Voici le dernier post de la saison. Si je m’exprime encore, ce sera sous la forme de billet particulier paraissant sur la bande roulante sur la « une » de ce blog. Je ne vais guère être disponible. Je m’apprête à vivre dix-huit jours sans pause, de nuit et de jour, les deux samedis et dimanches à venir compris. En effet, les déments qui gouvernement et leurs larbins dans l’Assemblée qui prétendaient « moderniser la politique, blablabla » sont incapables d’organiser le travail parlementaire et nous ont conduit à une thrombose totale. Comme président de groupe je suis cloué à Paris dans ce fichu palais où la clim fait rage !
Dans ce post je parle de l’esprit de victoire après la finale de coupe du monde de foot, du calendrier parlementaire, du prix du gaz, du sommet de l’OTAN, de l’Allemagne.
Au moment où j’écris ces lignes, la rue résonne de klaxons et ma télé donne les images des Champs-Elysées emplis d’une foule en joie. Je ne me suis mis à mon clavier que pour maîtriser l’étrange houle partagée qui montait en moi. Je suis reconnaissant à ceux qui nous permettent de vivre un moment de cette sorte. Je comprends que le foot indiffère et même qu’il insupporte. Mais j’ai plus de mal avec les militants politiques de la gauche traditionnelle quand ils montrent du doigt ceux qui s’en passionnent et se réjouissent d’une victoire sur le stade. J’ai lu je ne sais combien de commentaires sur le thème « le foot c’est l’opium du peuple », « les mêmes supporteurs sont incapables de défendre leur droits sociaux dans la rue », etc… Et ainsi de suite.
D’une façon générale, cette façon de voir nie le rapport du foot et des luttes populaires. Et des équipes de foot issues de ces milieux. Pourquoi des équipes de foot de la Résistance, des équipes de foot des républicains espagnols, le Red Star et ainsi de suite ? Le livre de Mickaël Correia, Une histoire populaire du football, dit si bien tout sur le sujet. De même que le documentaire de Gilles Perez, « Les Rebelles du foot ». Quels enjeux s’y trouvaient pour que le foot soit aussi confisqué par l’argent ?
Je réponds à ceux qui m’écrivent en ce moment même pour qu’ils se protègent de l’incapacité a partager une ferveur populaire apparemment sans objet réel. Demandez-vous ce que tant de gens vous disent de cette manière au lieu de les juger. Méfiez-vous des pisse-vinaigres qui regardent de haut les grandes émotions collectives partagées sans limite visible. Je comprends la méfiance qui s’attache à ce qui semble échapper au discernement rationnel. Mais est-ce le cas ici ? Quand les mêmes qui applaudissent s’interrompent aussitôt pour huer le président lorsqu’il apparaît à l’écran, ne montrent-ils pas au contraire que leur extrême vigilance dans le match s’exerce encore aussi sans limite d’objet ?
Je ne crois pas que la ferveur anéantisse la volonté. À l’inverse, je crois qu’elle la muscle. Elle la fortifie. Elle le fait en élargissant la perception de soi et de la puissance que nous contenons tous en nous. En s’identifiant au modèle de l’équipe qui force l’adversité par l’endurance et l’opiniâtreté, ceux qui s’y abandonnent exaltent le sentiment qu’ils ressentent de savoir que la force est en eux aussi. On ne fait jamais rien d‘autre en se donnant un exemple, un modèle, un héros. Qu’est-ce qui s’anéantit dans la ferveur footbalistique ? La peur de l’autre. Le doute sur soi. La victoire exalte la bienveillance et le goût de soi. Le sentiment que la victoire est acquise devient un esprit de victoire. Car le goût de la victoire se transpose. La victoire est donc une force de confiance en soi qui est contaminante. Elle peut être contagieuse.
Plongeons sans réserve dans cette vague qui nous submerge ! Nous en reviendrons plus forts, plus généreux. Sans modération : quelle autre équipe conclut une victoire en criant « Vive la République » ?
Nous allons donc siéger 18 jours consécutifs, nuit et jour, pour tenir le calendrier parlementaire. Les incidents à répétition sont donc garantis et un travail de mauvaise qualité est certain. Pour le régime, c’est l’occasion de mettre en pratique un de ses moyens habituels de mépris du parlement. Si vous voulez que ça aille plus vite : retirez vos amendements, taisez-vous ! Et ainsi de suite.
Dans cette cohue va se régler la réforme constitutionnelle, et toutes les lois passant en deuxième lecture qui ont agité le semestre… Je suppose que l’antiparlementarisme bovin de nombre de commentateurs médiatiques va trouver bien des os à ronger dans l’expression de notre épuisement. Les aboyeurs de service et les petits donneurs de leçon dans les réseaux sociaux vont se régaler de nouvelles comptabilités des absents, des présents des « débats ratés » et ainsi de suite. L’an dernier, les chiens de garde s’étaient abondamment gaussés de nos demandes de pause. Leur modernité n’allait pas jusqu’à nous reconnaître le droit à une vie de famille. Mais comme les plus venimeux des klaxons du parti médiatique seront en vacances, j’ai espoir que, du moins, on souffre sans être en plus insultés sans relâche.
Pour nous, les insoumis, l’effort est spécialement rude. Nous ne sommes que 17. Il faut donc organiser un roulement de la présence d’une toute autre densité que celle à laquelle doivent s’astreindre les 315 membres du groupe « La République en Marche ». Leur mépris pour les autres députés se manifestant dans tous les débats, on sait qu’il n’y a rien à attendre d’eux. Bien sûr je serai ravi que des citoyens de leur circonscription tiennent des comptes des présences et absences des députés LREM pendant cette période et les publient sur leur mur Facebook.
Les tarifs du gaz ont augmenté de 7,45% au 1er juillet. Pour un foyer qui se chauffe au gaz, c’est en moyenne 90 euros de plus sur la facture annuelle. C’est la plus forte hausse depuis 6 ans. Son effet sera socialement désastreux puisque l’on sait que ceux qui se chauffent au gaz sont majoritairement les plus pauvres. D’après la fondation Abbé Pierre, un ménage sur cinq souffre du froid dans son logement. Ces 90 euros en plus sur la facture vont contraindre de nombreuses personnes à allumer plus tard le chauffage cet hiver et à l’éteindre plus souvent.
Il faut souligner que cette situation est le résultat de la décision du gouvernement. Et de lui seul. En effet, il existe encore des tarifs réglementés dans ce domaine. Ils ont été maintenus précisément pour protéger les usagers. Ces tarifs fixes et décidés par le pouvoir politique datent de l’époque où EDF et GDF étaient une seule et même entreprise publique. Depuis, les diktats de la Commission européenne sont passées par là. EDF et GDF ont été séparés. GDF a été privatisé. Cela alors que Sarkozy avait juré que ce ne serait pas le cas et que cela n’arriverait jamais. Et maintenant, les tarifs règlementés vont bientôt disparaître. La Commission européenne l’a ordonné. Le gouvernement a obtempéré. Il a annoncé qu’il se conformerait d’ici 2022 aux désirs de la Commission dans ce domaine aussi.
Pour justifier cette hausse des tarifs, le gouvernement invoque la hausse du prix du gaz sur le marché mondial et des coûts d’investissements dans les infrastructures. Mais ces derniers résultent en grande partie de la campagne d’installation forcée des compteurs communiquant Gazpar, l’équivalent des Linky pour le gaz. On sait que la plupart des gens n’en veulent pas. Le député insoumis Bastien Lachaud a d’ailleurs déposé une proposition de loi pour que les consommateurs aient le droit de refuser l’installation chez eux de tels compteurs. Le gouvernement fait donc payer les consommateurs pour des compteurs qu’il les force à installer.
Ce choix n’était pas une obligation. Le gouvernement aurait très bien pu décider de ne pas augmenter les prix du gaz. Engie a des marges de manœuvre pour reporter les coûts sur d’autres que sur les ménages. Notamment sur ses actionnaires. Ceux-là ont empoché 2,4 milliards d’euros l’année dernière. Et l’entreprise a annoncé que les dividendes augmenteraient de 7,1% cette année. C’est là le plus évident résultat des privatisations des grandes entreprises publiques. Une clientèle qui doit supporter des prix toujours plus hauts pour nourrir les actionnaires. Un véritable impôt privé.
Il y a plus. La Commission de régulation de l’énergie propose tous les 6 mois une évolution des tarifs règlementés sur la base de critères objectifs comme ceux invoqués par le gouvernement pour justifier la hausse. Or, cette fois ci, elle proposait une hausse de 6,5% des tarifs. Soit inférieure à celle finalement décidée par le gouvernement. Une partie de la hausse décidée par le gouvernement ne peut donc pas être expliquée par des critères objectifs. Par contre, elle intervient quelques jours après que le gouvernement a annoncé vouloir vendre les 25% d’actions Engie qui restent toujours sous le contrôle de l’État. Est-ce donc un cadeau par avance fait par Macron aux futurs actionnaires que cette hausse injustifiée ? Une manière de faire monter le prix de l’action sur le dos des usagers ? Le président de riches n’est jamais assez généreux avec ses amis.
Le sommet de l’OTAN s’est ouvert à Bruxelles le 11 juillet. Donald Trump a choisi cette occasion pour viser une fois de plus l’Allemagne. Après ses exportations d’automobiles, ce sont maintenant ses importations de gaz russe qui sont visées par le Président des États-Unis. Il accuse l’Allemagne d’être « complètement contrôlée par la Russie ». Rien de moins. Il vise pour cela un projet de gazoduc, le North Stream 2. Il a été suivi par le gouvernement d’extrême droite de Pologne, caniche grotesque totalement alignée sur les positions américaines et paranoïaque belliciste vis-à-vis de la Russie. Ainsi, le Ministre des Affaires étrangères de la Pologne, Jacek Czaputowicz, a déclaré que « Ce projet est un exemple de pays européens qui fournissent des fonds à la Russie et lui donnent des moyens qui peuvent être utilisés contre la sécurité de la Pologne ». On voit le genre d’énergumène ! Penser que la Pologne puisse être menacée par la Russie est en effet une forme de l’orgueil nationaliste dans ce pays.
Le North Stream 2 est un pipeline qui doit, à l’horizon 2020, relier la Russie et l’Allemagne en passant par la mer Baltique. Il permettra de doubler la capacité d’exportation de gaz de la Russie via cette route. Il s’agit de soutenir la demande croissante en gaz de l’Europe puisque la Commission européenne elle-même prévoit que la demande va s’accroitre de 120 milliards de mètres cubes dans les 20 prochaines années. Certes, il s’agit à sa manière d’un désastre écologique qui ne trouble pas grand monde parmi les faiseurs de blabla écologistes. Mais puisque le gaz circule et qu’il s’agit de réorganiser cette circulation, voyons ce qu’il en est dans les bras de fer actuel entre Europe et Amérique.
Le projet North Stream 2, financé par l’entreprise russe Gazprom et un consortium d’entreprises allemandes, néerlandaises, autrichiennes et française (Engie), est logiquement conclu par l’Europe avec son premier partenaire en matière de gaz : la Russie. Il n’existe pas de contre-proposition sur ce continent. Pourtant, ce choix contrevient aux intérêts des Etats-Unis. D’abord, comme en toutes choses, ils voudraient eux-mêmes vendre leur gaz naturel à l’Europe. Voilà un marché sur lequel ils sont en mauvaise posture. Sur le marché européen du gaz, ils arrivent après la Russie, la Norvège, l’Afrique du Nord et même le Qatar. La part du gaz naturel liquéfié américain en Europe est tombée à 1% alors qu’elle était encore de 6% l’année dernière. Trump veut reprendre sa part non par l’amélioration des prestations américaines mais par la force.
Une autre raison pousse Trump à s’opposer aussi bruyamment au North Stream 2. En effet, en passant la mer Baltique, le gazoduc permet de contourner l’Ukraine. Aujourd’hui, un tiers du gaz russe exporté vers l’Europe passe par ce pays a qui de confortables royalties sont donc versées à cette occasion au gouvernement d’extrême droite du coin. L’aboutissement du projet North Stream 2 permettra évidemment de réduire cette part. Et de diminuer les moyens des néonazis locaux. Comme depuis 2014, le gouvernement ukrainien est enrôlé dans le camp des États-Unis, le projet russo-européen menace directement l’influence des États-Unis. On comprend au passage les dessous du conflit de 2014 à propos de l’Ukraine. Il s’agissait bien du contrôle des routes énergétiques entre la Russie et l’Europe.
Trump ne se trompe donc pas lorsqu’il met ce sujet sur le tapis à l’occasion du sommet de l’OTAN. Ou quand il le lie avec l’injonction qu’il fait aux pays européens de dépenser plus pour l’OTAN. Pour les États-Unis, c’est le même sujet : celui de leur agressivité envers la Russie. En abordant ainsi les deux sujets, il confirme que l’objet principal de l’OTAN en Europe est de cultiver la domination nord-américaine en Europe et de lui donner un contenu dans l’esprit belliqueux envers la Russie.
Cette attitude a, en Europe, ses adeptes, en particulier à l’Est. J’ai déjà cité le ministre polonais. Les gouvernements des pays baltes ont eux-aussi dit leur opposition au projet. Mais d’autres voient avant tout l’intérêt économique qu’ils ont à un partenariat stable avec la Russie en matière énergétique. L’Allemagne, mais aussi la Suède et la Finlande qui ont déjà donné leur accord pour que le gazoduc passe par leurs territoires. La France est engagée à travers l’investissement d’Engie. Mais le Président Macron nous a habitué aux courbettes devant les injonctions américaines. Ainsi, il s’est empressé de faire voter dans la loi de programmation militaire l’augmentation de dépenses militaires que Trump demande. Ainsi, il n’a pas levé le petit doigt pour les entreprises françaises installés en Iran quand le président américain a décidé de rétablir des sanctions. Cet atlantisme est néfaste pour notre pays. Il joue contre nos intérêts nationaux, contre notre intérêt économique immédiat.
Tout ce tableau nous ramène à la grande bascule géopolitique en cours. Les États-Unis d’Amérique doivent compenser le danger de la dédollarisation du monde par la reconstruction d’une base productive nationale. La dédollarisation est le résultat prévisible de la domination de la production chinoise sur le monde de l’économie productive. On paie et on achète dans la monnaie de celui qui achète et qui vend. La Russie et les autres pays de la zone Eurasie sont dans ce camp. Si le dollar n’est plus la monnaie de paiement international, il sera ramené à sa valeur réelle référée à la production et aux équilibres (et surtout aux déséquilibres) de l’économie des USA. Cela correspondra à une monstrueuse dévaluation. Et donc à un chaos sans pareil jusqu’à ce jour. Trump n’a donc nullement un comportement irrationnel. Il assume que c’est par un nouveau rapport de force qu’il peut tenir la suprématie des États-Unis.
L’Europe et l’Euro sont des concurrents pour les USA et le dollar. Depuis le premier jour. Les coups tordus se sont multipliés dans ce registre. On peut classer la crise Grecque dans cette catégorie compte tenu de son origine bancaire… À présent, dans sa confrontation avec l’Europe, les USA ciblent l’Allemagne parce qu’elle est la première puissance productive du continent européen et qu’elle accumule le plus d’excédent commerciaux avec les USA. On peut donc présager une dégradation de longue haleine de l’image de l’Allemagne dans les médias atlantistes. Le caractère « russe » du gaz vient renforcer la paranoïa anti-russe dominante dans le discours officiel. Il justifie à la fois la défense de l’intérêt du gaz américain et l’injonction d’acheter du matériel de guerre fabriqué aux USA. C’est un tout. Le bellicisme de Trump est d’abord une opération commerciale. Et comme les guerres sont surtout le résultat de l’activité des marchands de canon, on peut dire, après de Villepin, que les conditions d’une guerre généralisée se rassemblent sous nos yeux.
Comme on le sait si l’on a lu mon livre Le Hareng de Bismarck, il y a un sujet de discussion interdit en France : l’Allemagne. La plupart de ceux qui se sont risqués à mettre en cause l’hégémonisme allemand en Europe et la responsabilité du gouvernement de ce pays dans l’incroyable dégradation sociale dans l’Union ont dû y renoncer sous la pression. Je reste donc seul dans mon cas à tenir tête.
Je dis que les malheurs de l’Union Européenne viennent de la domination des intérêts et conceptions des gouvernements de droite et PS allemands (il est interdit par les convenances de dire « allemand » tout simplement et le mantra doit être récité en version intégrale pour s’éviter un tir de réplique immédiat). J’ai dit « non à l’Europe allemande » selon le titre du livre d’Ulrich Beck, préfacé par Daniel Cohn-Bendit. Ce dernier, en toute mauvaise foi, me reproche pourtant ma « germanophobie ». Le faisant, il prouve l’incroyable privilège que veulent s’arroger certains de ces mêmes Allemands : eux seuls auraient le droit de critiquer leur pays ! Il en va de même dans les médias. Y compris dans la petite « gôche » style Médiapart. Je crois qu’à cette occasion ce n’est pas seulement son habituelle hargne aveuglée à mon égard qui fonctionne mais un vrai tabou. Une barrière psychologique. Largement fondée sur des leçons d’Histoire mal assimilées et des raisonnements « marabout-de-ficelle-de-cheval » typiques des récitants issus de l’extrême gauche.
J’ai pu le constater une fois de plus à propos d’un tweet sur la défaite de l’équipe allemande. D’un bout à l’autre du pays, dans les lieux et rassemblements les plus divers, ce fut une déferlante d’applaudissements et de manifestations de très vive satisfaction. Je crois à la décharge des chiens de garde médiatiques qu’ils ne savent rien de cela comme de tous les autres sujets qui concernent les émotions populaires. Mes 140 signes lisses firent un tabac. Je fus fustigé trois jours durant par les éditorialistes. Évidemment, les Aphatie, Thomas Legrand et autres curés médiatiques ânonnèrent leurs prêches sans se rendre compte de rien. Un régal. Leurs leçons ont fonctionné comme autant de mortifications pour ceux qui s’étaient réjoui comme moi. Je reçus des dizaines de messages de soutien venant de tous les milieux. La suffisance de ces gens les fit même se risquer à citer les noms de quelques allemands bienfaiteurs de l’humanité pour mieux montrer mon infâmie. Les entendre citer Marx fut un délice. Mais ils eurent droit en retour à d’autres listes de noms autrement moins édifiantes. On me signala qu’à l’étranger aussi des hommes comme Íñigo Errejón et d’autres, de notre famille culturelle et politique dans le monde, avaient aussi tweeté dans le même sens que moi. Personne ne se demanda pourquoi. Blindés dans leurs certitudes, les « moralistes » pérorèrent à fond ! Un magnifique cours de masse comme j’aime en déclencher. Je passe la première couche et les médias la seconde, sans s’en rendre compte et en croyant marquer un point contre moi ! Exquis. Ça figurera dans mes stages de formation sur la conquête des hégémonies populaires.
Après quoi j’eus l’occasion d’une charge ouvertement politique. Lors de mon passage sur Europe1 le 8 juillet dernier, j’ai fait remarquer que l’essentiel des postes clefs dans les institutions européennes étaient occupés par des Allemands. Un des journalistes qui m’interrogeait m’a retorqué que M. Draghi, qui préside la Banque centrale européenne était italien. C’est vrai, mais son secrétaire général, M. Michael Diemer, est allemand. Tout comme le secrétaire général du Parlement européen. Et aussi celui du service européen pour l’action extérieure. On compte aussi le Président de la cour des comptes européenne, le Président de la Banque européenne d’investissement et le Président du Mécanisme européen de stabilité financière. Pour le reste, je conviens que c’est un hasard si les Présidents de trois groupes au Parlement européen le sont, dont celui du plus important. Le problème de ces nominations n’est pas qu’il s’agisse d’Allemands mais du fait qu’ils le soient tous.
Un poste stratégique restait en dehors de l’emprise allemande. Celui, hautement stratégique de Secrétaire général de la Commission européenne. Ce personnage, qualifié de « tour de contrôle » des institutions européennes, supervise l’ensemble du travail législatif de la Commission. Il était, jusqu’au 1er mars 2018, occupé par un Néerlandais. Étant donné le déséquilibre existant entre les Nations dans les institutions, il avait été promis aux Français. C’était sans compter sur les manœuvres du Président de la Commission, Jean-Claude Junker, pour imposer son chef de cabinet, Martin Selmayr. Bien sûr M. Selmayr est allemand.
Cette nomination a été imposée de manière arbitraire et au mépris complet des procédures normales. En effet, Martin Selmayr a d’abord été nommé au poste de Secrétaire général adjoint, opportunément laissé vacant fin 2017 par la nomination de sa titulaire à un autre poste. Le 21 février, il est nommé à sa place. Puis, le Secrétaire général de la Commission annonce sa démission. Le 1er mars 2018, le commissaire européen à la fonction publique, Oettinger, convoque une réunion du collège des commissaires à 9h30. À 9h39, il publie un communiqué annonçant la nomination de Martin Selmayr.
De nombreuses irrégularités entourent cette ascension en un temps record. D’abord, M. Selmayr ne disposait pas du grade nécessaire pour le poste. Dans la fonction publique européenne, le poste de secrétaire général de la Commission est occupé par des directeurs généraux ou des directeurs généraux adjoints. Or, Martin Selmayr n’était que directeur. Un grade qu’il avait obtenu par un poste de complaisance qu’il n’a jamais occupé puisqu’il faisait la campagne de Jean-Claude Junker à l’époque où cette nomination est intervenue. Par ailleurs, la candidature de Martin Selmayr ne souffrait que d’une candidature concurrente, celle de sa cheffe de cabinet adjointe. Elle fut retirée avant la clôture de la procédure. Depuis, elle a été nommée, par Martin Selmayr, cheffe de cabinet de M. Junker.
En résumé, la procédure entière apparaît comme irrégulière au regard des règles en vigueur ordinairement dans la fonction publique européenne. C’est ce qu’a déclaré le Parlement européen dans une résolution votée le 18 avril 2018. On peut en effet y lire que la nomination de Martin Selmayr « pourrait être considérée comme un coup de force ». Ce constat n’empêcha pas les conservateurs et la plupart des socialistes du Parlement européen de voter contre l’amendement co-signé par Younous Omarjee qui demandait la démission de Martin Selmayr. L’Europe allemande sauvée in extremis par la grande coalition européenne.
Le problème de « l’Europe à l’allemande » n’est pas sa nationalité. C’est son contenu politique. Tous ces personnages se sentent investis d’une mission politique commune : faire triompher l’ordo-libéralisme. Ainsi, l’un des premiers grands faits d’armes de Martin Selmayr à son poste fut de rédiger la proposition de la Commission pour le budget de l’Union européenne qui contient notamment des coupes claires dans la politique agricole commune considérée comme trop favorable à la France. Il est certain à mes yeux que cette forme mono-nationale du contrôle des postes stratégiques de l’Union européenne est une cause essentielle de la paralysie de l’Union figée dans un dogme dont les affidés ne voient pas du tout les limites ni les conséquences. La Crise de l’Union européenne est assez largement la crise de l’Europe « à l’allemande ».
92 commentaires
educpop
En 1914, Jean Jaurès essayait d’éviter la guerre et tenait comme député un discours similaire à celui de Jean-Luc Mélenchon, mais le patriotisme de la France profonde s’est finalement substitué au sens de la responsabilité citoyenne, ce qui indique que le discernement n’était déjà pas ce qui caractérise le peuple. L’opinion a suivi le pouvoir médiatique pour admettre une soi disant fatalité, pourtant la lutte des classes était alors encore un concept qui représentait un liant fort de la société. Aujourd’hui ce lien est très affaibli et le risque est d’autant plus grand, ne sous-estimons pas le bellicisme et l’absurdité nationaliste. Quand à notre député, qu’il ne se tienne pas trop près des fenêtres s’il va déjeuner dans un bistrot entre deux séances épuisantes à l’assemblée nationale.
CL
Grand bravo, et merci pour la diffusion de sa vidéo, au courageux témoin de violences (dont on découvre en ce moment qu’elles n’étaient pas policières mais celles de professionnellement proches du Président). Bravo aux journalistes, bravo aux élus insoumis et autres et aux authentiques forces de sécurité pour leurs questionnements, leurs indignations. A voir l’embarras, l’esquisse de lapsus révélateur d’un souhait du Premier Ministre de désamorcer une bombe, un scandale sur le fonctionnement de l’Etat : « Cette affaire est désar… désormais aux mains de la justice » (Ce lapsus 15H12 sur Public Sénat ou LCP n’apparaît pas dans d’autres rediffusions FR3 20H30 par ex) cette République en Marche, sur la Tête, est en train de la perdre.
A propos des deux point de violences évoquées dans la revue de la semaine (baston et défilé express) il n’est pas impossible qu’elles soient l’œuvre du même auteur. Ce conseillé, très spécial de l’Élysée, aux casquettes (ou casque!) multiples.
L. A.
Ferveur et liesse populaires surmédiatisées et imposées à tous, visages euphoriques d’innombrables quidams, en majorité plus que possiblement réacs et intolérants, mais dont il serait très vilain de mépriser l’intolérance (leur intolérance est populaire comprenez-le), et d’aucuns de considérer comme un affront de ne pas abonder pas dans leur délire. Mais alors à quand la célébration des JMJ ? (Avec injonction à ceux que ça défrise de s’abstenir ne serait-ce que de le faire savoir. Non mais !) L’objet de la critique n’est pas le foot, les amateurs de foot ou les réunions d’amateurs de foot. L’objet de la critique c’est qu’un engouement fabriqué soit imposé à tous, de force, au mépris de la liberté de chacun, voire avec mises à l’index et injures (parfois menaces) à l’égard des contrevenants. Ça c’est inacceptable. Qu’on arrête, en l’occurrence, de culpabiliser les victimes de ce vacarme irraisonné.
M-R-V
Il n’y avait pas de manifestation sur la place de la Contrescarpe le 1er mai ! Peut-être quelques manifestants retour du défilé, assis autour de la place ou dans des bistrots, avec des touristes. Et tout d’un coup une armée de CRS, avec un car barrant le haut de la rue Cardinal Lemoine, déboulée dans quel objectif ? Et à partir de là, suite à quel incident ou non incident ? le tabassage que l’on sait… Incompréhensible pour les riverains.
Gian
Bon courage Mr Mélenchon, à vous et à toute votre équipe. Je viens d’écouter la revue de la semaine et je suis triste qu’un groupe comme le vôtre, sincère et impliqué, soit traité avec si peu de considération par ses pairs. Mais nous avons besoin de vous, besoin que vous luttiez pour nous. Cela réconforte que des hommes et des femmes continuent à se battre alors que le découragement pourrait les gagner. Il faut beaucoup de volonté et une grande foi politique pour continuer. Alors je vous remercie de tout cœur. Prenez soin de vous pendant les quelques jours que l’on vous permettra de prendre pour vous reposer, vous ressourcer. J’espère qu’un jour vous serez entendus par une majorité de Français, et que nos enfants, grâce à vous, vivront dans un monde plus solidaire qu’aujourd’hui. Je veux y croire de toutes mes forces ! Encore merci à vous tous et toutes, pour l’exemple de courage et de détermination que vous nous donnez.
step
« Leur mépris pour les autres députés se manifestant dans tous les débats, on sait qu’il n’y a rien à attendre d’eux ».
Tiens, je me souviens du moment que vous pensiez pouvoir facilement fissurer cette majorité eléphantesque. C’était oublier qu’avant d’être des novices pour certains des « politiciens pas tous professionnels », ils sont surtout tous liés par des intérêts de classe communs. Pour cela il fallait regarder le contenu sociologique des LREM (RH,dirigeants, cadre supérieurs, professions libérales supérieures) qui était d’une extraordinaire homogénéité. LREM, c’est le top 10% ou les serviteurs de ces intérêts. Même si ce n’est pas pour faciliter la tâche, je suis plutôt content de constater que vous soyez revenu de cette illusion d’incohérence. Ils sont cohérents et seront solidaires pour prolonger ce sytème qui leur profite tant. LREM est un mouvement profondément conservateur.
Alain Verce
Tout à fait d’accord ! Bien sur il faut tacler Macron. Mais je trouve qu’on est trop réservés par rapport aux députés LREM qui se comportent comme de véritables voyous. Ce sont eux les responsables, ce sont eux qui votent les lois pourries ou soutiennent sans réserve les mauvais coups du gouvernement. C’est leur attitude, leurs déclarations, leurs votes, leurs accointances avec la finance qu’il faudrait populariser et non pas attendre les prochaines élections pour le dénoncer car ils sauront se refaire une virginité à ce moment là.
Invisible
Je ne suis pas d’accord. Si maintenant il faut faire du crowdfouding pour rénover les écoles publiques, c’est de la vaste blague. Quid de l’égalité ? On s’égare. Ne pas se laisser embarquer dans les engouements et les modes. Il y a des principes fondateurs et des règles. D’ailleurs, sur France Inter, j’entends que cette école était programmée pour être rénovée dans l’été… Si on tend à Macron des opportunités pour abandonner l’école à son sort, il va y foncer et dira à qui veut l’entendre « débrouillez-vous, faites un crowdfouding ! » Déjà que les écoles commerciales viennent jusqu’au JT soir de France 2 pour vendre des places post-bac aux 12% d’élèves qui n’ont toujours pas de places dans l’enseignement secondaire, on tombe dans la déchéance de la République et la privatisation des prérogatives d’état.
Chat
Maintenant qu’on sait que des barbouzes infiltrent les manifs, ne va-t-il pas falloir afin de s’en protéger, défiler avec un brassard police ?
Jean Cibot
Si, réellement, l’amour du sport et du « beau jeu » est ce qui anime avant tout le public, et non le chauvinisme et l’esprit de compétition guerriére, pourquoi ne pas inviter les équipes « vaincues » aux célébrations finales, car elles ont contribué, à leur façon, à la qualité du spectacle et ce serait une belle démonstration de fraternité.
BROSSE
En bafouant, en ridiculisant, en violant, à diverses reprises et de plusieurs manières, la fonction sacrée de chef d’Etat, Macron s’est déjà destitué lui-même symboliquement d’une fonction plus puissante que sa personne, d’autant plus qu’il a été élu par une minorité très faible de citoyens français. La violation des interdits est à la racine du sacré et de l’instauration d’un pouvoir séparé, parce que la violation originelle constitutive des royautés les plus anciennes et les plus diverses, pose un interdit majeur sur la fonction sacralisée du pouvoir, processus par lequel la classe dominante s’arroge la positivité du sacré, l’impur et le malfaisant, l’humiliation, la culpabilité et l’échec, revenant au domaine du mal et des dominés.
Bernadette
La grosse difficulté est la commune qui n’agit pas démocratiquement pour tous les habitants. La population est prise en étau dans ce système pyramidal.
Teres
Ce n’est pas nouveau que les barbouzes s’infiltrent dans nos manifs, mais à présent, ils sont détectés ! Les cagoulards sans cagoules et à ce haut niveau de l’État, ça fait du bruit. Les réseaux sociaux sont leur couperet à présent. Bas les masques !
Beaujean
Vu l’actualité, un parallèle à faire pour Jean-Luc (si personne n’a déjà songé à lui faire) : le chef d’Etat-major des armées viré voici un an pour de simples critiques sur le budget de la Défense. A comparer avec la bienveillance de trois mois dont a profité un délinquant de haut vol.
Alain Doumenjou
@Beaujean
Voila un commentaire qui me semble tout à fait pertinent car il s’agit en effet d’un argument imparable qui est de nature à faire mouche auprès de tout citoyen et auquel les chiens de gardes médiatiques les plus zélés ne peuvent rien trouver à répondre.
chan
Feuilleton des vacances. Hier soir, grande scène de comédie : « Oui, mon frère, je suis un méchant, un coupable… Le plus grand scélérat… » , c’est bien sûr l’aveu en général, pour éviter soigneusement l’aveu particulier des fautes précises, c’est l’aveu de Tartuffe ! Entre parenthèses, l’Assemblée nationale est juste avant la Maison de l’Amérique latine.
robindesvoix2
En tant que grand comique de l’état, il m’arrive et d’ailleurs comme à tout mes amis de ne jamais avoir besoin de mystifier la réalité, nous apprenons en coeur tout de concert, rétroactivement, il va s’en dire, en se mettant d’accord sur la tacatacatique et d’ accorder ainsi parfaitement nos violons. Même si nous ne chantons pas toujours juste, notre chef d’orchestre est venu hier soir tout avouer ! Il nous a trahi, un si grand, si jeune. Vu que tout le monde se sert des éléments à postériori, il nous semble fort aisé d’endofer les mouches en grand coup de brochettes pré-servies d’avance, devant les yeux ébahis de la représentations nationale, l’incompétence faisant rage sur tous les fronts, incapables de comprendre qu’une rétrogradation, n’est pas une sanction quand cela n’est qu’un gentil changement de poste tout en gardant son grade et sa rémunération comme un secret de polichinelle, la vérité nous fait si peur à dire. Les représailles seront là sous leurs applaudissements.