Tout le monde a compris ? La réforme de l’impôt sur la fortune se passe comme ça : les actions et les signes extérieurs de richesse sont exonérés. Cela occasionne une perte pour le budget de l’État de 3,5 milliards d’euros. Le nouvel impôt ne rapportera que 1,5 milliard au lieu de 5 avant la réforme. Notons la petite ruse juridique : l’ISF est supprimé et un nouvel impôt est créé. Impossible alors de parler de rupture de l’égalité devant l’impôt. « C’est juste que les actions et les signes extérieurs de richesse ne soient pas taxés puisque c’est juste un impôt sur l’immobilier ». Malin non ? À ce cadeau s’ajoute donc un « prélèvement forfaitaire unique », un prélèvement « libératoire » de 30% sur l’ensemble des revenus du capital. Deuxième ruse juridique, les 30% incluent la CSG ! C’est là un super « bouclier fiscal ». En tous cas c’est un magnifique cadeau pour ceux qui possèdent du capital et vivent de sa rente. Coût estimé par le gouvernement : 1,5 milliard. Mais on parle plutôt de 2 milliards d’euros.
Pourquoi cette pluie de faveur sur les riches ? Voyons les arguments du gouvernement. Cet argent servirait aux riches pour « financer les entreprises » en les incitant à acheter des actions plutôt que des châteaux. On leur donnerait donc des capitaux pour innover et embaucher comme le dit Bruno Le Maire sur France Inter. C’est doublement inexact : le financement des entreprises ne marche que par deux moyens : l’émission d’actions et les prêts bancaires. Si les riches se précipitaient pour acheter des actions mises en vente pour « financer des entreprises », ils n’en trouveraient pas. En effet le total des actions émises sur le marché par les entreprises pour leur financement ne représente qu’une part infime de l’activité boursière. L’essentiel des placements n’est que de la spéculation et de l’achat-vente d’actions déjà existantes. Inutile et malsain, sans rapport avec le « financement des entreprises ».
Le nouvel impôt en écartant les actions de son prélèvement est donc une incitation à la spéculation et rien d’autre. Si le gouvernement veut faciliter le « financement des entreprises » qu’il crée une banque publique d’investissement avec une licence bancaire comme le propose le programme L’Avenir en commun. Cette façon de réorganiser l’impôt sur la fortune fonctionne comme un manifeste idéologique, un acte de foi dans la « théorie du ruissellement » de la richesse du haut vers le bas. Ici il prend une forme particulièrement peu adaptée au moment : favoriser la finance c’est favoriser la spéculation et la volatilité des cours boursiers. Cette méthode ne donne pas un seul avantage à l’investissement qui est pourtant la nécessité du moment.
Un autre argument particulièrement nul est mis en avant : il ne faudrait pas « faire fuir les riches » ! Macron le reprend à son compte pour montrer du doigt Hollande et son impôt à 75 % pourtant finalement abrogé et payé par les entreprises. S’ils ne veulent pas faire fuir les riches, qu’ils mettent en place l’imposition universelle, comme je le propose depuis bientôt sept ans ! Et ainsi que le pratiquent les USA eux-mêmes. Chacun paye son impôt sur place dans quelque pays qu’il soit et paye ensuite la différence de ce qu’il aurait dû payer en France si cela avait été plus. Cette méthode réduit à néant l’effet d’évasion fiscale et permet une bonne chasse aux « faux amis » qui ne livrent pas les noms qu’on leur demande. Savez-vous que les banques françaises donnent aux autorités du fisc les noms des gens sur lesquels pèse un « soupçon d’américanité » ?
Le groupe des insoumis à l’Assemblée a proposé une tout autre logique d’imposition. Évidemment d’abord cet « impôt universel ». Puis un nouveau barème de l’impôt sur le revenu inspiré de «L’Avenir en commun» en 14 tranches. Tout le monde paye dès le premier euro mais selon ses moyens réels. La dernière tranche : au-delà de 400 000 euros de revenu, tout le reste est taxé à un « taux marginal » de 90%. De même nous avons proposé un nouveau barème pour renforcer l’impôt sur la fortune, inspiré de L’Avenir en commun. On le paye à partir de 800 000€ de patrimoine avec un taux progressif. Il remplacerait l’ancienne entrée dans l’ISF qui commençait à 1,2 millions de patrimoine.
Évidemment, nous sommes partisans d’une plus forte taxation des dividendes. Il faut dissuader. Ici, cela passerait par le doublement de la taxation exceptionnelle sur les dividendes de 3% à 6%. Il s’agit de cette taxe inventée puis supprimée par François Hollande (de 3% à 6%). Le but est d’inciter les entreprises à investir utilement dans l’économie plutôt qu’à rémunérer leurs actionnaires.
Pour finir, nous persévérons avec notre « héritage maximum » inspiré de L’Avenir en commun : imposition à 100% au-delà de 33 millions d’euros d’héritage. Comme on connait la musique et qu’on se prépare aux hurlements de ceux qui viennent « défendre la petite maison de toute une vie », il faut rappeler que les héritages de cette taille ne concernent que 0,01% des plus riches.
La plupart de ces idées nous les défendons depuis maintenant deux présidentielles. Elles font leur chemin. Voyez comment d’autres idées avancent. Ainsi quand « France stratégie » demande que la BCE achète directement les titres de dettes aux États ! N’est-ce pas ce qui nous valait des regards hautains de tous ces gens pour qui « la dette » est une vache sacrée qui ne nourrit que le capital ! Évidemment cela n’a pas porté chance à ses auteurs. Le Premier ministre furieux a remis à disposition tous les fonctionnaires de cet organisme pour avoir propagé des « idées farfelues » !