Rentré de Marseille, la tête encore dans le guidon, j’ai écrit un petit texte sur le sens de l’évènement du 26 mai et quelques lignes sur le traitement médiatique qui en a été fait. Le lendemain j’en restais content et je décidais de l’éditer en tête de ce post. À vrai dire le lendemain, un dimanche, en tant que « député parasite qui ne fait rien » comme dit la Team Macron, j’ai rejoint mes camarades sur les bancs de l’Assemblée nationale pour la loi sur l’agriculture.
J’y passais une partie de la journée et annulais pour cela mes rendez-vous familiaux. Troisième semaine sans pause. Je ne suis pas le seul dans ce cas. François Ruffin, Mathilde Panot et Loïc Prud’homme ont tenu toute la semaine sur ce texte, épaulés par roulement par le reste du groupe. Je ne regrette pas l’occasion qui m’a été donnée dimanche de faire ce discours à l’article 13 de la loi sur la souffrance animale et notre devoir d’humanité. Une fois de plus les discussions philosophiques sur le sujet avec Benoît Schneckenburger, docteur en philosophie et chef du service d’ordre national de la LFI, auront été des moments forts de préparation pour moi. Puis le soir venu, après 21 heures 30, ce fut le débat pour défendre nos amendements contre le broyage des poussins mâles vivants (rejeté par la majorité de députés « la République en marche ») et l’interdiction des cages de taille feuille A4 pour les lapins (idem) ou les limites au transport des animaux vivants (idem). Bastien Lachaud et moi avons quitté l’hémicycle à 23 heures laissant seul tenir la tranchée Loïc Prud’homme.
La semaine commencera pour moi à Strasbourg pour la réunion anniversaire du « NON » au Traité constitutionnel européen en 2005. Mercredi, retour à Paris, jeudi départ pour Marseille. J’écrirai donc au fil des jours et on ajoutera les chapitres au fur et à mesure sous cette introduction. Je ne peux mieux faire. Mes lecteurs sont souvent mes amis. 60 000 lecteurs uniques passent ici chaque semaine pour découvrir mon post hebdo. Et ils savent que ce contact, ce blog, pour moi, est un lieu privilégié pour penser à haute lettre.
Le bilan de la marée populaire du 26 mai est fécond. Dans près de 200 villes, des cortèges de toutes sortes se sont constitués. Dans de nombreux cas, ils ont surpris par leur nombre et leur détermination, comme dans l’Est du pays. Ces succès renforcent la détermination et relancent les dynamiques de l’engagement militant. De plus, ils sont souvent venus après des réunions de préparation unitaires entre partis, associations et syndicats. Elles feront école. Car c’est une première depuis des décennies dans bien des coins du pays. Au total, le mouvement politico-social que génère la lutte des cheminots s’est enraciné. Il a élargi et enrichi son expression. Le goût de ce type de rassemblement politico-social s’est découvert, il ne se perdra pas de sitôt. Nous allons y travailler partout. Dès les prochains jours, de nouvelles initiatives se préparent. On attend en particulier la suite de l’appel à journée de grève interprofessionnelle unitaire lancé par FO. Un nouveau paysage est de toute façon en cours de construction.
Notre conviction à « La France insoumise » est qu’il n’existe pas de chemin plus efficace pour passer de l’étiage électoral actuel à un niveau majoritaire. Il n’existe pas d’autre parcours jouable que la construction patiente de cette nouvelle majorité populaire par la formation d’une nouvelle conscience collective. Ce travail a un objectif. J’ai parlé de Front Populaire. Je l’ai dit à Libération : « Je n’ai pas l’illusion de croire que des syndicats vont participer à je ne sais quel programme commun politique. D’ailleurs, je ne le souhaite pas car je suis en faveur de l’indépendance des syndicats vis-à-vis de tout gouvernement. » Et j’ai précisé la stratégie : « Vouloir un front populaire c’est une autre manière de parler de l’unité du peuple. C’est un projet, une pratique et une stratégie. »
C’est là une mise en mots que je crois suffisante à l’étape que nous sommes en train de franchir. J’ai lu des gloses sur l’indépendance syndicale que ce projet pourrait bousculer. Comme si cette indépendance n’avait pas pris les formes les plus diverses selon les époques et les contextes ! Comme si elle était figée dans une formule définitive qui se serait appliquée de tous temps ! Comment oublier l’époque où la CFDT avait pour objectif et doctrine le « socialisme autogestionnaire ». Et celle où la CGT soutenait le Programme Commun de Gouvernement PS/PCF. Rien n’interdit donc que l’Histoire concrète invente des formes nouvelles, des accointances différentes de celle de la période récente qui a été tout de même celle d’une série d’échecs terribles et de reculs sur les droits sociaux. Je ne sais pas à cette heure ce que la nécessité peut faire surgir dans l’Histoire. Travaillons le terrain et les consciences. Agissons sans pause ni trêve. Le reste nous sera donné bientôt par surcroît.
Le traitement médiatique du 26 mai a été une utile contribution aux progrès de la conscience de ceux qui se sont mobilisés ce jour-là. Car, mieux que d’habitude, ce fut une honte sur le plan intellectuel. Les « journalistes » comparaient sans vergogne le chiffre des seuls manifestants parisiens à ceux de la marche nationale du 5 mai. Comme si les près de deux cent autres manifestations n’existaient pas. Évidemment, les chiffres pris pour argent comptant sont ceux de l’agence macroniste de comptage désormais bien connue. Laquelle n’a pas hésité à rectifier en cours de route son pointage parisien sans que cela n’émeuve les robots en plateau qui psalmodiaient le mot convenu : « échec ». Des milliers de gens qui croyaient avoir été nombreux dans la rue et joyeux dans la marche ont appris ou bien qu’ils n’existaient pas ou bien qu’ils avaient passé leur temps à se disputer entre organisations.
J’ai déjà connu des séquences honteuses comme celle-ci. À vrai dire, le scénario est toujours le même. D’abord une lourde attaque personnelle (cette fois-ci une histoire cornecul vieille de cinq ans avec un journaliste du Monde. Puis l’invention et la mise en scène d’affrontements personnels (d’abord Ruffin versus Mélenchon puis Martinez versus Mélenchon). Enfin le dénigrement de l’évènement lui-même (bagarre, casses surévaluées, nombre de manifestants sous-évalué).
L’essentiel pour le parti médiatique est d’avoir de quoi effacer le sujet du jour. Une petite phrase, un évènement de diversion, une dispute. La matière manquait cette fois-ci. BFM aura donc battu tous ses records, filmant des moments de vide de la marche, excitant les porte-paroles les uns contre les autres. C’est presque trop lourd pour être vraiment crédible, souvent, mais ce n’est pas sans efficacité admettons-le. Ce que nous en faisons du point de vue de la réputation de tels procédés ne l’est pas non plus. De tels excès servent notre discours sur les médias et ceux qui les font vivre, il faut le reconnaître. En ce sens, des gens comme Nathalie Saint-Cricq, à France 2, par exemple, par leurs outrances et grossières manipulations sont aussi de bons recruteurs de consciences écœurées par ce système.
Car dans ce contexte médiatique, des dizaines de milliers de gens honnêtes découvrent alors quel genre de manipulateurs sont ceux à qui ils accordaient leur confiance. Sur le moment, cette désinformation rend malade de rage bien du monde. C’est-à-dire tous ceux qui ont la naïveté de croire que les médias sont autre chose que ce qu’ils sont. Certes, les nervis de l’information de propagande parviennent par ce genre de procédé à abasourdir et à confirmer dans leur passivité les cerveaux déjà les plus résignés. Ils peuvent aussi parvenir à décourager aussi ceux qui attendent une reconnaissance de leur action et de leur mobilisation. On ne peut pas sous-estimer cela. Ils ne sont pas si largement payés pour rien.
Mais d’un autre côté, la rage qu’ils mettent au cœur de ceux qui prennent conscience de la duperie est un vaccin de longue portée contre la confiance dans la parole médiatique. Dans la durée, nous sommes donc gagnants. Les consciences désormais éduquées au mépris des médias et des autorités qui les dirigent sont alors plus fermement ancrées dans la compréhension du caractère global de ce que nous affrontons. Eux ont compris : Macron n’existe et ne tient que grâce à l’appareil médiatique qui le porte en bourrant les crânes.
Au soir de cette journée du 26 mai, épuisé mais dynamisé, je pense à toutes ces personnes qui ont donné une fois de plus tant d’eux-mêmes pour cette réussite. Je pense à ces milliers de gens de tous âges qui sont entrés dans nos rangs pour la première fois. Je sais que nous avons pris honnêtement notre part du travail qui revient à chacune des générations de personnes qui ne se laissent pas faire dans la vie face au pouvoir de leur temps. Macron peut croire ce que dit la télé et ceux qui le servent. Mais la vie et sa vérité sont déjà ailleurs. Là où régnait la sidération il y a peine un an au point qu’il fit passer la réforme du code du travail, règne désormais la rage et le dégoût. Et une claire conscience de ce qui est en cause : non tel ou tel mauvais coup, mais un système. Le dégagisme est la vraie marée populaire de ce moment.
La catastrophe est consommée en Italie. Un des pays fondateurs de l’Union européenne a reçu la foudre de la Commission européenne et de son maître berlinois. L’Union européenne a montré où était sa main de fer. Plutôt que de laisser nommer un ministre des Finances qui ne convenait pas à Berlin, le président de la République italienne a joué la terre brulée. Naturellement, comme face à le Grèce, les médias allemands et les responsables politiques de l’équipe Merkel se sont déchaînés. Libération a cité les déclarations spécialement outrageantes de Der Spiegel, le grand hebdomadaire de l’Allemagne officielle. Injures et déclarations insultantes pour les Italiens se sont multipliées Outre-Rhin. C’est une coutume de ce pays où le mépris pour l’Europe du sud est considéré comme honorable.
J’ai raconté dans mon livre Le hareng de Bismarck à quel point cette violence de la droite allemande fonctionnait sans retenue ni limite quand il s’agit des pays qu’ils nomment « le club Med ». Je sais que cette thèse indispose les joueurs de mandoline qui accompagnent de leur sirop émollient la légende du « couple franco-allemand ». Ceux-là retiennent à cette heure leurs couplets béats tant la grossièreté mainstream allemande les intimide. Les responsables français, tétanisés comme des lapins devant des phares, laissent se dérouler sans réplique les diarrhées verbales allemandes. Macron se tait. Macron se terre.
Mais on verra bien vite comment les bien-pensants reprendront bientôt le pilonnage de quiconque se risque à faire une critique de l’Allemagne. Tous ceux qui s’y sont risqués dans le passé l’ont payé de ce prix : Montebourg, Bartolone et combien d’autres à la moindre velléité ! Il en sera de même cette fois-ci. Toute la presse eurobéate va faire bloc pour critiquer les « populistes italiens », fermer les yeux sur les violences allemandes, encourager le parti du pire, c’est-à-dire celui de la normalisation de l’Italie aux diktats des Schaüble, Merkel et autres dominants allemands qu’on ne nommera bien sûr jamais de cette façon. Comme pour la Grèce et l’Espagne en leur temps.
En attendant, le lamentable président italien remplit son rôle avec cette bonne conscience rustique de tous les syndics de faillite. Il nomme un gestionnaire issu du FMI surnommé « Monsieur Ciseaux » dans cette institution. Tout est dit avec ce surnom. Quel argument ce président a-t-il pour procéder à un tel viol de la volonté populaire exprimée par le vote des Italiens ? « Le chef de l’État partageait les craintes d’une large partie de l’Europe face à un personnage affichant des convictions anti-allemandes », explique en manchette de sa une Le Figaro. En page intérieure, l’hebdomadaire détaille le « programme de rupture » qui a tout fait échouer. Et voilà ! Les Italiens ont choisi un programme inacceptable par les Berlinois.
Mais en cas de retour aux urnes, tous les observateurs concluent que ce sera un raz-de-marée pour les deux partis rebaptisés « antisystème ». C’est-à-dire une situation pire que celle que déplorent « la plupart des observateurs européens » cités par Le Figaro. Le président italien a invoqué, comme argument ultime, le risque que représente l’accroissement de l’écart entre le taux d’emprunt allemand et celui de l’Italie. On ne saurait mieux désigner la laisse qui tient tous les pays par la gorge. Comme au bon vieux temps du « serpent monétaire européen » où la valeur de la monnaie de chaque pays de l’Union européenne se fixait par rapport à celle des autres et donc de la plus forte. La monnaie unique montre en toute clarté à cet instant ce qu’elle est. Elle ne protège aucun pays. Elle les aligne tous sur la politique économique de l’Allemagne.
C’est de cette façon que notre pays a déjà été rincé dans les années 90. Après l’annexion de l’Allemagne de l’Est, sans aucune tendresse pour son partenaire dans le « couple franco-allemand », Berlin décida qu’un mark de l’est valait un mark de l’ouest. Pour le faire, sans en avoir discuté avec personne, le gouvernement de Kohl haussa ses taux d’intérêt au plus haut pour attirer les capitaux, financer cette folie et empêcher l’inflation. Seul Oskar Lafontaine s’y opposa, connaissant les conséquences sur les autres Européens de cette décision. En effet, la France dut s’aligner sans raison liée à son économie réelle. Elle fut contrainte de hausser ses taux pour éviter la fuite des capitaux et paya horriblement plus cher son argent courant. Il en coûta plus d’une centaine de milliards à l’économie française selon les analystes. Rien de neuf ! Mais alors à quoi sert l’Euro dans ce cas ? Juste à maintenir la « discipline » budgétaire ? Celle qui permet un euro fort et des salaires bas comme le demandent les retraités et capitalistes allemands qui ont besoin d’une monnaie forte pour augmenter leur pouvoir d’achat à l’import et se garantir des dividendes copieux pour payer leurs retraites par capitalisation ? Oui. Bien sûr.
La crise institutionnelle en Italie, la façon de la gérer du président italien, loin d’éloigner la fracture européenne de ce pays l’en rapproche. La seule et unique responsabilité de la situation vient des diktats de Bruxelles et de la brutalité des gouvernants allemands. Berlin peine à trouver des marionnettes convaincantes en Italie pour garantir sa domination. Pour l’heure, les vainqueurs de l’élection n’ont pas encore fait leur capitulation à la Tsípras. Je forme le vœu que l’alternative populaire en Italie soit tranchante et n’apparaisse d’aucune façon comme un renfort des « eurobéats » ni comme des hésitants ou des supplétifs de la bonne société italienne horrifiée par l’audace populaire en quête de souveraineté.
Après avoir ressorti une affaire vieille de 6 ans entre un journaliste du Monde et moi, le journal L’Express récidive ce soir dans le filon de la mise en scène de « révélations judiciaires » à mon sujet. Ce journal est spécialisé dans les coups tordus à mon égard. Un de ses journalistes n’a pas hésité à mentionner mes adresses privées récentes sur son compte Twitter. Mais au moins cette fois-ci m’apprend-il quelque chose. Je découvre en effet qu’une enquête préliminaire est ouverte par le parquet de Paris sur mon compte de campagne présidentiel. Il s’agirait d’une « vérification ». Des journalistes scrupuleux en charge de cette histoire ne précisent pas que cela ne signifie en rien que la justice ait le moindre soupçon quant à la légalité de mes comptes. Il s’agit justement pour le parquet de vérifier le bien-fondé ou non d’allégations. Les autres vont en profiter pour essayer une nouvelle fois de me flétrir dans l’estime des gens. Un buzz est créé. Il sera répété à l’envie et sans précaution partout, pour jeter le doute. Ainsi va « l’information » en France.
Quelle situation incroyable ! La Commission des comptes de campagne aurait « signalé » mes comptes au parquet. Pourquoi, sur quel motif ? Je n’en sais rien. Cette même commission qui, le 13 février dernier, les a validés et a déclaré qu’ils ne comportaient aucune irrégularité. Pourquoi fait-elle ce signalement le 18 mars, plus d’un mois plus tard ? Pourquoi ne m’en dit-elle rien ? Ce serait en raison de « la publicité autour de la démission du rapporteur de Chalvron » nous apprend L’Express. Sous la pression médiatique, donc. Curieuse Commission que celle-là !
Pourquoi n’a-t-elle pas demandé elle-même davantage de vérifications alors que c’était sa mission et qu’elle a posé à mon mandataire financier plus de deux mille questions orales ou écrites sur ce compte ? Pourquoi l’a-t-elle fait alors qu’elle a au contraire fait un communiqué pour défendre les rabais dont a bénéficié le candidat Macron ? Un communiqué pour lui, un signalement judiciaire pour moi !
Mais alors pourquoi moi ? Si elle avait des soupçons sur la légalité de mes comptes, pourquoi ne pas l’avoir signalé elle-même à la justice, comme elle l’avait fait par exemple concernant 4 dons irréguliers recensés dans les comptes d’Emmanuel Macron ? Et, d’un autre côté, pourquoi n’a-t-elle pas exprimé sa propre conviction comme elle l’a fait pour justifier les rabais dont a bénéficié le candidat Macron ?
Pourquoi ce genre d’histoire apparait-il soudainement ? Je demande à mes amis qui croient à une diversion avant que des problèmes plus sérieux et autrement réels ne se confirment ou n’apparaissent dans les comptes de mes concurrents, d’être patients.
Car pour le reste je suis fort de la sincérité de mon compte de campagne.
Je garantis que je n’ai jamais bénéficié d’aucun rabais à cent pour cent sur une prestation. Je garantis que je n’ai jamais bénéficié de l’aide d’aucune collectivité locale. Je garantis que je n’ai jamais organisé de collecte de financement auprès de dirigeants d’entreprises. Je garantis que je n’ai jamais surpayé aucun collaborateur de ma campagne. Je garantis que les prêts par la banque qui m’ont été consentis sont exempts de toute suspicion. Je garantis que je n’ai voyagé en jet dans aucun pays étranger. Je garantis que je suis favorable à toute vérification sur mon compte comme sur celui des autres candidats.
Je ne suis pas dupe de l’intention de nuire à mon honorabilité qui est contenue dans la façon dont cette information surgit. Voici mon dernier mot sur le sujet : je déclare que n’ai jamais agi autrement qu’honnêtement et scrupuleusement dans la conduite financière de ma campagne. Et je ne tendrai pas la joue gauche.
Seul ou presque dans l’hémicycle, Younous Omarjee, notre unique député européen (le PCF refusant de nous rendre comme convenu le mien depuis mon départ à l’Assemblée nationale), utilise son temps d’explication de vote pour avoir la parole sur le budget de l’Union européenne. Il nous apprend une nouvelle très révélatrice de l’abaissement du respect dû aux Français dans cette institution. Toujours montrée du doigt, mise en cause pour déficit excessif, la France est pourtant considérée et traitée comme une vache à lait incapable de se défendre à l’heure de la traite. Alors quand il faut passer à la caisse en payant leur contribution, les Français font en effet des découvertes embarrassantes. Younous Omarjee est le seul qui ose confirmer l’abus dont sont victimes les Français dans l’Union Européenne. Ce que j’ai déjà dénoncé à la tribune de l’Assemblée nationale est confirmé.
« La France continuera a payer le rabais britannique jusqu’à 2025 . Et les rabais sur le rabais des autres pays dont l’Allemagne. Incroyable! Et injuste! » #EPlenary @FranceInsoumise @JLMelenchon @ALeaument #CFP #MFF @GUENGL pic.twitter.com/BnL4kdbCOR
— younous omarjee (@younousomarjee) 29 mai 2018
Les Français savent déjà qu’ils donnent 7 milliards de plus à l’Europe qu’ils ne reçoivent d’elle. Nous sommes donc « contributeur net ». Et pas qu’un peu ! Pourtant le pays ne roule pas sur l’or. Il manque de tant d’équipements publics ! Mais son argent sert à équiper d’autres contrées. Un luxe somptuaire par les temps qui courent. Mais ce n’est pas tout. Il y a l’affaire du « rabais anglais ». Une histoire désolante.
Il y a de cela quelques années, sous Thatcher, l’Angleterre a obtenu un rabais sur la cotisation qu’elle devait à l’Europe comme tous les pays membres. Thatcher se disait pauvre. Elle n’avait pas honte de le dire. Et pas honte de tendre sa sébile. On lui céda. Ce qu’elle devait payer le fut donc par les autres. Les Français firent les braves. Mais plusieurs autres pays ne l’entendaient pas de cette oreille. Et parmi eux, les riches Allemands. Ils demandèrent un rabais sur leur contribution au paiement du rabais anglais. Ça s’appelle « le rabais sur le rabais ». Vu ? Ils l’obtinrent. Et les Français, encore une fois ont accepté de payer à la place des autres ! « Braves Français » ont du rire les Allemands.
À présent, les Anglais sont partis. Le budget doit se passer de leur contribution avec ou sans rabais. Mais la contribution des Français reste au même niveau jusqu’en 2025. Autrement dit, nous allons encore payer la part qui revenait aux Anglais (le rabais) et aux Allemands (le rabais sur le rabais). Au seul bénéfice de ceux qui ne paient pas ce qu’ils devraient. C’est l’arnaque allemande. Et comme si ça ne suffisait pas, l’imprudent Macron a continué dans la tradition du panache gratuit mais coûteux. Il a annoncé que la France serait prête à payer davantage pour contribuer à l’Europe qui blablabla. Pourquoi cette générosité ? D’autant que l’Union européenne va nous rendre moins dorénavant qu’auparavant. Oui : nous allons donner plus et recevoir moins. Pourquoi ?
Parce que la Politique agricole commune va reverser moins aux agriculteurs français ! Ils ont trop et trop bien réparti sans doute. Mais ce n’est pas tout. Les régions de France reçoivent des subventions payées par l’Europe avec l’argent de la cotisation des États membres bien sûr. L’argent des Français leur revient de cette façon aussi. Il y a trois catégories dans le classement des régions par leur richesse. Ce classement fixe le montant de l’aide européenne. Peu pour les riches, davantage pour les pauvres, moyennement pour la tranche du milieu dite « en transition ». Et l’enveloppe globale que recevra la France pour l’ensemble de ses régions est annoncé avec plus de 5% de baisse, soit 1 milliard d’euros de moins alors que la France a annoncé la hausse de sa contribution au budget européen. Bref l’Europe qui ne nous protège pas mais nous étrangle s’organise à présent pour nous détrousser. Avec le sourire ? Même pas. Les faces de pierre du gouvernement allemand ne sourient pas.
Je me suis déclaré de longue main pour une coopération privilégiée avec la Chine. Cela fut fait dès mon premier livre écrit comme un manifeste politique en 2010 : Qu’ils s’en aillent tous !. Cela fut reçu comme une révélation d’une facette noire de mon personnage réputé dès lors insensible aux souffrances du Dalaï Lama et même des Ouïghours. Un journaliste dont j’ai oublié le nom sur une chaîne dont j’ai oublié le nom aussi m’interpella : « vos amis chinois… ». À la remorque de Robert Ménard et des héros de « Reporter sans frontières », après qu’aient été agressé les athlètes chinois de passage à Paris avec la flamme olympique, les responsables français défilaient pour se faire remettre des écharpes blanches par le saint homme tibétain. Nul ne se souciait des conséquences sur les autorités chinoises de cette sympathie pour un homme qui réclamait à l’époque le quart du territoire de la Chine et la mise à l’écart des cent millions de personnes qui se trouvent sur le territoire du « Tibet historique ».
Pendant ce temps, foin d’écharpe et de simagrées en Allemagne. Les responsables allaient et venaient entre Berlin et Pékin, nouaient des accords, se passaient des commandes mutuelles. Dans les crises commerciales, Allemands et Chinois se sont épaulés. Et pour cela, les Allemands ont agi dans le dos et sur le dos des autres pays d’Europe, comme dans l’affaire des panneaux solaires. Au fil du temps, l’Allemagne a réussi à faire pour elle ce que je souhaitais pour nous. Un partenariat privilégié avec la Chine, c’est-à-dire avec un immense marché en plein dynamisme.
Et maintenant voici l’heure des comptes. « Pour la seconde année consécutive, la République populaire de Chine est le premier partenaire économique » de l’Allemagne note l’INSEE allemand. Pourtant, de 1975 à 2014, c’est la France qui occupait cette position par rapport à l’Allemagne. Jusqu’en 2016 elle était seconde.
La fin du « couple franco-allemand » est dans ce nouvel ordre des choses. La dépendance mutuelle d’hier n’existe plus. Les Allemands ont pris le large grâce à la politique du libre-échange, au dumping social dont ils ont profité sur le dos des pays de l’Est et à l’infinie naïveté des Français. Lesquels sont devenus pourtant le deuxième marché d’exportation des Allemands. Sur les 169 milliards d’euros d’échanges entre les deux pays, 105 milliards sont des exportations allemandes en France ! Les deux tiers du commerce mutuel est donc en leur faveur. Et ce déficit représente la moitié de tout le déficit extérieur de notre pays. Si l’on ôte de ce compte la part du pétrole et du gaz, on peut dire que l’économie allemande écrase celle de la France de tout son poids.
Mais la France n’est pas seule en cause dans cette nouvelle situation de domination allemande. Le cas chinois est emblématique. D’une façon générale, l’Allemagne décroche de l’Europe. Depuis le lancement de l’euro la part des produits de la zone euro dans les achats de l’Allemagne est tombé à 36%. Dix points de moins depuis le lancement de la monnaie unique ! Et dans le même temps, les achats allemands en Europe ont baissé d’autant depuis l’euro. Cette situation rend l’Allemagne de plus en plus autonome vis-à-vis de l’activité économique de l’Union et des pays qui la composent. De plus en plus indépendante.
Ce n’est ni un hasard de situation ni un imprévu de l’action allemande. L’Allemagne a accumulé des excédents commerciaux énormes, sur le dos de ses partenaires européens. Ils n’ont jamais été sanctionnés comme le prévoient pourtant les traités européens. Mais ces excédents qui étaient essentiellement placés dans les pays européens jusqu’à la fin de l’année 2009 sont dorénavant placés en dehors d’Europe. Pourquoi ? Manque-t-on de besoins ou de placements à faire sur le vieux continent ? Non, bien sûr. A Berlin, un projet non européen est à l’œuvre. L’Allemagne accumule de la puissance en étranglant une économie européenne dont elle dépend de moins en moins.
Les stratèges à l’action sont-ils ceux qui déjà plaidaient pour une sortie de l’euro des allemands ou bien pour un euro du nord et un autre du sud ? Sait-on que ce débat a eu lieu en partie publiquement du temps où monsieur Schaüble était le ministre de l’Économie Outre-Rhin ? Car une fois l’Europe de l’Est bien en main comme c’est le cas aujourd’hui avec des pays entiers où il ne reste plus une usine qui ne soit pas allemande, à quoi bon le reste ? Une zone du mark fort n’est-elle pas plus avantageuse que la prise de risques de banqueroute avec l’un des pays du sud ?
Ma conviction est faite. Pour moi, le principal problème de l’Europe est la politique du gouvernement allemand. L’ordolibéralisme qui est sa doctrine est le nom de la politique qui convient aux intérêts du capitalisme allemand, à son besoin de dominer et à la structure de la société allemande actuelle quant à la pyramide des âges. Mais bien sûr on ne peut en discuter. La question ne peut même pas être évoquée. L’Allemagne est l’impensé de la politique française qui ne peut faire mieux qu’une mièvrerie désuète comme ces arpèges sur le prétendu « couple » franco-allemand. Tout regard critique est de la germanophobie. Toute volonté de rééquilibrage revient à vouloir la guerre avec l’Allemagne. Ces couplets m’ont été servis jusque par des gentils animateurs de la petite gauche pour qui le capitalisme est une abstraction non hiérarchisée et l’internationalisme un refus par principe de penser la Nation dans une stratégie révolutionnaire. Même sous le portrait du Che qui lui criait sans problème « la patrie ou la mort ».
(Pour écrire cette note j’ai emprunté les chiffres et les constats à un article de Jean-Pierre Robin dans les pages saumon du Figaro dont la conclusion est aussi inquiète que la mienne.)
98 commentaires
educpop
Des tromperies qui portent sur des chiffres, ça existe depuis toujours mais dans de telles proportions ça dépasse l’entendement. Passées les bornes il n’y a plus de limites comme dit le proverbe, pourquoi fait-on comme si nous étions encore tenus au maintien d’un réformisme trompeur ? L’Europe exige des gros sacrifices en termes de qualité de la vie, alors que par des trucages malhonnêtes elle nous a déjà privé de moyens qui pouvaient nous permettre de mieux équilibrer nos budgets, c’est de toute évidence une volonté de nous détruire. Un raz de marée dit populiste, en réalité conservateur au plus mauvais sens du terme va se produire, qui pourrait rendre inaudible le mouvement insoumis. Jean-Luc Mélenchon pourrait-il s’exprimer à la télé ou à l’assemblée à propos de ce qu’il explique ici, donner l’alerte d’une manière encore plus solennelle ? Le peuple est engourdi mais subodore de grands évènements.
Cosmos
Les chiffres donnés par Jean-Luc Mélenchon au sujet de notre participation à l’Europe sont saisissants. Ils sont inconnus des Français. Il faut trouver les moyens de les répandre autour de nous. Parler politique avec les amis est parfois bien difficile car chacun a ses préjugés. Par quel fil conducteur y arriver ? C’est différent avec chaque personne et les médias nous contredisent tellement. Et ceux qui nous attaquent le plus ce sont les socialistes, tout ça pour continuer à exister.
delpeuch
Ayons la patience de prendre deux semaines de recul et nous verrons ou en sont nos cheminots, ou en est la contestation de « parcoursup ». Les faits, rien que les faits pour ne pas se ridiculiser.
maxime vivas
Dalaï lama, RSF (qui m’a menacé 2 fois d’un procès), voici mes chevaux de bataille sur lesquels j’ai écrit 2 livres que Jean-Luc Mélenchon connaît. J’en ai écrit un 3ème sur Ménard (2 nouvelles menaces de procès).
Quant aux Ouïghours, je pars au Xinjiang en septembre (pour un reportage et sans doute un livre) avec escale à Beijing pour des rencontres. Comptez sur moi pour vous en parler à mon retour avec tout le respect que je dois à la vérité (et donc aux lecteurs).
Nicks
Toutes les manoeuvres du gouvernement et de la cour des serviles n’ont pas d’autre but que de nous salir bien entendu, mais surtout de nous décourager et au delà, tous ceux qui résistent. Or si nous, gens politisés et convaincus, nous baissons les bras, qui restera-t’il ? Quel genre de résistants serions nous si nous devions baisser la tête parce que l’adversaire se bat ? Non, il faut continuer et nous avons malgré tout des motifs d’espérer. Jean-Luc Mélenchon continue à progresser dans les sondages d’opinion, ce qui prouve bien qu’une partie au moins de la population ne se laisse plus prendre à la propagande grossière déversé contre la FI. Cette dernière compte aujourd’hui dans ses rangs des personnalités très compétentes, qui ne laissent pas notre porte-parole seul au front et sont parfois très complémentaires avec lui, comme Ruffin. Partout des mouvement de lutte naissent. Il reste à qu’ils s’agrègent réellement. Cela viendra. Notre ligne est la plus pertinente. Courage à tous !
jean-pierre
Oui, tu as raison, mais la lutte est inégale face à un adversaire déloyal. Ils usent de propagande, contrôlent les médias, étranglent financièrement les grévistes, envoient les Hordes Bleues pour se saisir de quelques pauvres qui tentent de survivre et de démontrer que l’on peut cultiver autrement, ils passent par ordonnance et décret sous prétexte de vitesse là où ne restera que précipitation. Mais tout cela n’est que pitoyable pantomine. La réalité c’est que le macronisme n’est que la suite de la politique du tandem Hollande-Valls, à savoir la feuille de route de l’Europe. Nos votes ne valent plus rien, en témoignent le référendum de 2005. Ou encore Juncker qui dit ne pas comprendre « que s’agissant de l’Europe, l’on puisse encore de manière nationale voter ». Comment encore fabriquer une Europe quand en Bulgarie ou en Roumanie les Roms seraient des sous-citoyens ? Quand perdure une situation de guerre à Chypre. Avec Malte et encore la Bulgarie aux mains des mafieux ?
Olivier Bonnet
« Je forme le vœu que l’alternative populaire en Italie soit tranchante et n’apparaisse d’aucune façon comme un renfort des « eurobéats » ni comme des hésitants ou des supplétifs de la bonne société italienne horrifiée par l’audace populaire en quête de souveraineté »
Allons, Jean-Luc, tu applaudis le gouvernement fasciste italien ? Ressaisis-toi ! Les ennemis de nos ennemis ne sont pas forcément nos amis, surtout pas avec l’extrême droite italienne !
Guy-Yves Ganier d'Emilion
Je pense qu’il faut lire cette phrase comme un encouragement à une prise de position franche (plan A/B) par l’alternative populaire de gauche « Potere al popolo », et évidemment pas comme un soutien aux néofascistes en place.
Berche Jean Marie
« ni comme des hésitants ou des supplétifs de la bonne société italienne horrifiée par l’audace populaire en quête de souveraineté ».
La phrase me semble bien exprimer le refus du fascisme Italien. Souhaiter une « Alternative tranchante », ne veut pas dire soutien au résultat spécifique de l’Italie. Remember: « Pas un voix pour MLP ». c’est clair non ?.
Yvon
Des constats à la pelle : « Lessivés, découragés, démotivés » et j’en passe. Certes c’est le cas d’une situation paradoxale ! « Nous sommes des millions » à penser que l’ancien monde est justement celui dans lequel croient encore Macron et tous ceux de l’ordo libéralisme. Que l’UE ne tient plus qu’à un fil, que la politique européenne et allemande est à bout de souffle ! Nous sommes tous fatigués de ce que nous voyons et entendons des gens aux manettes du pouvoir et de leurs aboyeurs patentés. L’écœurement laisse un intervalle dangereux : Ils seront « des millions » à propager une violence incontrôlable en réponse au train infernal des réformes, d’un étouffement des solutions alternatives proposées. Imaginez de quoi peut-être capable un peuple qui suffoque. Depuis quelques jours, j’entends la colère qui monte du peuple des moutons qui devient enragé. Gare !
Diane
Aucune chance. Le peuple de limaces ne demande que télé et smartphone, le reste n’est que babioles. On leur enlève leurs droits, on les déshabille de leurs acquis, et bientôt on va les dépecer, rien, et quand on les mettra à griller sur le barbecue, comme St Laurent, ils demanderons à être cuits de l’autre côté. Désespérant. Le retour à l’esclavage !
Monsieur Bienpeu
Problème insoluble : quand les gens vont-ils réagir ? Jamais. Ils sont gavés de télé et sniffent du portable depuis 15 ans. De plus, la propagande officielle les a tous conditionnés, façon pub, et ce, depuis aussi bien longtemps. Ainsi, les seules choses qu’ils sont capables d’ânonner sont des antiennes entendues cent fois par jour sur la médiasphère dominante. Et quand ils recherchent une information plus « sérieuse » comme il peut parfois y en avoir sur France Culture, ils retombent immanquablement sur une vestale qui rallume le feu sacré du pouvoir en place (Daniel Cohen tressant des couronnes au gouvernement ce matin et montrant du doigt les choix incohérents des italiens). Peut-on leur en vouloir après l’intoxication berlusconiste et vaut-on vraiment mieux ? Je ne veux faire déprimer personne, mais c’est plié pour cinq ans. La prise de conscience, c’est pour les législatives qu’il eut fallu l’avoir. On n’en est pourtant pas à un premier flop : Jospin, Hollande, etc.