Ils sont responsables. Ils sont coupables. Pourtant ceux qui ont mis le monde dans cet état prétendent nous imposer encore leurs solutions aux problèmes qu’ils ont provoqués ! Nous les en croyons incapables et toujours aussi dangereux. On peut gouverner autrement avec d’autres objectifs et d’autres méthodes. Et nous voulons proclamer qu’on peut commencer à le faire à tout moment. C’est pourquoi notre contribution est un programme de gouvernement.
Il s’agit de « L’Avenir en commun ». C’est le programme proposé par « La France insoumise » à la dernière élection présidentielle. Sa légitimité ? Il a déjà rassemblé 7 millions de voix, soit près de 20% des suffrages exprimés en 2017. Il est d’actualité. Car il n’avait pas été rédigé pour satisfaire une mode médiatique ou sacrifier à un simple un rite électoral. Il s’agissait au contraire de traduire en mesures concrètes une nouvelle vision du monde. Celle-ci est basée sur une prise de conscience écologique globale et sur la volonté de construire une société vraiment humaine faite d’entraide et de solidarité. En ce sens il prouve qu’on peut gouverner à l’inverse de ce qui s’applique sous nos yeux.
Pourquoi l’éditons-nous à nouveau ? Parce que nous voulons répondre concrètement au rendez-vous du moment que vit notre société. Sans rien en changer, nous l’avons mis à jour sur les points trop liés à l’actualité d’alors.
L’épidémie du COVID19 disloque l’économie et les systèmes politiques du monde partout où triomphaient le productivisme, le capitalisme financier et les sociétés d’inégalités brutales. Mais il existe dorénavant une volonté profonde dans notre peuple de revoir de fond en comble l’organisation et les priorités de notre société. Un bouillonnement d’idées s’amorce. Il ouvre un désir de changements radicaux. Les libéraux comptent abuser de cet appétit. Comme ils l’avaient fait après la crise financière de 2008, ils s’approprient les mots et les idées qui circulent déjà depuis longtemps et qu’ils avaient tant raillés. Ils voudraient faire croire que tout reste à inventer. Comme s’il n’y avait eu ni alertes, ni réflexions, ni propositions avant la catastrophe en cours. Encore une façon de s’amnistier de leurs terribles responsabilités ! Et pendant que nous réfléchirions, eux pourraient mettre en place dès à présent le « monde d’après » qui leur convient. Un monde croupissant dans les inégalités sociales et les violences écologiques, un monde de contrôle généralisé, de libertés réduites, où de nouveau il faudrait tout sacrifier pour rembourser la dette des États et des entreprises financières.
Non, messieurs-dames les puissants, ce n’est pas si simple ! Des alternatives existent. Nous en proposons une, dès à présent.
Le programme « L’Avenir en commun », est en parfait état de marche. Sur maints aspects il est d’ailleurs prémonitoire. Il répond à la situation que nous vivons. Il pourrait être appliqué demain s’il le fallait. Et c’est bien cela que nous voulons signifier. Ce programme n’est pas la propriété des Insoumis. Il appartient au peuple qui l’a porté. Il est conçu pour fédérer le grand nombre des gens qui veulent vivre une vie décente en harmonie avec la nature et les autres êtres humains. Il est bon pour tous, quelles que soient son idéologie, ses convictions philosophique ou religieuse. Il propose une nouvelle France, soucieuse d’abord de l’intérêt général et des biens communs. Le peuple en serait le seul souverain veillant au salut commun en toute indépendance. Nous le versons comme contribution à tous les débats. Mais nous le proposons aussi comme une solution immédiatement applicable.
Jean-Luc Mélenchon,
Président du groupe « la France insoumise » à l’Assemblée nationale
Pour aller plus loin :
Comment le programme «L’Avenir en commun» a été mis à jour
Cette nouvelle édition de l’Avenir en commun propose une alternative concrète et immédiate au désordre actuel. Elle traduit toute une vision du monde en mesures gouvernementales, applicables dès demain.
Initialement en avance sur plusieurs sujets qui se sont révélés décisif depuis 2017, en voici une version mise à jour dans cinq directions.
D’abord, elle incorpore le travail de nos parlementaires, nationaux comme européens (1). Ensuite, elle tient compte des réformes d’Emmanuel Macron (2). Elle intègre aussi les propositions d’intérêt général déposées par les mouvements sociaux les plus récents dans le pays, conformément à la méthode de la rédaction initiale (3). Finalement, elle actualise certaines propositions de 2017 à la situation de 2020 (4).
- Trois années de production parlementaire
Depuis l’élection de 2017, vingt-trois parlementaires portent l’insoumission à l’Assemblée nationale ou au Parlement européen. Ils ont rédigé des rapports, interpellé le gouvernement et porté les revendications de milliers de citoyens. Ce faisant, ils ont affiné l’Avenir en commun sur plusieurs points.
- Cette nouvelle édition inclut les propositions de loi et les amendements déposés par nos député·es à l’Assemblée nationale depuis trois ans. Elle comprend par exemple nos revendications d’un ratio minimal d’encadrants en EPHAD, de reconnaissance de l’épuisement professionnel comme maladie du travail, de concrétisation du droit au logement, d’interdiction des écrans publicitaires numériques dans les lieux publics, de protection contre la malbouffe ou de lutte contre la discrimination par algorithmes.
- Elle introduit également l’activité de nos député·es au Parlement européen, qui y ont défendu de nombreuses réformes. Cela englobe par exemple l’arrêt de toute subvention aux énergies fossiles, la clause de l’européenne la plus favorisée ou le mécanisme de « carton rouge » permettant aux parlements nationaux de bloquer un texte européen.
Lorsque nous avons obtenu gain de cause sur certaines propositions de l’Avenir en commun, elles sont retirées de cette nouvelle édition. Ainsi, la suppression de la réserve parlementaire, l’ouverture de la PMA à tous les couples, la tenue du référendum d’autodétermination en Nouvelle-Calédonie ou l’interdiction européenne du chalutage en eaux profondes marquent des victoires passées et préparent celles du futur.
- Contre Macron et son monde
Depuis l’élection de 2017, Emmanuel Macron et son gouvernement ont entrepris une série de réformes néfastes. Ils s’attaquent à la République et à la France, aux droits sociaux et au climat. Ce qu’ils ont détruit, il faudra le reconstruire. Ce qu’ils ont construit, il faudra l’abroger.
- La suppression de dispositifs injustes ou inefficaces figure en bonne place dans cette édition. Il s’agit désormais d’abroger les ordonnances Pénicaud, la loi antiterroriste de 2017, les privatisations, les retraites par points ou encore Parcoursup.
- A l’inverse, des dispositifs démantelés seront rétablis. C’est le cas de l’ISF, des tarifs sociaux ou de la propriété publique (dans le rail et la Française des jeux par exemple).
- En outre, le programme rappelle tous les mensonges du pouvoir. La promesse de « 0 SDF » ou celle de « maintenir les écoles en milieu rural » soulignent l’hypocrisie de ces tartuffes et rappellent l’urgence de nos mesures.
- Soutien aux mouvements populaires actuels
Depuis 2017, des millions de citoyennes et de citoyens se sont mis en mouvement pour revendiquer le droit à la dignité ou à la justice, sociale comme climatique. Ce faisant, ils ont diffusé de nouvelles idées, rédigé des propositions politiques et déposé des doléances. Nous en adoptons sans réserve tout ce qui est cohérent avec le reste du programme.
- Les acquis des Gilets jaunes : ce mouvement a permis une réflexion profonde dans le pays sur la démocratie. Il a montré la force du grand nombre à beaucoup de personnes qui n’y croyaient plus. De nombreuses propositions du mouvement étaient déjà dans l’Avenir en commun de 2017. Mais le RIC y est désormais explicitement proposé comme nous l’avons déjà fait à l’Assemblée nationale.
- La défense de l’industrie : plusieurs sites de production, utiles et rentables, ont été occupés ou défendus par les salariés, contre des actionnaires qui souhaitaient les fermer. La pandémie du Covid-19 a mis en lumière les usines de masques de Plaintel ou de bouteilles d’oxygène de Luxfer. Leur revendication d’une relocalisation sanitaire est renforcée dans cette version.
- La mobilisation du collectif Inter Urgences : ce collectif sonne l’alerte depuis de longs mois sur l’état de l’hôpital public. Ses demandes, comme le rétablissement de conditions de travail dignes, des effectifs requis et de l’équipement nécessaire pour soigner les patient·es, sont mises plus en avant dans cette nouvelle version de l’Avenir en commun.
- Des revendications lycéennes et étudiantes : alors que les universités tombent en ruine et que les écoles ferment, que des étudiants et des élèves vont en cours sans manger et que leurs enseignants sont débordés, cette version de l’Avenir en commun reprend leurs propositions essentielles. Le déblocage des fonds, la rénovation des sites et la remise à plat de Parcoursup sont bien inclus.
- La protection du service public : de nombreux agents publics se mobilisent pour accueillir les usagers dans de bonnes conditions. Soucieux de garantir l’accès de toutes et tous, ils exigent le rétablissement des postes nécessaires à l’école publique, l’université, la recherche publique, La Poste, la police, la sécurité civile… autant de revendications déjà présentes mais désormais actualisées dans cette édition de l’Avenir en commun.
- La défense des lieux de vie : de nombreux collectifs s’organisent pour bloquer les grands projets inutiles, qui défigurent leur environnement et coûtent extraordinairement cher à la collectivité. Pour les soutenir, la nouvelle édition de l’Avenir en commun retire l’agrément public ou les subventions accordées à des projets qui mobilisent contre eux la population avoisinante, à l’instar de GCO Strasbourg ou Europacity.
- La lutte pour la justice internationale : partout sur la planète, des activistes tentent de bloquer l’hégémonie nord-américaine ou les régimes dictatoriaux. Cette édition de L’Avenir en commun en tient compte et propose de bloquer les offensives de Trump et ses complices contre le multilatéralisme, tout en soutenant les zones où s’invente un autre monde, comme le Rojava.
- Actualisation temporelle
Depuis l’élection de 2017, toute une série de paramètres économiques et sociaux ont changé dans le pays. Nous actualisons aussi le programme pour en tenir compte, lorsque les éléments évoqués n’existent plus ou que les chiffres ne sont plus adéquats. Notre programme colle ainsi au plus près des enjeux du moment.
- Une série d’initiatives que nous soutenions dans l’Avenir en commun sont heureusement arrivées à terme. C’est le cas par exemple du projet Galileo de radionavigation satellite ou du programme Extraplac de connaissance des fonds sous-marins. D’autres dispositifs que nous critiquions ont changé de nom, comme le CICE transformé en baisse de cotisations sociales.
- La hausse des prix sur la période nous impose aussi de revoir les chiffrages que nous proposions pour conserver leur signification dans la période actuelle. La hausse de 16% du SMIC équivaut par exemple aujourd’hui à 1400€ nets mensuels.
- La roue de l’histoire a continué à tourner, entraînant avec elle une partie des interrogations ouvertes par l’Avenir en commun. Le Brexit n’est plus un enjeu spéculatif, mais une situation à gérer. Les oligarques européens se sont également renouvelés, Ursula von der Leyen accédant désormais à la tête de la Commission européenne.
Ainsi mis à jour, « l’Avenir en commun » concentre dans ses lignes non seulement la légitimité des millions de suffrages qui l’ont déjà choisi, ainsi qu’une méthode collective de travail, mais aussi les deux décennies d’histoire politique dont il est l’héritier. Il montre que les intuitions collectives de 2017 résistent à l’épreuve du temps, sont compatibles avec tous les développements ultérieurs – et s’avéraient même prémonitoires sur maints aspects.
Une brève histoire de «L'Avenir en commun»
« L’Avenir en commun » est un texte qui vient de loin. Il a été réfléchi et travaillé en large collectif. Il est l’aboutissement de tout un processus né dans la société elle-même.
Dans un contexte où le néo-libéralisme s’imposait dans tous les aspects de nos sociétés, son contenu ne pouvait être le fruit d’une compilation hâtive ou de l’imagination de quelques personnes dans un bureau. Il lui fallait s’ancrer en profondeur dans les aspirations humanistes qui travaillaient les consciences entrées en résistance. Il a donc été le résultat d’un travail approfondi pour en prolonger les mots sur la scène politique.
Rappelons à grands traits les principales étapes de ce cheminement. Elles expliquent comment ce document programmatique a pu devenir une référence commune pour des millions de personnes. Au point de départ, il y avait déjà un premier programme présidentiel porté en 2012. Il recueillit quatre millions de suffrages. Partant de ce document initial, on organisa en 2016 une refonte générale du programme. Le 10 février 2016 marque l’acte de naissance de la plateforme numérique « La France Insoumise ». Il s’agissait alors d’appuyer une candidature à l’élection présidentielle. Mais aussi, dès le départ, de participer à la construction d’un programme de radicalité concrète. Pendant plusieurs mois, la plateforme est restée ouverte à des contributions individuelles. Il y en eut plus de 3000, largement intégrées au document final.
On organisa avec cela des dizaines d’auditions de personnalités de tous les horizons dans le monde associatif, syndical ou celui des intellectuels. Une première rédaction mise en ligne sur internet accueillit des milliers de contributions. Ensuite, aux élections législatives suivantes, ce texte a été le programme d’un millier de candidats. Logiquement, il est devenu la déclaration de principe du groupe des parlementaires Insoumis à l’Assemblée nationale et au Parlement européen. Il a donc guidé notre action, nos travaux et nos propositions depuis deux ans et demi, souvent en commun avec d’autres groupes dans ces assemblées.
C’est pourquoi « L’Avenir en Commun » est enraciné dans l’histoire récente de notre pays. Sur beaucoup de sujets, des citoyens sont mobilisés et organisés de longue date pour faire avancer dans leur domaine la cause de l’intérêt général humain. Il s’agit des syndicats, des associations engagées contre la pauvreté, des ONG environnementales, des lanceurs d’alertes, des intellectuels. Il y a tant d’énergie, de travail, d’idées dans notre peuple. Nous nous sommes donc tournés vers l’expertise issue du bouillonnement de la société française. De la sorte, nous avons conçu « l’Avenir en Commun » comme le moyen de mettre dans une cohérence d’ensemble et dans une perspective gouvernementale les programmes que la société avait produits.
Nous avons eu la confirmation de la réussite de cette méthode par la suite. Ce furent les commentaires, les évaluations de « l’Avenir en Commun » par les associations. Elles lui donnèrent souvent un satisfecit complet. Pour une coalition d’association luttant pour un développement plus égal, « l’Avenir en Commun » mérite « 10/10 sur la thématique de l’aide publique développement ». Oxfam, sur la lutte contre les inégalités, le juge « le plus proche des recommandations des ONG, en se montrant plus complet et plus prévis que ses concurrents ». Amnesty international reconnaît « une série d’engagements qui font écho à nos recommandations ». Le réseau Sortir du nucléaire note « qu’en terme de sortie du nucléaire civil et de transition énergétique, c’est le plus ambitieux ». Pour les experts de la santé publique et de la sécurité routière, c’est un « 20/20 ». Le Barreau des avocats de Paris le perçoit comme « le programme qui répond le plus aux attentes des avocats ». L’énumération pourrait continuer. Beaucoup d’observateurs ont été surpris de cette résonance entre « l’Avenir en Commun » et tant de composantes de la société organisée. La raison en est très simple : notre programme est souvent le leur !
Depuis la publication de « l’Avenir en Commun », nous avons maintenu le lien permanent avec les forces sociales sur le programme. Le texte central a été complété par 42 livrets thématiques qui le précisent et l’affinent. Les groupes qui animent ce travail ont repris, systématisé, multiplié la méthode des auditions programmatiques. Les livrets thématiques ne remplacent par « l’Avenir en Commun », bien sûr. C’est ce programme, et aucun autre, qui est la base de l’action des Insoumis. Mais la réflexion programmatique est toujours ouverte et solidement mêlée à la société elle-même.
« L’Avenir en Commun » propose de placer au sommet de la hiérarchie des normes les solutions collectives, l’entraide et l’intérêt général humain. C’est pourquoi sa première priorité est de remettre le pouvoir entre les mains du peuple, en convoquant une Assemblée constituante. Il veut que la France soit le pays de la souveraineté du peuple plutôt que celui d’une monarchie présidentielle corrompue par l’influence des lobbys et des intérêts particuliers.
Avec la planification écologique et la règle verte, il assure la survie des sociétés humaines à l’heure du changement climatique et de l’effondrement de la biodiversité. Nous voyons désormais clairement les chocs et les dangers auxquels nous exposent l’illusion du capitalisme d’un monde aux ressources sans limite. Il faut donc réorganiser tous nos modes de production, de consommation et d’échanges pour les mettre en harmonie avec la nature et ses rythmes.
Cela ne sera pas possible si nous restons dans le cadre d’une économie soumise à la finance et où règne l’égoïsme social. Ce programme propose de tout mettre en œuvre pour relocaliser notre industrie. Il défend le protectionnisme solidaire à la place du libre-échange sauvage. Les richesses issues du travail humain doivent cesser d’être accaparées par une caste d’ultra-riches qui épuisent les hommes et la nature. Tous les êtres humains doivent être mis en état de sécurité sociale.
La France et son peuple peuvent proposer un autre chemin au monde à condition d’être indépendant. C’est la condition pour être un facteur de paix et de coopération. « L’Avenir en Commun » préfère l’ONU à l’OTAN, un monde ordonné plutôt qu’une alliance militaire nous rattachant à une puissance déclinante et agressive.
Les vieux dogmes de l’Union européenne libérale se sont effondrés. La concurrence comme norme suprême et l’austérité pour l’Etat et les services publics comme seule politique possible a déjà fait trop de dégâts. Nous devons sortir des traités européens.
La société néolibérale propose la course au profit, la croissance sans contenu et la réussite individuelle comme objectifs pour l’Humanité. Nous préférons le progrès humain : la santé, l’éducation, la culture, les arts. Nous avons dans le futur des horizons enthousiasmants : la mer, l’espace, le numérique. Engageons-nous dans ces nouvelles frontières par amour de la connaissance plutôt que de l’argent, et d’une façon nouvelles respectueuse de l’environnement.
Aujourd’hui plus que jamais, la France a besoin de ces causes communes. Le monde du marché-roi et du saccage environnemental est mort. Le monde d’après peut commencer maintenant. L’Avenir en Commun en est un bon point de départ.