Je ne suis pas cas contact du Président Macron. L’Elysée m’a appelé pour me le confirmer. J’étais assis trop loin du Président ce jour là (8 ou 9 mètres) de l’autre côté d’une table de deux mètres de large, dans une salle de 20 mètres de long (au moins) sous un plafond de hall de gare a six mètres du sol (au moins). Le journaliste de BFM et un ou deux experts de plateau qui ne connaissent ni les lieux ni les circonstances voulaient à tout prix que nous soyons « cas contact » et pourquoi pas déjà gravement malade pour faire l’actualité. L’un pérorait sur ce ton de mise en cause propre au poujadiste de média (qui « révèle », « dévoile » et tutti quanti) à l’heure de gloire du rubricard qui se morfond à tendre en vain son micro aux mouches des quatre colonnes de l’assemblée nationale. L’autre avec la mine compassée des « experts » qui savent, mieux que vous, tout et son contraire.
Je m’attendais donc à devoir aller m’isoler, comme ce fut le cas quand Monsieur Castex m’avait rencontré en tête à tête. Décidément ces macronistes des sommets deviennent dangereux. Pour une fois la parole de l’Elysée m’a libéré. Deux heures après tombait le résultat de mon test. Fait deux jours après l’auguste repas il sonna comme une sorte de rédemption définitive : négatif. Je kiffe les tests négatifs ! C’est la quatrième fois qu’on me picore le fond des trous de nez. Je savoure désormais en connaisseur la rencontre avec ce médecin en surblouse bleue lunette de plongée et masque de scaphandrier qui du matin au soir fouaille nos muqueuses parlementaires. Il parait que le soir Macron avait banquet avec une petite scadra entre hommes. Tous contacts ! Des irresponsables. On rirait si on était méchant. Mais on ne l’est pas. Je leur souhaite le meilleur pour leur santé. Je crois pourtant que je mettrai du temps avant d’accepter une invitation de ces gars-là, vu la poisse qu’ils portent à ceux qui les rencontrent.
Malheur : les 150 citoyens tirés au sort pour former la « Convention citoyenne pour le climat » ont pris au sérieux leur tâche. Horreur : ils ont fait des propositions compatibles à 90% avec L’Avenir en Commun. Ils veulent même taxer les dividendes pour financer la bifurcation écologique. On comprend pourquoi Macron se mord les poings à propos de cette trouvaille de Convention citoyenne tirée au sort.
Et ce n’est pas tout. Depuis le début du mandat, les députés Insoumis ont déjà traduit une partie de tout cela en amendements et propositions de loi. Nous avons encore proposé de concrétiser certaines mesures lors du dernier projet de loi de finances. Par exemple la réduction de TVA sur les billets de train et tous les amendements pour un vrai plan de relance du ferroviaire. Le tout aura été méthodiquement repoussé par la majorité LREM.
Dès lors, les 149 propositions de la Convention citoyenne se sont transformées en autant d’étapes de chemin de croix pour le gouvernement. Tant et si bien que tel est pris qui croyait prendre. Car toutes les propositions sont listées noir sur blanc dans un rapport. Il est donc facile de faire le décompte de ce qui en reste au fil des refus. Macron est dans le filet. Les petites phrases ont donc jalonné la pente glissante vers le grand naufrage. Elles permettent de mesurer la profondeur du gouffre entre les promesses initiales et les contorsions actuelles. En l’espace d’un an, le « je prendrai tout “sans filtre” » est devenu « je ne vais pas dire : ce qu’ils proposent, c’est la Bible ou le Coran ». De prises de parole de ministres en amendements rejetés, le sabotage du « sans filtre » a pris de l’ampleur.
D’après nos calculs, près de la moitié des mesures ont déjà été retoquées ou réduites à peau de chagrin. Déjà, les propositions les plus ambitieuses ont été abandonnées. On pourrait citer la taxation des dividendes à hauteur de 4%, le moratoire sur la 5G ou l’interdiction de la publicité pour les produits polluants. Le reste se transforme en coquille vide. Quelques exemples illustrent parfaitement ce stratagème. Ainsi, une taxe au poids des véhicules a été adoptée lors du projet de loi de finances. Alors qu’elle devait concerner les voitures de plus de 1 400 kilos, la majorité a fixé ce seuil à 1 800 kilos. De fait, elle concernera moins de 2% des véhicules. L’artifice s’est transformé en naufrage.
La semaine dernière, Macron envoyait donc ses ministres au casse-pipe. Les citoyens ont découvert que tout était déjà arbitré en coulisses. Circulez, il n’y a rien à voir ! Macron a fini par abattre sa dernière carte pour embrouiller son monde : un marathon de questions-réponses avec les membres de la Convention citoyenne. Pour finir, il a fait surgir deux lapins de son chapeau. Les citoyens demandaient un moratoire sur l’exploitation minière en Guyane. Il va se transformer en réforme du code minier pour favoriser le développement de ce type de projet. Cerise sur le gâteau : le projet de démantèlement d’EDF risque d’être ajouté sous la forme d’une ordonnance ! Il n’en est pourtant nullement question dans les 149 propositions initiales.
Tout cela arrive après des mois de reculs écologiques dénoncés par l’écologie militante. En septembre, il a fait adopter à la consternation générale la réintroduction des pesticides néonicotinoïdes tueurs d’abeilles. Puis, son budget a entériné de nouvelles baisses drastiques dans les moyens de l’Etat pour l’environnement. En tout, 15% des postes publics ont été supprimés depuis l’arrivée au pouvoir de Macron. Tout récemment, Jupiter a annoncé la relance de la filière nucléaire et le démantèlement prochain d’EDF. Toutes ces annonces, comme le déversement d’aides publiques sur des multinationales sans aucune condition écologique ont dégoûté tout le monde dans le milieu associatif et chez les citoyens de la Convention citoyenne.
La tension était donc à son comble. Alors, pour éteindre le feu qu’il avait lui-même allumé en jetant à la poubelle la plupart de leurs propositions, le 14 décembre Macron est allé au-devant des conventionnels bien mécontents. Et il a sorti du chapeau un projet de referendum sur un article qu’il propose d’ajouter a la Constitution. Immédiatement, les bavards en continu se sont ébahis de joie. Le syndrome de la mémoire de poisson rouge ne leur permet même pas de se souvenir qu’il avait déjà annoncé la chose en juin dernier devant les mêmes citoyens de la convention.
En fait, avant de venir au vote d’un référendum, la proposition de modification de la Constitution doit être adoptée dans une formulation identique par l’Assemblée nationale et par le Sénat. Soit il croit cela possible, soit il se défausse par une ruse une fois de plus. Dans le premier cas, il organiserait donc un référendum probablement à la fin de l’année 2021, quelques mois avant la prochaine élection présidentielle. La ficelle est bien visible ! Il s’agit évidemment d’une manœuvre de communication politicienne pour se présenter en « champion de la Terre » juste avant 2022. Réponse immédiate des Insoumis : pas de referendum prétexte à plébiscite. Et si le référendum a lieu, quelle que soit la question, la réponse sera « NON ». Assez de se faire prendre pour des idiots et de ses laisser piéger par nos bons sentiments.
Macron annonce un referendum pour introduire une ligne sur le climat dans la Constitution. Foutaise. Mais les experts superficiels ont une fois de plus raté l’occasion d’une analyse sérieuse. Car il y a un referendum sur le sujet qui a disparu. Macron l’avait pourtant promis le 10 janvier puis le 29 juin 2020. Il s’agissait alors de soumettre directement au vote l’ensemble des propositions législatives de la Convention. Mais celui-ci aurait porté sur les mesures que Macron refuse aujourd’hui de mettre dans un projet de loi. Or sur la base de l’article 11 de la Constitution et non l’article 89, il n’y aurait pas eu besoin de vote identique des deux assemblées avant de se soumettre au vote des français. Aucun filtre !!! quelle horreur.
Le Président préfère donc attendre un accord des deux assemblées. Il n’aura pas lieu, évidemment.
Sur le fond, la proposition de modification de la Constitution qu’il propose à présent n’est pas particulièrement une bonne idée. Voici la phrase que Macron veut soumettre à référendum : « la République garantit la préservation de la biodiversité, de l’environnement et lutte contre le dérèglement climatique ». Cette rédaction est pratiquement identique avec celle qui était proposée par la majorité LREM au moment des débats sur la réforme constitutionnelle, en 2018. Nous avions déjà voté contre à l’époque. Cet ajout dans la Constitution peut paraitre inoffensif. Mais c’est déjà un problème.
Au mieux, la phrase n’apporte rien par rapport au droit existant, notamment celui de la Charte de l’Environnement, également de niveau constitutionnel. Or, l’urgence écologique est telle, que passer plusieurs mois à débattre et voter sur une disposition purement symbolique est néfaste. Tout comme l’est l’illusion d’une action climatique que l’on cherche à créer en agissant ainsi. Si référendum il y a, le camp de l’exigence écologique, celui qui prend au sérieux la menace existentielle votera « non ».
Il n’est pas ailleurs pas si sûr que l’intégration de cette phrase soit sans conséquence. Certaines analyses indiquent que cela pourrait entériner plusieurs reculs. D’abord, la phrase sépare d’un côté « la préservation de la biodiversité, de l’environnement » qui doit être « garantie » et de l’autre « le dérèglement climatique » contre lequel il s’agit de « lutter ». Il y a pour la République et donc pour l’Etat deux types d’obligations différentes. Le verbe « garantir » pose une obligation de résultat en ce qui concerne la biodiversité. Par contre, en matière de climat, l’Etat devrait simplement « lutter ». C’est une obligation de moyens. Si cette interprétation était confirmée par le Conseil constitutionnel après adoption d’un tel article, ce serait un recul terrible pour la cause écologique.
Car aujourd’hui, l’Etat français a bel et bien des obligations de résultats en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Il s’agit des objectifs fixés par le droit international dans des traités signés et ratifiés par notre pays, et notamment les Accords de Paris. Le recours « l’affaire du siècle » déposé contre l’Etat par 4 ONG et soutenu par plus de 10 millions de personnes s’appuie par exemple sur ces obligations de résultats. Mais si la Constitution énonce demain que la seule obligation est de « lutter » contre le changement climatique, il se pourrait que ce genre d’action s’effondre.
La séparation dans la rédaction entre « environnement », « climat » et « biodiversité » pose un autre problème. Elle peut affaiblir la portée de la Charte de l’Environnement. Ce texte a été adopté en 2004 et il est intégré à la Constitution. Il ne fait pas la différence entre les trois termes. Celui de « climat » n’y apparait même pas : il est considéré comme inclu dans la notion d’environnement. Mais en séparant les trois mots et en attribuant des objectifs différents, la proposition de modification de l’article 1 sous-entend que ce sont bien des notions distinctes. Du coup, n’importe qui pourra plaider avec de solides arguments juridiques que le climat ne fait pas partie de la Charte de l’Environnement. Cela aurait par exemple pour effet de libérer les plus gros pollueurs en CO2 du principe pollueur/payeur, pourtant inscrit dans la Charte qui est déjà dans la Constitution.
Il est évident que l’écologie doit irriguer l’esprit de la Constitution. Mais pas pour permettre à Macron de voler quelques points à Yannick Jadot dans les sondages. Le débat constituant, quand il aura lieu, doit permettre de définir notre relation avec la nature. C’est ce que propose la règle verte : elle pose un objectif d’harmonie, au sens de la concordance des rythmes, entre la vie humaine et la nature. Il faudrait aussi ajouter aux principes de précaution et de prévention, déjà inclus dans la Charte de l’Environnement, le principe de non-régression. Le droit de l’environnement ne peut pas revenir en arrière vers des normes moins protectrice de l’écosystème. Mais pour en arriver là, il faut ouvrir en grand la discussion dans tout le pays, faire participer le peuple à la rédaction.
La médiocrité du procédé de Macron aggrave l’essentiel : l’heure n’est plus au bricolage constitutionnel. Le croire, c’est refuser d’entendre le message de l’abstention massive de toutes les dernières élections. Cette Constitution a perdu sa raison d’être, son aptitude à créer du consentement. Les institutions qu’elle organise, de l’Assemblée nationale à la Commune sont frappées par des niveaux d’abstention sans précédent. Elle ne garantit plus de gouvernement stable. Celui d’Edouard Philippe aura par exemple été le plus instable de la cinquième avec 17 départs de ministres, soit un départ tous les 65 jours. Le nombre de groupe à l’Assemblée nationale place la législature actuelle à égalité avec le record d’éparpillement de la quatrième république.
Modifier à la marge cette Constitution n’a plus de sens. Si l’on doit ouvrir le débat constitutionnel, ce doit être pour tout revoir de fond en comble. Les termes de ce débat ne doivent pas être décidés par le monarque. Le peuple doit lui-même imposer les grand sujets de discussion à travers une assemblée constituante. Dans ce débat, la question écologique sera sûrement présente. Mais pas sous la forme d’un plébiscite pour un Président absolu en mal de popularité. C’est notre première raison de refuser cette foutaise référendaire. Le peuple par la grève civique manifeste sa défiance totale dans le système, Macron lui offre un plébiscite mal ficelé. Macron lui se comporte trivialement avec la constitution de la cinquième république en reprenant des propositions sans penser à leurs conséquences. Tant mieux, agissant ainsi, il en accélère la chute.
Cette tribune d’artistes et acteurs du monde de la culture a été publiée le 16 décembre 2020 sur Mediapart.
« Au moment où l’on voit les injustices et les inégalités sortir par tous ses pores, où la colère gronde, nous voulons, partout, créer des foyers pour l’imagination ». Des artistes et acteurs du monde de la culture apportent leur soutien au programme l’Avenir en commun porté par Jean-Luc Melenchon, « seul à rompre avec l’étouffement que provoque la politique libérale et liberticide de ce gouvernement ».
Beaucoup d’entre nous avaient pensé, pendant le premier confinement, que le jour d’après ne serait pas comme le jour d’avant. Aujourd’hui, nous voyons des images que nous avions cru révolues : l’hôpital qui ne tient que par la volonté des soignants, la faim qui tenaille des familles, la chasse aux immigrés par la police nationale dans les rues de Paris, des milliards pour faire repartir la destruction de notre écosystème, la concurrence entre humains érigée en valeur…
Chaque matin, nous découvrons nos mots infusés de libéralisme, la valeur ne serait plus que monétaire, les idées au service de l’ordre. En tordant la langue et les idées, ce sont nos outils de travail que les tenants de l’ordre établi abîment.
On nous enjoint de nous adapter. Nous avons besoin de respirer.
Nous nous engageons dans le mouvement revendicatif, la solidarité, la lutte contre les inégalités d’origine, de sexe, sociales… la construction intellectuelle, sensible ou matérielle d’un autre avenir ou d’autres choses encore.
Tout ne dépend pas que des élections. Mais toutes et tous nous savons que l’élection présidentielle sera décisive et nous refusons de nous résigner au choix mortifère entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron.
Ou à leurs avatars.
Nous n’avons pas tous la même image et le même rapport avec Jean-Luc Mélenchon. Certains d’entre nous n’ont même jamais voté pour lui.
Aucun des signataires ne croit au sauveur suprême. Et de toutes les façons, nous sommes libres et indépendants. Par culture. Mais le programme qu’il porte rompt avec l’étouffement que provoque la politique libérale et liberticide de ce gouvernement. Et, à ce jour, nous croyons que Jean-Luc Mélenchon est le seul à même d’accéder au second tour.
Il dit que son programme, l’Avenir en commun, est ouvert aux enrichissements. Nous, artistes et acteurs du monde de la culture, voulons, avec nos expériences, nos idées, affirmer des principes, formuler nos propositions, ouvrir de nouvelles pages.
Nous ne signons pas un chèque en blanc.
D’autant que le ravage de l’art et la culture vient de loin : l’asphyxie de la création par la marchandisation et la soumission à la « demande » sur la base de préjugés et du diktat des jauges, la volonté de restreindre le nombre et le champs de nos professions pour nous réduire à ce qui serait économiquement rentable ou prestigieux, l’instrumentalisation des artistes, des intellectuels, à qui on demande de prouver leur utilité et qu’on transforme en faire-valoir, l’idée d’excellence pour vendre le rayonnement national, le primat des indicateurs sur la définition d’un intérêt général…
Cela fait maintenant des années que les pouvoirs effacent le principe du service public de la culture comme fondement d’une politique publique d’intérêt général et en détruisent les conditions.
La gestion désastreuse de l’épidémie a aggravé tout cela : aucune anticipation, des aides mal pensées et mal ciblées qui profitent essentiellement aux institutions privées, une année blanche pour les intermittents qui n’empêchera pas le ravage de la profession et de ses équipements, sans aborder le fait que les autres précaires, de l’art et d’ailleurs, en sont exclus.
Et surtout, une occasion ratée de repenser les choses en profondeur, de prendre des mesures radicales en faveur d’une politique publique en ce domaine, autant pour ses acteurs que pour la société toute entière. Nous sommes donc exigeants.
Nous voulons que cette campagne à venir prenne à bras le corps , pour une fois, les enjeux de l’art et de la culture. D’autant que nous pensons qu’avec la volonté de changer la société et en affirmant le choix de « l’harmonie entre les êtres humains et avec la nature », on est tenu de placer l’imaginaire, le symbolique, le sensible, comme la raison, au cœur du projet politique.
Nous rêvons donc de dialogues fructueux avec la société, nous visons des conquêtes nouvelles et pour cela nous revendiquons notre liberté. Nous revendiquons, pour toutes et tous, l’égalité des conditions de production des biens symboliques.
Une société humaine se juge à ses œuvres. Au moment où l’on voit les injustices et les inégalités sortir par tous ses pores, où la colère gronde, nous voulons, partout, « créer des foyers pour l’imagination. C’est l’acte le plus politique, le plus dérangeant que l’on puisse imaginer ». Nous voulons y contribuer.
Premiers signataires :
Christian Benedetti, comédien, metteur en scène, directeur de théâtre, Luc Chareyron metteur en scène, Christine Citti, comédienne, François Clavier, comédien, Xavier Czapla comédien, Laetitia Dosch, comédienne, metteuse en scène, Valérie Dréville, comédienne, Mark Etc, metteur en scène arts de la rue, Coco Feilgerolles comédienne, Joël Hubaut, artiste plasticien, Laurent Klajnbaum acteur culturel, Léa Le Bricomte, plasticienne, Claude Levêque, artiste plasticien, Josquin Macarez, délégué artistique, Christian Malaurie, anthropologue de l’art et du design, Chiara Mulas, artiste plasticienne, Alice Mulliez et Florent Konne, duo d’artistes plasticiens, Olga Papp, chef costumière, Sophie Passarre actrice culturelle, Gilles Perret, réalisateur, Serge Pey, poète, Aldo Romano, musicien, Aimée-Sara Bernard, comédienne, Michel Simonot auteur, sociologue, Françoise Romand, cinéaste, Joséphine Serre, autrice, metteuse en scène, Kazem Shahryary, poète, Diane Wurtz Dj, réalisatrice.
pour rejoindre et signer la tribune : noussommespour.art@gmail.com
5G. Surprise : « Moi j’ai la conviction que cette nouvelle technologie peut potentiellement servir la transition écologique. » Voilà ce que dit Yannick Jadot à propos de la 5G. Sa critique du dispositif vise seulement Huawei qui lui deplait parce qu’il est chinois. Etre espionné par les USA, c’est mieux? N’empêche, il devrait écouter ce qui se dit de la part de gens qui ne sont pas de son avis sans être pour autant des agents chinois.
Météo France a donné l’alerte. L’organisation météorologique mondiale aussi. Voyons pourquoi. Pour prévoir le temps qu’il va faire, les météorologues s’appuient sur les observations des satellites. Environ 800 de ces appareils fournissent 80% des données d’observations nécessaires à ces prévisions. Ils repèrent les colonnes de vapeur d’eau en « écoutant » leurs vibrations. Celles-ci se situent à une fréquence unique : entre 23,6 et 24 Giga Hertz. Or, la 5G va se déployer sur une fréquence très proche. Et très imprécise allant de 24,25 à 27,5 Giga Hertz.
Une multiplication des antennes 5G transformerait l’accumulation des ondes en un bruit très gênant. Celui-ci risque aussi de déborder carrément sur la bande réservée aux études météorologiques. Les météorologues sont donc très inquiets. Car tout cela risque de brouiller sévèrement leurs prévisions. Ils redoutent une perte de fiabilité de l’ordre de 30% pour les prévisions à 3 jours. Concrètement, à cause de la 5G, les alertes à la population risquent d’être données en retard ou trop tard. Pire encore, la 5G les empêcherait de poursuivre nombre d’études sur le réchauffement climatique.
Certes, des filtres doivent être mis sur les émetteurs 5G pour protéger la « bande météo ». Mais cela ne sera pas fait avant 2024 en Europe. Mais est-ce que ce sera une protection suffisante ? Ce sujet est d’une importance tout de même non négligeable. Pour l’heure, en France, la bande de fréquence de 26 GHz n’a pas encore été attribuée aux opérateurs. De son côté, la vapeur d’eau ne peut pas modifier sa fréquence. Et nous sommes directement concernés par ses évolutions dans l’air. Car le réchauffement climatique accroît l’évaporation. Une hausse de 1 degré génère 7% plus de vapeur d’eau dans l’atmosphère. Mécaniquement, les précipitations sont plus importantes. Les intempéries et crues survenues dans la Vallée de la Roya donnent un aperçu du pire en la matière. Toute la facade mediterranéenne est concernée puisque cette mer se réchauffe plus vite que toutes les autres sur la planete.
Pour limiter les dégâts, il va donc falloir être en mesure de prévenir méthodiquement et davantage ces aléas climatiques alors qu’ils vont devenir plus fréquents et plus intenses. L’organisation des dispositifs de vigilance et la mobilisation des secours dépendent de la qualité de ces prévisions. Et on comprend qu’une mauvaise évaluation de l’ampleur ou de la durée des phénomènes météo perturbateurs aura des conséquences très sévères. Le contexte n’est pas à une accalmie de ces phénomènes. Car le changement climatique est irréversible. Même si nous décidons de la bifurcation écologique très vite, nous devrons vivre avec nombre de ses conséquences. Parmi celles-ci, il y aura de plus en plus d’épisodes météorologiques jusqu’ici rares ou inconnus dans nos régions du monde. Cela va nécessiter de la part de nos sociétés des capacités d’adaptation rapides. L’exceptionnelle technique des scientifiques de Météo France est un atout pour notre pays. Un atout indispensable. Il faut donc écouter ses agents. Et prendre au sérieux le risque de brouillage dû à la 5G.
Ce samedi 12 décembre, le PCF tenait son conseil national. Présidé par Pierre laurent, cet organisme central dans la vie du PCF devait établir le calendrier de travail des communistes en vue de l’élection présidentielle. J’ai donc pensé que c’était le moment opportun pour proposer ma candidature à ceux dont j’ai déjà été deux fois le candidat pour cette élection. J’ai adressé ma lettre au secrétaire national du PCF, Fabien Roussel ainsi qu’aux deux présidents de groupe parlementaire Eliane Assassi (Sénat) et André Chassaigne (Assemblée nationale) ainsi qu’à Pierre Laurent. Ce courrier a été mentionné dès le début de la réunion. Puis Fabien Roussel l’a diffusé à l’ensemble des membres du Conseil national. L’AFP en a donné alors un résumé. Je pense donc pouvoir publier ici le texte intégral pour que chacun puisse y avoir accès sans intermédiaire.
« Marseille 10 décembre 2020
Cher camarade Fabien Roussel,
le 8 novembre dernier, comme tu le sais, j’ai proposé ma candidature pour l’élection présidentielle de 2022. Depuis, j’ai reçu les 150 000 parrainages citoyens que j’avais sollicités pour être mandaté pour cela par une investiture populaire.
Je me tourne donc vers toi comme secrétaire national du Parti Communiste dont j’ai été le candidat aux deux précédentes élections présidentielles. Une nouvelle fois, je voudrai proposer aux communistes ma candidature. Je souhaite l’appuyer sur un programme partagé et une répartition de candidatures communes aux élections législatives.
Je prends l’initiative de ce courrier en m’appuyant sur le bilan de nos deux précédentes alliances. Certes, nous aurions des erreurs à nous reprocher mutuellement. Mais quelle action d’envergure n’en comporte pas ? Et je crois que nous aurions tort de limiter à cela notre bilan d’action commune. Il est brillant. En 2012 puis en 2017 nous avons porté ensemble un programme audacieux pour changer en profondeur la vie de notre peuple. Et nous avons rassemblé autour de lui d’abord quatre millions de voix puis plus de sept millions. Ma candidature a recueilli d’abord presque 12% des suffrages en 2012 puis 19,5 % d’entre eux. Tout cela nous l’avons construit ensemble. Et cela nous créé le devoir de persévérer. Pour faire mieux, jusqu’à la victoire. Certes le moment est sombre. Dur. Dangereux. Les crises globales se superposent. Climat, finances, emploi, santé, de tous côtés les équilibres du passé se rompent sans qu’on voit du mieux s’annoncer. L’évolution autoritaire du régime macroniste fait craindre le pire. Mais n’est-ce donc pas aussi le moment où les peuples peuvent le mieux comprendre la nécessité d’une rupture profonde avec le système qui a produit ces désastres ?
Nous savons tenir bon. Nous le prouvons chaque jour.
À l’Assemblée nous animons deux groupes d’opposition actifs et reconnus. Nous y votons de la même façon dans 90 % des cas et peut-être davantage. Nous nous y concertons à chaque grande occasion. Nous sommes en discussions positives en vue d’un accord aux élections régionales. Dans les luttes sociales, nous sommes au coude à coude. Sur la scène internationale de même.
Ainsi l’histoire politique de ces douze dernières années, nos programmes, nos votes nous placent aux yeux de l’Histoire et de notre peuple dans une même famille de volonté politique.
C’est pourquoi je crois que j’ai le devoir de te faire ce courrier et ma proposition de candidature. Je la prolonge avec l’idée d’un accord sur le programme et sur des candidatures communes aux élections législatives. Ce dernier point n’est pas le moindre. En toute hypothèse, c’est sur l’adhésion à un programme que nous volons motiver les votes. Et c’est lui qui fait sens pour élire nos députés. Nous l’avions bien compris ensemble en 2012 et 2017 pour le programme. Mais nous avons commis l’erreur de ne pas nous accorder avant l’élection présidentielle à propos de législatives. Nous ne devons pas recommencer cette erreur. Surtout si nous envisageons la victoire, car il nous faudra être prêt séance tenante.
Pour conclure : je me place sur le chemin que nous avons ouvert ensemble il y a une décennie. Nous pouvons prolonger pour le bien de notre peuple et l’audience de notre pays parmi les peuples du monde pour qui notre parcours commun est un espoir. Unis, nous attirerons j’en suis certain des personnalités et des forces de la gauche traditionnelle qui s’interrogent aujourd’hui. Ainsi nous pourrions former un large arc de forces. À mes yeux, patience et persévérance sont nos atouts et notre devoir.
À toi, en camarade,
Jean Luc Melenchon