Quelque chose de décisif vient de se produire dans l’appareil judiciaire du pays. La commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les obstacles à l’Indépendance de la justice a permis une rupture de l’omerta. Son président, le député insoumis du Nord, Ugo Bernalicis a opéré un travail salutaire pour la République. En effet, dans son audition, l’ancienne procureure du parquet national financier, Eliane Houlette, a témoigné des pressions qu’elle a subies de la part de sa supérieure hiérarchique Catherine Champrenault pour incendier la présidentielle de François Fillon. Elle a notamment dénoncé des demandes permanentes de remontées d’informations très précises sur les auditions qu’elle conduisait, sur les actes de son enquête.
Ces demandes venaient de sa supérieure hiérarchique : la procureure générale de Paris, Catherine Champrenault. Personnage sulfureux s’il en est. Les Insoumis la connaissent puisqu’elle était toujours au même poste pendant les perquisitions déclenchées contre nous en octobre 2018. C’est elle qui a menti délibérément, à la joie des journalistes qui lui passaient les plats, quand elle déclara qu’elle ne savait rien de l’affaire, qu’aucun rapport n’avait été fait au ministre, etc. Et ce furent 100 policiers, dix substituts du procureur, 17 sites perquisitionnés comme cela aurait pu être le cas pour « un grand narco-trafiquant » selon le mot du président du Sénat Gérard Larcher. Le grand public ébahi, les médias avec la bave aux lèvres courant à la curée, « Quotidien » pendant huit mois d’images chaque jour, toutes les planètes justice/police/média se mirent en ligne. Du coup la bande du macronisme judiciaire se tapait sur les cuisses de satisfaction en voyant tout ce petit monde lui servir la soupe.
Deux ans après aucune suite n’a été donnée à « l’affaire » sinon un procès inique à Bobigny où dès le premier jour le juge déclare : « la matérialité des faits est avérée ». Deux jours de comédie suivent avec pour conclure une généreuse rasade d’indemnités pour les policiers se faisant passer pour des victimes. On connait la dynamique d’une telle situation. Ceux qui ont participé aux mauvais coups ne peuvent plus se dédire. Ils en rajoutent donc. Jusqu’au jour où un grain de sable bloque la belle machine à détruire.
C’est ce qui vient de se passer avec les aveux d’Eliane Houlette. Aussitôt, tout remonte de tous côtés. Et parmi tout ce qui remonte, le pire est toujours certain. Ainsi quand on découvre que Macron en personne intervient dans une affaire qui concerne son plus proche collaborateur. Et ce n’est pas fini. Pourquoi ? Parce que le pouvoir macroniste repose sur quelques personnes dans la justice qui se battent âprement pour les postes à distribuer dans l’institution. Surtout le réseau des anciens socialistes qui sont ralliés à sa présidence. C’est eux qui tiennent le sommet de la pyramide de la Justice et de la police avec Belloubet et Castaner. La procureure Champrenault vient de ce sérail comme une bonne partie d’un sérail dont il faudra publier la liste un jour ou l’autre pour que chacun soit bien informé. Champrenault était conseillère de Ségolène Royal pendant trois ans. Et recommandée par elle à Hollande qui la nomma du parquet de la Guadeloupe directement au premier parquet de France pour lequel elle était la seule femme candidate volontaire pour briser le cycle des nominations au mérite ou a l’ancienneté !
Depuis, une autre affaire très grave a été révélée par Ugo Bernalicis, le député insoumis qui préside la commission d’enquête parlementaire. Il a interpellé directement et publiquement la Garde des sceaux à une session de question d’actualité à l’Assemblée nationale. Mediapart a ensuite confirmé les faits. Il s’agit cette fois ci d’une mise en cause d’Alexis Kohler le secrétaire général de l’Elysée. Un des postes les plus importants dans l’entourage du Président et dans l’exécutif. En 2018, le parquet national financier, sous la direction de Eliane Houlette, a ouvert une enquête préliminaire contre lui pour « prise illégale d’intérêt », « trafic d’influence » et « corruption passive ». Que tous ces grands mots puissent ne rien vouloir dire est évident. Mais il est soupçonné d’avoir profité de sa position lorsqu’il était au ministère de l’Économie pour favoriser une entreprise, MSC croisières, dans laquelle lui et sa famille ont des intérêts financiers.
Mais à l’été 2019, l’enquête va s’arrêter brutalement. Eliane Houlette quitte la direction du parquet financier le 30 juin 2019. Surprise : Catherine Champrenault nomme une magistrate pour assurer l’intérim. Ce type de désignation est totalement inhabituelle. L’usage veut que l’intérim soit assuré par une personne nommée dans l’intérêt du service par le sortant de fonction. Celui-ci est en effet la personne la mieux placée pour tenir compte des caractéristiques particulière des enquêtes en cours et assurer les nécessités de cloisonnement. Champrenault choisit une personne contre l’avis d’Eliane Houlette qui la refusait dans l’interêt du service s’exprimant dans l’intérêt des affaires en cours. Devant la commission d’enquête parlementaire, celle-ci a indiqué que l’usage aurait consisté à ce que son adjoint assure l’intérim en attendant qu’une nouvelle personne soit nommée. Mais Catherine Champrenault a préféré mettre là une personne sur laquelle elle avait la main, son avocate générale. Moins de deux mois plus tard, le 21 aout 2019, le dossier Alexis Kohler était classé « sans suite » par le parquet national financier. Rien ne justifiait une telle vitesse dans la décision de classer ce dossier. C’est même tout à fait inhabituel. Et donc suspect à juste titre.
Grâce à la commission d’enquête présidée par Ugo Bernalicis, un élément crucial a été rendu public. Emmanuel Macron est intervenu personnellement dans le dossier pour obtenir le blanchiment de son collaborateur. Le 1er juillet 2019, une lettre du Président de la République, signée de sa main est versée au dossier. Elle indique qu’Alexis Kohler a respecté toutes les règles quand il travaillait au cabinet du ministre de l’économie Emmanuel Macron. Cette lettre disculpe Alexis Kohler. Sur sa base, le procès-verbal définitif transmis du parquet national financier est modifié et l’enquête abandonnée. Ces informations ont été transmise à la commission d’enquête par l’association Anticor.
Au titre de l’article 64 de la Constitution, le Président de la République est garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire. Ce mandat devrait évidemment interdire toute intervention directe du Président dans une procédure visant quelqu’un nominalement et a plus forte raison si elle travaille pour lui. Lors des questions d’actualité au gouvernement, Ugo Bernalicis a demandé directement à Nicole Belloubet si elle était au courant de ces faits. En tant que garde des sceaux, elle reçoit en effet des remontées d’informations de ses parquets dans des affaires sensibles. Même si elle l’a nié dans le passé, il n’y a plus de doutes possibles là-dessus.
Le député insoumis a aussi demandé à la ministre de la Justice si elle allait ouvrir une enquête de l’inspection générale de la justice. Cela le mériterait pour déterminer les responsabilités dans ce détournement manifeste de l’autorité judiciaire. Aucune réponse de Belloubet sur ces deux points. Elle s’est contentée de donner un mauvais cours de droit pour élève de première année. Ce faisant elle voulait masquer une grosse information. En effet elle voulait cacher le fait que la pièce suspecte de cette intervention du président de la république n’a pas été cotée dans le dossier ou elle figure. Autrement dit : elle n’existe pas dans la procédure. L’enquête de police qui a effacé tout ce qui venait à charge du fait de ce courrier, repose donc sur une pièce inexistante. Une fois de plus, elle a nié recevoir des remontées d’informations dans des affaires individuelles sensibles, contre l’évidence. Menteuse ! Le procès de l’ancien garde des sceaux Urvoas a prouvé que c’était une pratique habituelle. Les révélations d’Eliane Houlette le confirment. Nicole Belloubet est une menteuse. Ce n’est pas une nouvelle. Mais le système qui détourne la justice en son sein est en train d’être exposé au grand jour.
On peut et on doit espérer qu’aucune connivence, plan de carrière ou corporatisme ne viennent contrarier la purge qui est nécessaire. Le départ de Catherine Champrenault et des autres membres du réseau Belloubet y contribuerait grandement. Même si notre intérêt électoraliste serait que des gens aussi perdus de réputation restent en place le plus longtemps possible. Et notamment pour la période où ils comptent utiliser les « affaires » qu’ils pensent avoir monté contre nous. Il n’en reste pas moins que ce serait salutaire pour tous les républicains. Si l’on veut avoir de nouveau confiance, il faut qu’elle soit reconquise.
Jeudi j’étais au Havre pour soutenir la liste menée par le député Jean-Paul Lecoq. Samedi j’étais à Bagnolet en soutien à la liste dirigée par Laurent Jamet. L’un et l’autre sont communistes. L’un et l’autre se sont mis au service de coalition citoyenne locale. Dans l’un et l’autre cas les Insoumis font équipe avec eux depuis le premier tour. Ma présence voulait signaler dans les deux cas une intention : la volonté insoumise de chercher un chemin pour battre les néolibéraux et leurs succédanés de toutes les variétés. Et la volonté de le faire sans reproduire les formules politiques figées du passé. Ni au Havre ni à Bagnolet je n’ai vu autre chose qu’un acharnement à donner du corps à l’idée de l’intervention citoyenne. Enfin des amis qui comprennent qu’une élection, qu’elle soit municipale ou présidentielle n’est pas un congrès de parti. Qui ont compris combien la soupe des guirlandes de sigles peut paraitre repoussante pour tant de gens quand bien même parfois ce n’est pas juste. Nous payons tous pour les trahisons et les renoncements des gouvernements de François Hollande.
Ces militants sur ces listes comprennent que l’éloignement de millions de gens des urnes et de dizaine de milliers hors des partis n’est pas un malentendu mais une caractéristique profonde du moment politique et qu’il faut la traiter comme tel. Je ne sais pas quel sera le verdict des urnes. Dans les deux cas le rapport de force est tendu. Mais ce dont je suis certain, sans l’ombre d’un doute, c’est que voilà la bonne méthode de travail. Ni les communistes ni nous parfois ne sommes irréprochables dans nos manières de faire. Mais dans les cas que je cite, partant de loin du fond de la scène politique, nous avons façonné de cette manière une remontée dont attestent les sondages. Et quoiqu’il en soit cela reste pour le futur. Le maire sortant au havre comme à Bagnolet pensait être élu au premier tour. Le second tour a lui seul est déjà une victoire.
Après cela, je veux dire un mot de ma relation aux communistes et de celle des insoumis. J’ai milité toute ma vie en alliance avec les communistes. D’abord au temps de l’Union de la Gauche non seulement dans les élections mais dans le PS dont j’étais membre où plusieurs courant agissaient contre l’Union. Puis j’ai organisé ma sortie du PS et le projet de Front de Gauche en lien direct avec la direction communiste de Marie-Georges Buffet qui avait facilité mon entrée en campagne pour le « non » au traité constitutionnel européen en 2005. Ensuite, ce fut la campagne présidentielle commune de 2012, ses législatives et puis celles de 2017. Cette convergence n’a jamais été simple pour toutes sortes de raisons. Mais sans elle, nous n’aurions pas connu les deux succès consécutifs que furent ces campagnes commencées à 3,5 % en 2010 conclue à 11% en 2012 puis commencé à 9% en 2015 et terminée à 19,5% en 2017, à six cent mille voix du deuxième tour.
Dans tout cela il ne faut pas considérer seulement la forme, c’est-à-dire l’alliance de deux organisations. Il faut regarder le fond, c’est-à-dire la dynamique qui était visée et qui se produisit. C’est par une claire rupture avec le néolibéralisme et les eaux troubles du social-libéralisme que la confiance s’est reconstruite dans d’amples secteurs populaires. Elle nous a donné l’avantage et la prééminence face à la gauche traditionnelle. L’alliance de Hamon et de Jadot passa au contraire de 18 % à 6 %. Cela ne tenait pas à la personne du candidat EELV /PS. Mais en dépit de certaines propositions de rupture du programme Hamon, le poids des autres incertitudes de ce même programme et le soutien de leurs appareils respectifs paru suspect et même menaçant au grand nombre. N’avait-il pas été déjà tant trahi par Hollande et ses lois antisociales comme celle de Myriam El Khomri ? Ces traits de situation surgissent plus crument que jamais dans le contexte actuel. Ils se résume d’une question : qui doit conduire la rupture écologique et sociale ? Jusqu’à quel point cette rupture ? Qui donne les meilleures garanties de constance sur le sujet ? Ce n’est pas une question limitée aux aspects de « communication », de slogan, de positionnement. Et encore moins à la liste des sigles des partis qui « présentent une candidature ». La question est dans la société.
Jusqu’à quel point la société est-elle prête à rompre avec l’état des choses du présent ? Pour le savoir, il faut le lui demander. C’est à cela que servira l’élection présidentielle. Cette élection désormais ne se confond avec aucune autre. Elle est vécue et pensée par tout un chacun pour ce qu’elle est : celle où se joue le sort global du pays et de toutes les institutions qui le constituent. La nature de la monarchie présidentielle est désormais bien comprise. Elle a généré une culture politique particulière après 60 ans de vie politique sous ce régime. Le problème posé est donc de savoir si on accepte d’assumer tous les risques de la proposition de rupture comme le fait le programme « L’Avenir en commun ». Ou bien si on décide de remettre le pilotage de la rupture à des « centristes » censés attirer mieux le consommateur de politique à mi-chemin de toute destination.
« Centriste » ici désigne non pas le succédané habituel de la droite mais ceux qui professent une position à mi-chemin des exigences de la cause et de leurs intérêts électoraux d’organisation. Quand Jadot répond à la question « vous diriez vous un opposant ?» et qu’il répond « non jamais », je crois qu’il incarne bien ce que je désigne comme « centriste ». Cela n’enlève rien au mérite et à l’utilité de Jadot et de son parti. Mérite ? Celui de la franchise et du refus de maquiller son point de vue. Utilité ? Aider au fractionnement de l’électorat passé du PS vers la macronie que les violences liberticides du macronisme révulse.
Le contexte municipal se présente comme une percée d’EELV. Même si souvent ceux-ci conduisent des liste de coalition ample dans lesquelles sont souvent des Insoumis. Ce résultat sera une aide signalée en vue de ce dépeçage de la macronie par le milieu de son ventre mou. Au final, tout cela aide à l’achèvement du démembrement du champ politique traditionnel. Mais cela n’enlève rien à la nécessité d’assumer l’alternative jusqu’au bout et de s’en donner les moyens. Entre ce que représente EELV et ce que nous représentons, la différence n’est pas l’écologie mais le contenu de nos politiques écologiques respectives quand il faut affronter la responsabilité du capital dans le modèle économique productiviste. La différence a davantage une couleur de classe qu’une tournure strictement idéologique.
En apparence, il y a donc émulation davantage que concurrence. Sachons en profiter. Nous avons un intérêt commun a construire une tenaille électorale pour affronter la macronie et la droite. Chacun y a donc sa part de travail à accomplir. À la fin, disons qu’il y a une certaine fatalité à la convergence. La municipale a Lyon, Marseille, Toulouse, Tours et bien d’autre en témoigne. Mais dans quel sens ? Avec quelle dominante : la rupture de modèle ou pas ? Classe moyenne supérieure des centres villes et secteurs populaires ne répondent pas toujours de même à cette question. La violence de la récession de l’économie et de la crise sociale devrait encore modifier les perceptions dans ces catégories sociales. Le tableau devrait donc progressivement s’éclaircir sur ce point. À première vue, la statégie de Jadot nous intéresse parce qu’elle est efficace pour aspirer des secteurs qui sans cela resteraient dans le giron macroniste. Ce n’est pas la première fois que je l’écris ici. Mais une victoire de la gauche à l’intérieur de ce parti, moins efficace électoralement, pourrait aussi jeter les bases d’une ample recomposition des forces politiques. La réalité va sans doute se faire un chemin intermédiaire. La fusion de Génération·s avec EELV devrait aider à un coup de barre vers une candidature EELV plus compatible avec une gauche plus traditionnelle. Cela nous convient évidemment. On ne saisit pas une barre chauffée au rouge à main nue. Quoiqu’il en soit à chaque jour suffit sa peine.
EELV ne cache pas sa candidature au leadership. D’ailleurs, à chaque élection nous sommes mis au pied du mur : ou bien EELV a la tête de liste ou bien il n’y a pas d’union. Cette attitude, cent fois plus dominatrice et arrogante que nous l’avons jamais été, est cependant bien perçue de la classe médiatique de centre gauche qui nous avait pourtant beaucoup caricaturé à ce sujet. Cela exprime davantage qu’un préjugé d’hostilité politique évident. Il s’agit plutôt d’une tendance lourde de ces milieux sociaux. La part de peur qui entre dans leur volonté de domination sur le reste des la société s’est tellement vue dans leur aversion pour les gilets jaunes ! Mais de notre côté ? L’alternative populaire que nous portons peut-elle dominer la scène et porter le leadership pour la période en cours ? Cela dépend de notre capacité à unir notre propre famille culturelle, électorale et politique. Le programme « L’Avenir en commun » incarne une synthèse fédératrice. Sinon, après le PS, EELV dominera les coalitions du futur. Jusqu’au suivant fracas. Mais l’histoire même du dérèglement climatique ne nous laisse pas trop de délais pour les expérimentations.
Le député Loïc Prud’homme a ouvert ce jour là la série des questions de la France Insoumise à l’Assemblée nationale avec une interpellation cinglante. Une fois de plus il s’agissait de la comédie macroniste à propos du glyphosate. Car la forfaiture continue. En novembre 2017, Emmanuel Macron avait promis la fin de son utilisation dans 3 ans. Le délai est bientôt écoulé, et le glyphosate est toujours là. Pire, les manoeuvres pour valider son renouvellement le plus long possible se poursuivent de plus belle. L’Agence nationale de sécurité sanitaire est au coeur d’un scandale à ce propos en ce moment. Des conflits d’intérêts et des petits arrangements entre amis dans le but de fausser les études sur le glyphosate et sa dangerosité pour la santé.
Voyez plutôt la honte pour notre pays. En effet la France a été choisie au niveau européen, avec quatre autres pays pour conduire les expertises scientifiques sur le pesticide. Ces études doivent permettre d’appuyer la décision, en 2022, de l’Union européenne quand elle devra renouveler ou pas son autorisation d’utiliser ce produit. Le gouvernement a donc chargé en 2018 l’Agence nationale de sécurité sanitaire de mener cette étude. Aussitôt les embrouilles ont commencé. Car cinq « experts » conciliants avec l’industrie chimique ont été nommés de manière discrétionnaire par le pouvoir.
La mission de ces cinq personnes était d’établir le cahier des charges pour choisir les laboratoires qui vont conduire les tests sur le glyphosate et notamment son caractère cancérigène. Le résultat du travail des « experts » de l’agence est consternant. Ils requièrent des conditions techniques pour pouvoir participer aux études qui n’ont aucun fondement scientifique. Mais le résultat visé est atteint : un seul consortium de laboratoire est au niveau de ces critères. Aussitôt, bonne surprise pour les intéressés : dans ce regroupement, on trouve les laboratoires de trois des cinq « experts ». Pratique !
Ce n’est pas tout. L’attribution du marché sera finalement validée par un comité scientifique dont le président n’est autre qu’un des experts rédacteur du cahier des charges. Autrement dit, ce sont les mêmes personnes qui définissent les critères pour avoir le droit de mener l’étude, tranchent finalement sur ceux qui mèneront l’étude puis gagnent l’appel d’offre. Par ailleurs, certaines évaluations ont été écartées alors qu’elle nous intéressent sur le plan de la santé. Ainsi, seul le caractère cancérigène du glyphosate sera évalué et pas celui des produits commercialisés contenant du glyphosate ! Ainsi, on ne saura pas si la combinaison particulière de glyphosate avec d’autre produits commercialisé par Bayer-Monsanto provoque le cancer.
Toutes ces magouilles ont un objectif : prolonger l’utilisation de ce poison à côté de nos logements, de nos écoles, sur les légumes que nous mangeons. Lorsque le député Loïc Prud’homme a posé la question de ce scandale à l’Assemblée nationale, la réponse du ministre de l’Agriculture fut en dessous de tout. Il a simplement nié en bloc des faits largement documentés dans un article du Monde. Il a par ailleurs répliqué par l’insulte, en accusant Loïc Prud’homme d’être un menteur et un inculte.
Voici le texte de la question de Loïc Prud’homme :
« Monsieur le Premier ministre, fin 2017, le président Macron promettait la fin de l’utilisation du glyphosate dans 3 ans. Tout le monde le sait désormais, à quelques semaines de cette échéance, cette promesse comme tant d’autres, c’était du flan ! Mais pour le glyphosate ça va encore plus loin : nous assistons à de sombres manœuvres pour nous en coller jusqu’en 2027 ! En effet la France fait partie des 4 pays européens choisis pour réévaluer ce pesticide. Début 2018 le gouvernement adresse donc une saisine à l’Anses, Agence nationale de sécurité sanitaire, pour qu’elle lance des études indépendantes. C’est à ce moment que les embrouilles commencent : – nominations discrétionnaires – sans appel à candidatures – de 5 « experts » pas trop virulents sur les pesticides plutôt que constitution d’un groupe ouvert de 20 experts ! Ces 5 bons génies mettent un an à écrire et valider le cahier des charges qui est sensé définir les critères des études et les compétences des laboratoires. Et là c’est un festival ! Le cahier des charges est écrit de façon tellement restrictive, sans nécessité scientifique, que seul un consortium peut y répondre, consortium qui comprend trois des cinq rédacteurs de ce cahier des charges ! Il est validé par un comité d’expertise scientifique dirigé là encore par un des rédacteurs, M. Nesslany. Puis l’Anses mettra 5 mois de plus à le publier. Après quoi elle ne laissera que 2 mois et 1/2 au coeur de l’été 2019 pour répondre à l’appel à projet pour ces études d’évaluation sur la cancerogenicité du glyphosate. Puis ce cahier des charges oublie opportunément les tests sur les formulations commerciales évacuant ainsi le problème central des co-formulants. Enfin l’Anses engage cette attribution hors marché public, pour 1 millions d’euros
Tout cela sent à plein nez le conflit d’intérêts, voire la collusion d’intérêts ! M.le ministre, quand allez-vous mettre fin à ces méthodes opaques au coeur même de l’ANSES, méthodes qui jettent un discrédit définitif sur cette agence nationale ? Quand allez-vous enfin mettre fin à ces manigances qui ont pour but de faire perdurer l’épandage massif de pesticides qui nous empoisonnent ? »