jusqu’à la fac. Très différents les uns des autres, ils étaient quasiment tous très investis dans leur travail et leur savoir spécifique. Respectés sans être soumis à des successions de contre-réformes qui réduisent leur horaire disciplinaire par classe (ou les suppriment), dénaturent leur mission ni à des blocages de salaire.
A l’époque pas de discours sarkozyste ou macroniens contre les fonctionnaires non plus. Je ne connais pas un seul professeur qui ait abusé ou démérité de ce statut suspecté ou décrié depuis les années Balladur ou Raffarin. Je vous recommande à tous de jeter un œil sur les sites des syndicats enseignants comme le snFOlc, le snalc ou le snes pour appréhender l’ampleur de la régression imposée par Chatel, Peillon ou Belkacem.
Mes meilleurs vœux à Jean-Luc, au M6R et au PG .
sergio
Mais si je dois jouer le jeu des distinctions de « maîtres » qui m’ont beaucoup apporté, au-delà d’un savoir maîtrisé et d’une rigueur de travail exemplaire, je citerai Mmes et Ms Marchionni (CM1), Taieb (Français, Lycée JB Corot, 91), Hébert (même lycée, Philo), de La Moura (Histoire, Lakanal, 92) et Biraux et Gualpérin (Philo, Paris IV).
PG07
« Le bon maître est celui qui apprend à se déprendre de lui » pour penser. Tu fais donc partie des « bons maitres ». Reste à présent à le faire entendre, comprendre et admettre aux gens comme le dit Jean-Louis (comm 50) pour 2017.
Tu peux compter sur nous pour relayer, diffuser, expliquer… et gagner.
thery
Bonsoir. Meilleurs vœux à tous. En total accord avec @jean louis. Moi j’ai eu un prof en pension 1956/1958 qui m’a en deux ans remis sur le bon chemin (Mr José Goubidsa Guéza). J’ai 71 ans et ce monsieur a marqué la suite de mon existence. Quellle chance d’avoir croisé cet homme un court instant de ma vie.
Christelle
Je commence avec mes 3èmes la comparaison de Anouilh et Sophocle, moi aussi. Je suis pas du genre Ismène qui aime à rougir ses ongles et à se faire belle et les élèves disent déjà que je leur fais lire ça parce que les filles qui résistent j’aime bien, ils lisent que ça (c’est pas vrai, on lit pas que ça). Je me dis donc que la réflexion est bien partie. C’est normal, le monde tout comme la littérature est plein de femmes engagées qu’on veut faire taire. Alors on les lit à 15 ans avec son prof de français avant de la devenir.
arthur 2
Meilleurs voeux Jean-Luc Mélenchon. Force et espoir. En route. Mes profs. Mon instit du primaire Henri, Tatave prof d’élec, Roger math, Jeanine français, etc. Georges, père missionnaire en Afrique et des « figures » sans grade. Je pense en effet reposer sur un mix de cette nature. Que toutes ces réflexions nous donnent plus d’assurance et de motivation pour convaincre autour de nous.
YMZD
C’est vrai que l’ado a besoin d’un référent. Parfois il le trouve dans sa famille, parfois non. Parfois c’est un prof, parfois non. Pour mon compte, c’était un prof de maths. Et je devins prof de maths. En LP, pour servir les enfants de la classe sociale dont je suis issu. Un grand bonheur. Mais je ne sais pas si j’ai été référent pour l’un d’entre eux. C’est triste de pas savoir.
Olivier
Bonjour,
Il fut un temps ou vous disiez vous interdire d’utiliser le mot croissance. Et pourtant vous parlez ici, comme souvent, de « relance de l’activité réelle ». Subtile variation sémantique qui ne peut tromper personne. J’ai cru un temps que le Parti de gauche, mon parti, avait une certaine idée de la décroissance. Je constate avec tristesse que cette idée disparait doucement. Il est plus qu’urgent de rêver en terme de partage et non plus de croissance (ou de relance).
Bien cordialement. Et, très sincèrement, merci pour tout ce que vous avez fait et tenté.
Tony
Traverser le pont avec Jean-Luc dissuade de verrouiller un cadenas sur sa rampe : l’empreinte du temps suit ses pas et ne requiert aucune fixation fétichiste. Est-ce à dire que le moment Mélenchon aurait perdu de sa vigueur ? Certes, non ! À mon tour je pense anecdotiquement à cet abonnement si souvent reconduit au Monde Diplo (et son cadeau virtuel du 6/35 qui va avec !) ; maintenir le cap sur le discernement du mal et de l’abjection de notre époque pour mieux en combattre les effets délétères relève du courage missionnaire et de l’obsession critique, mais devrait être déclaré d’intérêt public.
Quand les nuits se multiplient plus vite que ne s’additionnent les jours, que les repères se font repaires, le doute vecteur de vérité, les vieilles lunes astre solaire et que si ma tante en avait… Voilà que ça ne tourne plus rond, que l’an neuf ne promet plus rien, que la vraie gauche patine et que les citoyens décrochent ! Alors, que faire ? La question laisse sans voix les plus hardis.
Un cycle s’achève probablement, qui plonge ses derniers Mohicans dans des océans de perplexité, infestés de sirènes nihilistes. Et pourtant, quoi de plus nécessaire et vital que de tenir bon, de poursuivre le combat à la mesure de ses moyens, sans se laisser gagner par l’inéluctabilité de la défaite face à ce grand rien de l’absurdité humaine ?
Aspasie
Aspasie
Vieille instit, on ne disait pas encore « prof des écoles », je veux témoigner des messages que j’ai reçus de mes élèves. A la vieille des congés de Noël, une enfant d’origine magrébine a écrit en douce au dos du tableau « Je pleure en pensant à Madame I« .
Et un autre (11ans) « Huit heures et trente minutes, la classe bourdonnante s’installe. Mais soudain la porte s’ouvre et Mme I entre. Jupiter du haut de l’olympe écrase et apeure les simples mortels ! Mais soudain, voilà Jupiter qui se transforme en berger. Grande toge et beau bâton et une gentillesse, c’est le gardien de troupeau qui cajole brebis en leur racontant des histoires de divisions qui… »
Les deux faces de la maitresse, l’autorité et la gentillesse. Je les ai aimés et réciproquement, je crois !
Peretz
Je pense à mon instituteur « à l’ancienne » celui que j’ai eu juste avant la guerre. On l’appelait le père Potel, c’était son nom. C’est probablement de lui que je tiens mon amour de la république et qui m’a inspiré le bouquin qui devrait sortir dans la semaine qui vient « 6ème république, changeons les lignes » (Bookelis)
Martz
En effet on commence doucement ! Peu de choses sur les dernières élections, sur l’explosion de la gauche de la gauche et sa disparition par dissémination. Pas d’analyse sur les stratégies suivies jusque-là et 2016 qui semblent reparties sur la recherche d’alliances, de la constitution d’un front, de l’homme providentiel pour 2017, avec pour fondement la critique du PS et de son gouvernement comme si il était encore nécessaire de tirer sur des ambulances, comme s’il n’y avait pas d’autres voies pour se mettre à exister. Pas de réflexion sur MR6, onzième ou douzième « mouvement statique » à la gauche, non pas de la gauche, mais du PS.
Bonne année quand même mais va falloir y mettre du nôtre !
Michel 65
C’est vrai que ça commence bien doucement de ce coté ci, compte tenu des orages passés et à venir, ça va pas durer. Je souhaite, quand à moi, que cela soit pensé et agi collectivement, et en phase avec les envies et besoins de notre peuple.
gawsewitch g
Il y a de nombreuses années les enseignants agrégés des lycées l’étaient par vocation et prenaient un grand plaisir à transmettre des programmes cohérents. Je me souviens des bons mais aussi des moins bons. Le savoir et le savoir faire acquis nous permettait d’accéder à l’enseignement supérieur sans difficulté. Aujourd’hui je constate auprès de bons élèves de terminale S leur ignorance abyssale en matière de culture générale. A qui la faute ? aux politiques en premier lieu les programmes ont été massacrés à la suite de leurs consignes cf L. Ferry et les mathématiques. En terminale on ne démontre plus rien on donne des recettes. Les enseignants sont insuffisamment formés. Les conséquences sont nombreuses et connues. Je ne vois ni à droite ni à gauche, toute la gauche la volonté d’une véritable réforme de la maternelle à l’enseignement supérieur.
Bud Butley
Je n’ai pas eu un prof du 3e cycle, mais je me suis rappellé 2 profs au lycée qui ont scellé mon destin. L’une, Ms Philipps, était prof de litérature Anglaise mais elle m’a mis la puce à l’oreille avec une simple démonstration. Lorsqu’on vous dit que telle chose « est meilleure » ou « mieux » demandez-vous si c’est mieux qu’une peau de banane. Elle m’a enchangé. Ça marche.
Puis l’autre était la directrice de l’école qui m’avait découvert une jour de pluie, en lutte avec l’un des harceleur de la gang qui dominait la récrée. J’avais saisi ses boucles dorés et je lui tappais la tête contre le sol en pleurant. Ms Kirkhope m’a gentiment relevé et m’a serré contre sont sein de mère poule. Elle a sanctionné l’autre, Jenny, et a su se saisir du contexte et ne pas jouer le « texte ». Pas mal.
NAVARRO
Je me souviens et aujourd’hui, je sais que deux professeurs m’ont sauvé. « Mon » professeur de français en 4ème, Melle Pensa, et plus tard, Monsieur Castanier (professeur de philosophie). Et encore plus tard, un professeur de Droit Constitutionnel (Droit Lyon). Ils resteront à jamais enfouis dans ma mémoire. Et pour finir, Madame bouchardeau, professeur de psycho-pédagogie, Université des sciences humaines à Lyon-Bron.
Chaize René
Cher Jean-Luc heureux de te retrouver malgré tous ces naufrages organisés. Tu es devenu pour moi comme un point géodésique au milieu d’une jungle facho, socialolibéraldingue. J’ai d’autres repères, issu de l’apprentissage. Le premier est un Rosier prof de français qui m’a fait comprendre que pour une meilleure vision, il fallait s’élever, prendre de la hauteur. Dans les cours du soir et au travers de lectures, j’ai rencontré Henri Guillemin avec la guerre de 70 et l’histoire de la Commune. Lui m’a décillé les yeux sur l’écriture officielle de l’Histoire. C’est Claude Duneton qui en a rajouté une couche avec son « anti-manuel de Français ». « Dis-moi d’où tu écris… quel est l’angle de la plume? ». La couche irréductible, j’y suis dedans depuis trente ans avec la psychologie de la motivation de Paul Diel ( petite bibliothèque Payot) qui nous invite à une remise en cause personnelle et définit une loi d’harmonie qui amène à des valeurs universelles, induisant une éthique sans morale conventionnelle. Il ne peut y avoir société sans valeurs et leur négation, leur disparition est le signe de la décadence de nos sociétés, nous y sommes…