Communiqué de presse du 4 janvier 2017
En présentant ses vœux à la presse, le président de la République a annoncé des mesures d’une exceptionnelle amplitude s’agissant du contrôle de l’information diffusée en France. À première lecture de ses propos, dans le contexte médiatique français et mondial actuel, le risque d’une législation liberticide est évident.
Pour autant, nous faisons le pari du dialogue avec lui sur ce sujet.
Car on ne saurait nier qu’il est urgent de remédier aux abus de pouvoirs médiatiques dont se rendent coupables sans cesse nombre de médias en ligne sans qu’aucun recours ne puisse leur être opposé. C’est pourquoi nous avons fait la proposition d’un conseil déontologique pour y remédier.
Il est exact que le délabrement moral de l’information dite de « service public » est un problème grave pour la dignité des contribuables qui le financent. Il est évident que dans le secteur public, le système de l’externalisation généralisée des productions et le recours à des emplois d’intermittents permanents surexploités est une source d’abus financiers et sociaux innombrables et intolérables.
Il est évident que la concentration de 90% des médias en France dans les mains de 9 milliardaires est un grave défi lancé au pluralisme de la pensée et de l’influence. Chacun peut observer comment s’est ainsi formé un « parti médiatique » répétant en boucle les mêmes préjugés économiques, culturels politiques et géopolitiques.
Bien d’autres points font gravement problème dans le système média en France.
Mais rien de cela ne doit conduire à organiser un contrôle étatique des médias, et notamment des médias en ligne du genre de celui que laisse apercevoir le président de la République. La punition de la diffusion des fausses nouvelles est déjà prévue par la loi. Que faudrait-il ajouter à ce sujet ? Et qui décidera de la vérité ? Pourquoi notre proposition de conseil déontologique, déjà en œuvre dans de nombreux pays, ne répondrait-elle pas a cette préoccupation sans créer le risque d’une « pensée-vraie-officielle »?
Pour l’heure, nous alertons ! En combinant la fin de la neutralité du Net sur laquelle le président ne donne aucune garantie, avec la révision du système de conventionnement avec le CSA, la fin de la liberté des médias en ligne est en vue . Dès lors, le monopole médiatique des oligarques français se renforcerait sans alternative.
Nous nous étonnons qu’au moment où il affirme vouloir renforcer la qualité de l’information, le président ne dise rien des conditions sociales de ceux qui la fabriquent ni des conditions intellectuelles de cette production, en particulier avec l’arrivée des robots journalistes et des agences de production de l’info en ligne.
Pour finir. Nous savons qu’en arrière-plan se dessine, à l’initiative des États-Unis, la volonté de bloquer l’action de deux médias en ligne : Russia Today et Sputnik. Les résolutions adoptées sur ce point au Parlement européen par les groupes droite, PS et Verts sont très vindicatives en effet. Ces deux médias ont fait campagne pour madame Le Pen aux élections présidentielles. Ils sont aussi favorables au point de vue russe que nombre de médias français le sont au point de vue américain. Le public le sait et en tire ses conclusions. Là n’est donc pas le problème. Par contre il est frappant que le président ne dise mot de l’usurpation d’identité en campagne. Elle a pourtant conduit à l’annulation de l’élection législative de juin 2017 dans le territoire de Belfort. Le président veut être utile contre les faux en campagne électorale ? Il devrait alors prévoir des punitions et des peines d’inéligibilité pour ceux qui ont recours à de tels procédés. Et accepter notre proposition d’installer en France comme après tant d’autres pays un conseil déontologique des médias composé de représentant de la société et des professionnels.