Cette semaine a montré des inflexions dans le paysage politique. Je pense que le pouvoir a vraiment mangé son pain blanc pendant les six mois précédents. Car voici le moment où les multiples discours de Macron, qui ont saturé l’espace médiatique et fait vibrionner sans fin les lieux de pouvoirs, rencontrent la réalité. Celle que les gens ont commencé à découvrir avec les licenciements facilités, les choix de discrimination et la sélection à l’entrée de l’université, par exemple. La réplique sociale mûrit.
Dans les hôpitaux, les mouvements se comptent par centaines. Certains se déclenchent contre les conditions de vie et de travail quotidien devenues insupportables. D’autres parce que les nouvelles coupes budgétaires annoncées font comprendre à de nombreux personnels jusque-là le nez dans le guidon que l’avenir sera un enfer pire que le quotidien actuel. Dans les lycées et les facultés, une opinion hostile se construit, s’exprime, se déploie. Les syndicats de lycéens sont en action. Là où ils sont présents, ils sont écoutés comme jamais. L’UNL-SD a organisé les premiers blocages en début de semaine. Et pour nous : de notre côté, nous contribuons de toutes nos forces en faisant un grand et sérieux travail d’information en profondeur. Je pense que d’ici la fin du mois nous en serons à plus d’un million de tracts diffusés, plusieurs centaines de lycées approchés où atteint de l’intérieur, sans oublier les entrées de fac et celles des salons des étudiants.
Mais cette information politisée n’aurait aucun impact sans sa rencontre avec un état d’esprit dans la jeunesse. La méfiance règne. Le refus d’être la génération sans liberté de choix de sa vie gagne les esprits. Et cette méfiance spontanée rencontre à son tour une situation absurde et chaotique qui sent le mauvais coup. Absurde en effet, cette situation où il faut que les administrations appliquent une loi qui n’est pas adoptée. Elle se cabre. Chaotique, cette situation où il faut agir à toute vitesse sans les moyens pour le faire. Car il faudrait aller vite et fort comme l’exigerait la tactique de Macron. Du coup, les médias eux-mêmes se sentent obligés de rendre compte de ces réalités. Maintenant, tout le monde écrit et reconnaît qu’il s’agit d’une loi de sélection et de tri à l’entrée des universités. Les deux réunis portent un nom : discrimination. Beaucoup de médias acceptent donc de voir et de donner à voir la pagaille qui monte et les protestations qui l’accompagnent.
Ce fond social va rencontrer des opportunités électorales. Oh bien sûr, pas partout. Pour l’instant, on ne dispose que de cinq élections législatives partielles, dont quatre dans des circonscriptions où la droite est sortante. Mais dans ce contexte, ces élections législatives partielles peuvent être un bon révélateur politique et un signal majeur. On sait que l’abstention y sera massive. Plus importante encore que celle de juin dernier qui avait dépassé les cinquante pour cent. On nous dit que, comme nous n’étions au deuxième tour dans aucune d’entre elles, ces combats sont perdus d’avance pour nous. Erreur. Nous croyons que nous pouvons faire apparaître le refus montant du macronisme. Et que, dans cette bataille, nos arguments contribuent à faire réfléchir. Les quartiers vont-ils se faire entendre ? Les jeunes vont-ils utiliser l’élection ? Et de leur côté les électeurs populaires, hypnotisés par Macron en juin dernier, sont-ils toujours aussi acquis à la cause de celui qui les frappe sans relâche ? Pour ma part, je ne le crois pas.
Mes amis sont très mobilisés sur le terrain. Les campagnes sont très actives. C’est en soi un signal fort. Les contacts sont bons et généreux. Les députés de notre groupe participent activement aux campagnes. Des dizaines de personnes s’investissent. Naturellement, cela ne nous permet pas de pouvoir deviner où nous en sommes. Il est peu probable que qui que ce soit le sache ou puisse le savoir tant la situation est fluide, tant le « dégagisme » est à la fois fort et capable de prendre des formes différentes dans la vie et dans les urnes. Nous sommes et nous resterons la première force de l’opposition populaire, j’en suis certain. Ce n’est pas rien après les mois de bashing ininterrompus que nous venons de vivre. Parviendrons-nous à accrocher le second tour dans ces deux premières partielles du 28 janvier ? Ce serait évidemment un évènement politique dont la signification dépasserait le succès pour nous. Mais il n’est pas sûr que dans nos milieux sociaux on pense que ce soit une opportunité pour agir. Nous sommes donc actifs et déterminés, en sachant que beaucoup dépend de notre capacité à mettre en mouvement des gens qui sont très hésitants et peu informés. En tous cas, une fois de plus, nous aurons fait notre devoir.
eJeudi dernier, j’ai pu joindre mon ami et camarade Hamma Hammami en Tunisie. L’ancien candidat à l’élection présidentielle est le porte-parole le plus connu du Front populaire de ce pays. Son autorité morale dépasse largement le périmètre des électeurs du Front. Il fait partie d’une élite humaine tunisienne. Celle qui a su garder son sang-froid dans les moments difficiles. Celle qui a préservé la Tunisie d’un dérapage généralisé dans la violence dans les moments très durs que le pays a connu sous la pression du parti islamiste Ennahdha après la chute de Ben Ali. Ma pensée est vers ces moments où l’on tuait devant chez eux Chokri Bélaïd ou Mohamed Brahmi, nos camarades. Alors le choix fut fait de ne répliquer que par l’action toujours plus déterminée au Parlement et dans les manifestations politiques. Avec le recul, tout cela peut paraître simple et évident mais cela ne l’était pas dans l’ambiance de l’époque.
Je voulais entendre Hamma Hammami parce que son analyse me manquait avant de mettre quelques mots sur cette page. Comme tout le monde, j’ai été saisi en apprenant qu’une nouvelle vague sociale déferlait sur la Tunisie. L’information est arrivée sur nos médias sous l’angle habituel anxiogène sous lequel est traité toute révolution. On a d’abord entendu parler du mort et des blessés parmi les forces de l’ordre. J’ai compris entre les mots et les images que les manifestations sociales étaient puissantes, que le système en était déjà à tenter de démonétiser le mouvement à coup de provocations pour produire les images attendues d’un chaos attribuable à « la rue ».
Si cette crise inquiète tant les puissants, c’est qu’elle concerne l’essentiel, ajourné depuis six ans : la question sociale. La crise sociale reste le non-dit de la période post Ben Ali. Pourtant, c’est elle qui a provoqué la chute du dictateur. Sept ans après, rien n’est réglé sur ce plan. Au contraire, la situation a empiré. Les coups de fouets du FMI et de la Banque mondiale n’ont pas été économisés ! La main de fer du gouvernement Hollande n’a interrompu aucune dette alors même que la Tunisie menaçait d’être étouffée. Le PS français et son gouvernement soutenaient le gouvernement du PS tunisien alliés aux islamistes. Tout ce petit monde a bricolé des politiques dont le but essentiel était de préserver la structure de pouvoir économique en place. Pendant ce temps, les islamistes, avec leurs crimes comme celui du musée du Bardo, tentaient de faire fuir les touristes pour prendre à la gorge les ressources du pays.
J’avais besoin de ce contact pour avoir une évaluation aussi objective que possible. Car la semaine dernière a été émaillée de manifestations rassemblant des milliers de personnes. Leur protestation contre le gouvernement et l’austérité qu’il a mise en place se place sous un mot d’ordre simple et mobilisateur. Comme d’habitude, les slogans spontanés des mobilisations populaires résument bien le moment politique et lui ouvre souvent un chemin. On se souvient il y a six ans du slogan de la révolution qui a renversé le dictateur Ben Ali le 14 janvier 2011 : « dégagez ». On sait quel destin a été celui de ce simple mot. Il contient toute la phase « destituante » de la phase que nous vivons.
À présent, la consigne est « fech nestannew » c’est-à-dire « qu’est-lce qu’on attend ? ». Le mouvement a touché le pays tout entier. Comme en 2010-2011, les forces syndicales ou politiques organisées n’en sont pas à l’origine. Le mouvement a démarré spontanément à la suite d’évènements fortuits. Comme en 2011, le groupe social le plus dynamique est la jeunesse tunisienne. Une jeunesse qui a pour caractéristique d’être éduquée, diplômée mais lourdement frappée par le chômage. Celui-ci implique 30% des jeunes. Malgré quelques affrontements avec la police, son mode d’action reste très majoritairement pacifique. Plus d’un dénonce dans les violences nocturnes la main des organisateurs traditionnels du désordre dans de telles circonstances, ceux qui ont intérêt à discréditer le mouvement et à criminaliser les manifestants. Car c’est bien les manifestants qui ont souffert d’un mort, le mardi 9 janvier.
Depuis, l’anniversaire de la chute de Ben Ali a été l’occasion de nouvelles manifestations. Le slogan du mouvement illustre bien son objet. « Qu’est-ce qu’on attend ? » : les manifestants expriment leur impatience à propos des changements sociaux attendus depuis la révolution. Ce n’est donc pas un mouvement de réaction contre-révolutionnaire. Au contraire, il revendique la poursuite de celle-ci en désignant ses finalités sociales comme objectif de la révolution elle-même. Évidemment, la révolution de 2011 a su remporter des victoires depuis la chute de Ben Ali. Au premier rang desquelles la mise en place d’une Assemblée constituante. Puis le fait que celle-ci ait pu aller jusqu’au bout de ses travaux et adopter une nouvelle Constitution. Mais la révolution ne séparait pas les revendications démocratiques de celles pour plus de justice sociale. Or, de ce côté, les gouvernements successifs n’ont rien réglé.
Il est vrai que depuis 2013, le pays est tombé sous la coupe du fond monétaire international sous le prétexte de sa dette trop importante. Comme d’habitude, l’institution, fer de lance du néolibéralisme mondial, demande coupes budgétaires et dérégulation en échange de ses prêts. Cadeaux fiscaux pour les entreprises, augmentation des taxes sur les revenus du travail et la consommation populaire, privatisations : les mêmes recettes appliquées au sud de l’Europe ont été appliquées à la Tunisie avec l’aveuglement coutumier. Bien que ces potions n’aient jamais guéri personne dans le monde, elles ont été appliquées une nouvelle fois sans états d’âme. La dernière loi de finances de l’État a donc été l’élément déclencheur des mouvements sociaux. Elle a entériné une augmentation de la TVA et la création de nouvelles taxes sur des produits de consommation courante. Cela a provoqué la colère dans la population tunisienne. Car depuis l’intervention du FMI, non seulement rien ne s’arrange mais le niveau de vie se dégrade pour tous les secteurs de la société.
S’il n’est pas à l’origine de mouvement, nos proches amis sur place, le Front populaire tunisien s’efforce d’offrir un débouché politique et une sortie de crise par le haut. Ses militants participent activement au mouvement. Le Front soutient l’action populaire et combat sa diabolisation. Il a proposé à l’Assemblée des représentants du peuple une contre-loi de finances qui répond aux revendications populaires. Son porte-parole, Hamma Hammami, relance son appel à des élections législatives anticipées. Le chemin démocratique reste la seule stratégie révolutionnaire sérieuse et le Front populaire y reste fidèlement appliqué. Car le gouvernement est de plus en plus fragile. Sa chute peut entrainer le désordre si elle n’est pas encadrée par une issue pacifique.
Fragile pourquoi ? D’abord en raison de son incapacité à améliorer la condition de la masse des Tunisiens. Il n’a aucune idée nouvelle à mettre en avant sinon une stricte obéissance aux directives du FMI. Cet impératif fracasse les deux partis qui composent la coalition gouvernementale, les libéraux de Nidaa Tounes et les islamistes d’Ennahdha qui se divisent en factions concurrentes, diluant l’autorité et l’énergie pour agir.
De son côté, le Front populaire va à l’essentiel, clairement et franchement. Il réclame la renégociation de la dette tunisienne. Sinon, comment mener quelque politique que ce soit qui réponde aux demandes populaires ? En effet, le paiement de la dette est le premier poste de dépense du budget tunisien. Évidemment, une partie importante de cette dette est odieuse et illégitime puisqu’elle a servi à enrichir le clan Ben Ali lorsqu’il était au pouvoir. Les pays européens ont une grande responsabilité dans les politiques d’austérité injustement infligées aux Tunisiens puisqu’ils refusent d’annuler la dette qu’ils détiennent sur ce pays. Mille et une solutions techniques sont disponibles pour régler ce problème sans provoquer de drames. Mais les Européens, toujours riches en bonnes paroles, sont comme d’habitude férocement attachés à ne rien changer à leurs méthodes pourtant inefficaces et finalement ruineuses quand les États s’effondrent et que les cohues humaines commencent à se mettre sur le chemin de l’exil. Le moratoire sur la dette tunisienne coûtera infiniment moins cher que le prix du chaos auquel poussent les « économistes » européens et les autres larbins du lobby de la dette.
Plusieurs jours de suite, certains médias sensationnalistes ont bien chauffé l’opinion à propos des « zadistes » qui ont largement contribué au sauvetage du site de Notre-Dame-des-Landes contre la création de l’absurde nouvel aéroport nantais. On retrouve l’ambiance médiatique qui avait précédé la violence mortelle dont a été victime à Sivens le jeune Rémi Fraisse. Ici et là, on entend déjà dire qu’il faut s’attendre à des morts. C’est inadmissible. Soyons clairs : l’évacuation du site de Notre-Dame-des-Landes n’a aucun sens parce qu’elle n’a aucune utilité. Si l’aéroport ne se fait pas là, quel est l’intérêt de l’expulsion de gens qui s’y trouvent ? Qui oublie que ce sont des militants ? Certains resteront pour créer des surfaces agricoles ? Où est le problème ? Les autres partiront vers d’autres secteurs en lutte. Pourquoi vouloir les agresser ?
On craint donc deux choses en examinant cette agitation menaçante. La première est que les rumeurs de renoncement à cet aéroport soient un leurre destiné à permettre une attaque contre la ZAD dans le but ensuite de continuer l’aéroport sur un terrain désormais dégagé. L’autre hypothèse est que l’on se paie d’images de violence pour se donner le rôle de l’autorité au moment où le renoncement à construire à cet endroit met en cause les raisons pour lesquelles toutes les autorités depuis quarante ans, contre vents et marées, ont soutenu un projet totalement inutile. Je n’admets pas qu’on reproduise la préparation des esprits comme cela a été fait jusqu’au point de conduire à la mort de Rémi Fraisse. Car sur ce point non plus, il ne faut pas lâcher l’affaire.
Et je ne lâcherai pas l’affaire. J’ai promis comme d’autres que nous ne cesserions pas d’agir tant que toute la lumière ne serait pas faite. Elle n’est pas faite. La justice vient de conclure par un non-lieu le procès à propos de la mort de Rémi Fraisse. Je n’y trouve pas mon compte. Ce que l’on sait depuis la nuit de sa mort et tout ce qu’on ne sait pas, voilà qui a incrusté une ferme volonté de savoir et de punir les responsables si haut qu’ils aient été dans la hiérarchie et si bien cachés qu’ils aient été derrière les gendarmes qui obéissaient à leurs ordres sans savoir ni vouloir ce qui en résulterait.
Dans la nuit du 25 au 26 octobre 2014, Rémi Fraisse, militant écologiste de 21 ans est mort sur le site de Sivens, dans le Tarn. Il s’opposait à la construction d’un barrage à cet endroit, qui aurait été une menace pour l’écosystème de cette zone humide. Il a reçu une grenade offensive tirée dans son dos, provoquant un éclatement de ses poumons et de trois de ses vertèbres. Le 10 janvier 2017, les juges d’instruction en charge du dossier ont prononcé un non-lieu général dans l’affaire judiciaire qui a suivi sa mort.
La famille de Rémi Fraisse avait en effet déposé plainte contre X pour violences volontaires entrainant la mort sans intention de la donner et pour délit d’homicide involontaire. La première qualification concernait le gendarme qui a tiré la grenade offensive. Pour son cas, les deux juges ont considéré qu’il a fait usage de la force et de son arme dans les limites de ce que la réglementation autorisait alors et sans outrepasser les ordres de sa hiérarchie. La hiérarchie, par contre, était visée par l’accusation de « délit d’homicide involontaire ». Celle-ci visait à faire la lumière tout le long de la chaîne de commandement sur les responsabilités ayant abouti à ce drame. Sur ce point, les juges ont également prononcé un non-lieu, considérant que « la chaîne de commandement n’a commis aucune faute caractérisée ». Cette décision était attendue. Depuis le début, personne n’avait été mis en examen. Le procès sur le fond aurait-il lieu ? Non, vient-on de nous dire.
Cependant, cette décision n’a pas fait la lumière sur toutes les zones d’ombre de cette affaire. Notamment concernant les responsabilités de la hiérarchie dans les faits qui ont conduit à ce drame. Plusieurs acteurs pointent la disproportion des ordres donnés cette nuit-là. En effet, les gendarmes avaient reçu pour consigne de défendre un bout de terrain dont l’intérêt n’était pas vital pour le maintien de l’ordre. Le lieutenant-colonel qui dirigeait le dispositif, entendu comme témoin a déclaré : « Je tiens à préciser que le préfet du Tarn, par l’intermédiaire du commandant de groupement, nous avait demandé de faire preuve d’une extrême fermeté vis-à-vis des opposants ». Et en effet, dans la nuit du 25 au 26 octobre, les gendarmes ont fait un usage très important – certains disent disproportionné – de la force. Qu’on en juge : 700 grenades ont été tirées. Et bien qu’il soit établi que certains manifestants aient jeté des projectiles sur les gendarmes, aucun n’a été blessé. Par ailleurs, le préfet du Tarn était absent à partir du 25 octobre à partir de 21h30. Il n’y avait donc aucune autorité civile disponible cette nuit-là pour adapter en fonction de la situation le dispositif décidé auparavant.
Le Défenseur des Droits a publié un rapport sur l’affaire le 25 novembre 2016. Il pointe, contrairement aux juges, la responsabilité de la chaîne de commandement. Il le fait sans ambiguïté. Il constate noir sur blanc « le manque de clarté et les incompréhensions entourant les instructions données aux forces de l’ordre par l’autorité civile, préfet et commandant du groupement de gendarmerie départementale ». Quant à la responsabilité du gouvernement de l’époque, du Premier ministre Manuel Valls et du ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve, elle fut immédiatement récusée à l’époque. Pourtant, elle est dans la logique politique d’un pays démocratique. En effet, ce gouvernement avait fait le choix d’appliquer une politique répressive et violente à l’égard des mouvements sociaux. Et ce malgré les multiples alertes sur la montée de la tension à Sivens dans les jours précédant la mort de Rémi Fraisse. Le choix de la violence décidée d’en haut par ces responsables politiques a pu être constaté à nouveau par les nombreux manifestants du mouvement contre la loi Travail au printemps 2016.
En tous cas, en octobre 2014, Valls et Cazeneuve étaient restés silencieux pendant 3 jours. Ils comprenaient que si l’on établissait la responsabilité de l’intensité des tirs de la gendarmerie on demanderait aussitôt qui les avait ordonnés. Rumeurs et bruits ont couru pendant de longues heures sur l’identité du mort et sur les causes de son décès. Pourtant, à la fin, Valls et Cazeneuve durent admettre l’implication de la gendarmerie dans la mort de Rémi Fraisse. Mais ils n’ont jamais assumé ni reconnu la leur en tant que donneurs d’ordre de répression disproportionnée. À mes yeux, la responsabilité des gendarmes ne peut être opposée à celle des décideurs politiques. Les gendarmes obéissent aux ordres. Il ne saurait en être autrement dans une démocratie où le pouvoir civil est tout.
Tout au long du procès, les demandes d’actes de Maître Claire Dujardin, l’avocate de la famille Fraisse, pour éclairer les zones d’ombre du déroulement de l’affaire ont été refusées. Ainsi, il a été refusé que le tribunal auditionne le préfet du Tarn en poste à l’époque, Thierry Gentilhomme. Elle demandait aussi une reconstitution du drame. Refusée également. La partie civile avait enfin demandé que soient transmises les communications écrites entre la gendarmerie, la préfecture et l’exécutif national pour pouvoir identifier d’éventuelles fautes dans la hiérarchie. Les deux juges d’instruction ont refusé. Dans son communiqué, la famille prend acte du non-lieu mais considère que « donner l’ordre de jeter des grenades offensives sur des manifestants ne peut pas être considéré comme légal et la mort d’un jeune pacifiste parmi ces manifestants, comme un accident. » Elle a fait appel de la décision et a annoncé que si cette procédure n’aboutissait pas plus, elle porterait l’affaire devant la cour européenne des droits de l’Homme pour que « la responsabilité de l’État soit engagée ». C’est exactement ce qu’il faut faire.
Nous avons de bonnes raisons de penser que les tirs décidés étaient disproportionnés. Cela non seulement en raison de l’intensité de ces tirs mais aussi du fait du type de matériel utilisé. Car depuis, le type de grenade offensive qui a tué Rémi Fraisse a été interdite d’utilisation par les forces de l’ordre. Mais d’autres types d’armes le sont toujours. C’est le cas de la grenade de désencerclement, elle aussi dangereuse. Cet été, un militant anti-nucléaire a été gravement blessé à Bure, dans la Meuse, du fait d’une de ces grenades. Lors des manifestations contre la loi El Khomri, plusieurs manifestants avaient également été sévèrement blessées. La mort de Rémi Fraisse, l’absurde violence déchaînée dans la répression des manifestations contre la loi El Khomri devrait inciter le gouvernement à faire évoluer l’ensemble des techniques et des matériels utilisés pour le « maintien de l’ordre ».
59 commentaires
Anne B
Les menaces du 1er ministre ne sont pas de bon augure. Ce ton dictatorial est bien loin de l’humanisme dont a besoin l’humanité dans ce tournant chaotique de civilisation. J’ai toujours la part du GFA Larzac que nous avions achetée au bénéfice des exploitants agricoles contre l’armée qui voulait exproprier – avant que le projet soit annulé. La ZAD devrait devenir zone d’agriculture paysanne par les mêmes moyens. Si une souscription est possible, je suis partante. Ne laissons pas le béton des capitalistes coloniser cet écosystème, quels que soient leurs moyens !
malinvoy
@Ascalon
Même si vous avez raison sur le fond, vous devriez faire preuve d’un peu plus de tact dans vos commentaires, parce que vous froissez les autres, vous freinez leur spontanéité. La fraternité devrait concerner toute notre activité, au moins entre insoumis !
Ascalon
Si le pseudo @machine est « froissé » par une remarque du pseudo @Ascalon, aucun des deux n’ayant d’existence en dehors de ce blog, c’est que c’est une chochotte. Et mon intention est en effet de freiner la « spontanéité », comme vous dite, des no-life qui viennent troller ce blog en racontant n’importe quoi. La fraternité n’est pas de leur faire croire que leurs élucubrations sont des contributions majeures à la cause, mais de les inviter à réfléchir avant d’écrire. Et après avoir réfléchi, de ne pas écrire…
Et puis d’abord, qui vous dit que je suis « Insoumis » ? Je le suis, certes, mais pas au sens où vous l’entendez. Et en particulier, je ne me soumets pas aux préceptes gnangnan d’une gauche ou tout le monde il est beau tout le monde il est gentil et où on ne corrige pas les raconteurs de fadaises pour ne pas les « froisser ».
Je respecte ce blog et son auteur, je prends du plaisir et de l’intérêt à sa lecture, suffisamment pour souffrir de le voir trollé par des ineptes.
educpop
Etant élu moi même, je pense pouvoir dire que les procédures pour vendre ou acquérir des tènements qui appartiennent au domaine public sont très compliquées quand on y met de la bonne volonté. Mais en cas d’obstruction par des décisions votées par un exécutif, il ne faut pas rêver surtout là où l’exécutif s’est senti bafoué. Des projets correspondant aux normes en vigueur pour toutes les prescriptions de la loi peuvent concerner une partie du territoire concerné. Cependant la priorité sera donnée à des acteurs reconnus pour leur adhésion aux programmes validés par la puissance publique et non à des « expérimentateurs » sauf marginalement. Le problème pour les personnes bien intentionnées, c’est souvent de distinguer dans la loi ce qui est procédure incontournable de ce qui est idéologiquement orienté dans un sens ou dans l’autre, alors que tout est étroitement imbriqué.
BIDET
Aux héroïnes et héros de Notre Dames Des Landes…
A Notre Dame Des Landes, ce mercredi 17 janvier 2018, dans la grisaille de l’hiver et une attente fébrile, les jours mornes pesaient plus que d’habitude sur un demi-siècle de luttes, d’occupations et de mobilisations. Un demi-siècle de certitudes, d’études et contre études de formules péremptoires soldé par l’aveu d’une défaite cinglante et lumineuse. On abandonne ! Jusqu’alors nous n’avions rien à commémorer le 17 janvier. On pourra désormais souligner ce jour la volte face du candidat qui s’affirmait le faiseur d’aéroport et la capitulation du Président et de son gouvernement devant le bon sens et la ténacité de la raison populaire et militante. Désormais, nous pourrons dire que ce jour de 2018, des gens, agriculteurs, habitants, militants de l’environnement, idéalistes et faiseurs d’alternatives, zadistes, défenseurs de paysages et d’espaces naturels, de zone de cultures et d’un art de vivre ont gagné. Il nous faut…
Henry J
Il faut arrêter de prendre les zadistes pour le sel de la révolution écologiste et les héroîser. Là où vous voyez « une défaite cinglante et lumineuse », la majorité des contribuables français y voient plutôt un abandon anti-démocratique et un reniement politique grotesque du candidat-président Macron qui va leur coûter bonbon.
S’agissant de l’expulsion éventuelle d’un quarteron de bobos-campeurs dont la plupart des gens se contrefichent, le gouvernement aura beau jeu de jouer la carte du rétablissement de l’ordre républicain puisque les motifs d’un demi-siècle de luttes, d’occupations et de mobilisations sont désormais devenus nuls et non avenus.
macrophobe
Méfiez vous, les gens ! Ce petit malin de Macron peut très bien annoncer l’abandon du projet de NDDL, mais « en même temps », après l’évacuation de la ZAD, imposer ce nouvel aéroport, dont tout le monde dit qu’il est inutile.
Bob maucoudinat
Pourquoi chasser des zadistes qui voudraient s’installer pour faire de l’agribio par exemple ? Sinon pour faire plaisir à Le Pen qui aurait voulu que le gouvernement chasse d’abord les zadistes avec l’armée avant de rendre public sa décision de renoncer à ce projet fou et obsolète. C’est possible dans la loi. On donne bien des concessions sur les cabanes à huîtres du bassin d’Arcachon aux grosses légumes de l’oligarchie copains de Sarkozy. Alors pourquoi pas aux zadistes ? Qu’est ce qui va pas ? Y sentent le gaz ?
patrice 30
D’accord avec vous. Il va y avoir pas mal de terre agricole redistribuée puisque l’aéroport ne se fait plus. En France le prix de la terre agricole est bas. Je suis optimiste pour la suite et pense que c’est une occasion à saisir pour certains. Les compétences et les avis des experts juristes de la FI pourraient servir de conseil et de relais à beaucoup d’occupants de la ZAD et leur permettre une installation légale et pérenne. Par contre nous avons très peu d’amis parmi les politiques, les discours sur la loi et l’ordre merci on a donné. Pas d’incidents sur la ZAD fermeraient le bec à cette bande de réactionnaires qui ont la faveur des médias.
PIETRON
Pour la Tunisie, les faits démontrent que la révolution arabe n’était pas une révolution. Si l’accession au pouvoir d’un parti religieux islamiste, fut-il modéré, est révolutionnaire, alors le mot révolution n’a plus de sens. Une révolte qui exigeait la destitution d’un despote. Ce qui fut fait et c’est une bonne chose. Une révolution implique une inversion économique, sociale et politique. Il ne faut pas être grand analyste de la chose politique pour s’apercevoir, dès l’arrivée du nouveau pouvoir, que celui-ci plierait sous les injonctions capitalistes. Heureusement, c’est toujours le populo victime qui réagit dans ces cas là. Sauf qu’il peut être trompé s’il n’y prend garde. Une révolte de la faim est un début, mais loin d’être une fin révolutionnaire.
Rémi Fraisse a été victime d’un crime d’état via ce stupide gendarme qui balance la camelote de mort aveuglément. Les ramifications justice-état sont une réalité. Il faut tout faire pour…
Henry J
Oui, si le mot révolution avait encore un sens, on ne se serait pas précipité pour qualifier ainsi le printemps arabe en Tunisie. Les plus avertis savaient qu’il s’agissait d’une révolte nécessaire pour chasser Ben Ali et sa clique, mais certainement pas d’une révolution dont la finalité est économique, sociale et idéologique autant que politique. Les faits sont têtus en Tunisie comme ailleurs. On parlera de révolution quand la société changera de base et l’économie de logique capitaliste.
Michel CABURET
Puisqu’on est en guerre cotre le changement climatique, l’abandon de NDDL se justifie, bien que Macron ne l’a pas du tout fait pour ça. Les véhicules à moteur ça va bientôt devenir le temps d’avant. Et le plus tôt sera le mieux pour la planète. Si il n’y a pas d’autres solutions écologiques de transport, il faudra bien se résoudre à en limiter l’utilisation. Combien de milliards de voitures et de camions en circulation à chaque seconde sur la planète, combien de milliers ou millions (?) d’avions dans le ciel chaque seconde. En plus il y a un problème de place qui se posera tôt ou tard. Alors l’abandon de NDDL pour quelque raison que ce soit est une bonne chose. Continuons.
M-J A.
Est-il exact que le projet de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes avait été relancé en octobre 2000 par le gouvernement dirigé depuis 1997 par Lionel Jospin (dont Dominique Voynet était la Ministre de l’Environnement) avec la concession attribuée pour 55 ans à la multinationale Vinci ? Si ma mémoire est bonne vous étiez membre de ce gouvernement en charge de la formation professionnelle. Je vous prie de ne voir dans mon propos que le souci d’informer complètement sur ce dossier les plus jeunes d’entre nous.
Herner
Non c’est faux. Pour plus d’info, il y a eu une émission assez bien informée à ce propos sur France Culture il y a quelque temps. En plus, comme il est rappelé, cela n’était pas dans le champ de responsabilité de Jean-Luc Mélenchon. Il ne faut voir dans cette réponse que le souci d’informer « les plus jeunes d’entre vous ».
jorie
Les media utilisent un langage très guerrier contre les zadistes, poussant ainsi, par voie médiatique, l’exécutif à devoir « prouver son autorité », ou dégager les « illégaux » vite transformés en « terroristes » ou en expropriateurs. Cette soif de sang sur canapé médiatique est répugnante et doit être dénoncée. NDDL est un exemple de résistance contre les grands projets inutiles. La France a perdu 30% de ses terres agricoles au profit d’une bétonisation générale (parcs d’attraction, hypermarchés en faillite) ou de fonds d’investissement chinois. L’autonomie alimentaire du pays est d’intérêt général et il faut saluer les résistants à cette spoliation généralisée. Pour NDDL, la question des zadistes pourrait se régler pacifiquement. Les paysans expropriés pourraient récupérer leurs terres quitte à rembourser l’état de ce qu’ils ont touché comme dédommagement. Le reste de la terre appartient à l’état qui peut négocier des cessions avec les gens…
educpop
Un exécutif c’est un bureau composé d’élus, au premier rang un(e) président(e) qui a fait l’objet d’un consensus politicien, au deuxième des vice présidents dont les mandats ont fait l’objet de tractations souvent féroces avant leur élection et qui, aussi sont des maires, ceux-ci sont en charge de thématiques qui ne correspondent pas toujours à leurs compétences personnelles. Au troisième rang un conseil des maires dont le pouvoir a été affaibli par la réforme territoriale, mais qui ont quand même presque toutes les cartes en main localement. L’autorité de cet exécutif ne peut être remis en question par les services de toutes nature, entre les mains de qui passent toutes les procédures. La victoire des zadistes est extraordinaire dans ce contexte mais ne change pas la complexité du problème à l’avenir, tout va se réduire à des questions d’argent, c’est le point de départ d’une lutte entre les pots de terre ou de fer.
HYBRIS
Sur NDDL, le pouvoir effectue un recul tactique mûrement pesé. Rien sur le fond. Macron s’évertue de façon récurrente à consolider sa base sociale étriquée du 1er tour de la présidentielle, les classes moyennes-supérieures aisées, bien insérées socialement. Sous le sceau de l’enrichissement des riches, les beaux quartiers trouvent le jeune homme convenable. Selon les sondages, la vieille droite friquée pourrait bien l’adouber. C’est le moins qu’elle pourrait faire. Une fraction de la droite populaire aussi, quelques friandises lui ont été distribuées (fin du RSI, chômage ouvert aux indépendants, tour de vis sur l’immigration, contrôle accru des « feignants »). Les partielles vont nous éclairer sur ce point. Elles le feront aussi un peu, à travers l’évolution des scores de FI, sur les potentialités de mobilisation sociale. Des comparaisons à pondérer car en l’absence de campagne nationale, il est plus difficile de contrebalancer le discours idéologique des grands médias.
Daniel BESSON
Juste une question. Pourquoi est-on systématiquement modéré lorsque l’on écrit que NDDL n’est pas une zone naturelle, alors qu’il s’agit à l’origine de landes (du sable et des buissons) mises en valeur avec, par exemple, de la chaux par les grands capitalistes laitiers de la bourgeoisie Nantaise. Pourquoi ne montre t’on pas les photos des parcelles piétinées par les zadistes ? NDDL n’a rien à voir avec le Larzac pour les nostalgiques. C’est un biotope aussi artificiel qu’un polder, une création humaine, comme un aéroport, qui s’est construite sur la destruction d’un espace naturel.
Invisible
Nombreuses vidéos sur le net : France3 Pays de Loire, mais aussi un C dans l’air de 2016, un doc de Radio Sputnik (mais oui). Et surtout consulter le journal numérique Reporterre. Tout cela vous permettra de voir que @Daniel Besson se trompe, ou nous fait une intox délibérée. Toute manière, un zadiste chaussé de ses bottes ne fera pas de dégâts irrémédiables, surtout en hiver, comparé à l’asphalte d’une piste d’aéroport, de ses parkings et de ses galeries marchandes. […]
Théo Duchon
Les gendarmes à Sivens, la nuit fatidique, étaient protégés par des douves de 2 mètres de profondeur et 2 de large et ce derrière des grillages de la même hauteur au moins. L’usage des F1, qui avait déjà tué Michalon en 77 et mutilé d’autres militants, n’était pas nécessaire. Quand aux grenades de désencerclements, si vous allez manifester, vous constaterez qu’elles ne sont jamais utilisées en derniers ressorts et au sol pour se désencercler, mais pour attaquer les gens dans les nasses, ou dans une caravane à Sivens. Il est étonnant qu’il n’y ait pas eu plus de mort ces dernières années. Enfin examiner objectivement de quel côté se trouve la présomption d’innocence et de quel côté celui de la culpabilité. Ça remonte à loin, taper « Sébastien Migliore » par curiosité pour constater l’honnêteté ou pas des GM et de la justice. […]
Chan
Objectivité des médias pour lesquels on paie la redevance : ce matin avant d’interroger Éric Coquerel, la journaliste de France Culture présente les critiques sur le traité de l’Élysée allant de l’extrême droite à « l’extrême gauche » France Insoumise.
Bravo pour les voeux à Marseille !
Invisible
Trop drôle l’interview sur le balcon à Marseille ! Pujadas va avoir attrapé une rhinite. Les deux croque-morts avaient le soleil dans les yeux. C’est comme ça qu’il faut faire. Vieille technique de ploucs montagnards. Bravo. Ils avaient beau être à deux contre vous, du moins bataillaient-ils avec l’éblouissement de l’astre solaire.
trebor
Encore un discours creux et cérémonie creuse de Macron, il va encenser et séduire les investisseurs étrangers (Toyota) pour construire une usine en France, pour prouver que l’on peut produire pour pas cher en France, mais où iront les bénéfices sur les ventes ? Pourquoi ne fait-il pas pareil auprès de PSA qui licencie ? Avec PSA, les bénéfices resteraient en France.