« Si vous voulez enterrer un problème, nommez une commission », disait Clemenceau. En matière de police, nous avons l’IGPN. Plus efficace qu’une commission. Composée de policiers évaluant des policiers, elle semble être surtout une machine à laver le linge sale en famille. Nul ne peut l’ignorer. Le Défenseur des droits avait dit en son temps comment tous les dossiers qu’il y envoyait y coulaient à pic. Pourtant, il aura fallu plus de vingt-quatre heures pour obtenir du parquet qu’il s’émeuve d’une violence contre une députée. Qui se chargera de l’enquête ? Pas le parquet, mais le nec plus ultra de la protection obtuse des méfaits de la police française : l’IGPN. Je signale d’abord l’ampleur des efforts entrepris pour obtenir ni plus ni moins que ce qui est de droit. En France, en 2021, cela nécessite des dizaines de tweets indignés de députés insoumis et de responsables politiques divers, un communiqué de notre mouvement et des articles de presse en pagaille.
À noter que la décision d’ouvrir cette enquête n’a pas été prise par le ministre de l’Intérieur, mais par le Parquet de Paris. Encore une fois, Darmanin ferme les yeux. Pourtant, les faits sont là. Notre député insoumise Bénédicte Taurine, ceinte de son écharpe bleu-blanc-rouge bien voyante au milieu d’une foule de paysans, est projetée à terre par un policier. Cela est confirmé par une de ces vidéos que la macronie rêvait d’interdire. Pas d’images, pas de preuves, pensaient-ils sans doute.
La situation devient très inquiétante. Il y a d’abord eu Loïc Prud’homme, matraqué par la police à Bordeaux en mars 2019. Puis il a été empêché d’accéder à l’Assemblée nationale par des policiers le mois dernier. Cette fois, un nouveau seuil a été franchi contre Bénédicte Taurine. Il faut le rappeler : un policier n’a nullement le droit d’entraver l’action des parlementaires. Encore moins de les brutaliser.
Au lieu de rendre des comptes, le préfet de police Lallement a reproché à mots à peine couverts aux parlementaires présents d’entraver une action de police et de participer à une action violente. Cela ne fait qu’encourager les éléments les plus violents à continuer leurs œuvres. Une partie des effectifs policiers a d’ores et déjà glissé sur la pente de la brutalisation de la population. À tel point que cela est désormais ancré dans l’esprit des plus jeunes. En effet, d’après un sondage d’avril 2021 réalisé par OpinionWay, 67 % des 18-24 ans déclarent ainsi que « la violence policière est une réalité en France ».
Rudoyer des parlementaires en écharpe semble être devenu un nouveau sport. Acculés par les images, il reste tout de même au préfet Lallement et au ministre de l’Intérieur Darmanin une carte dans sa manche. En effet, l’IGPN, la « police des polices », est une grande machine à noyer le poisson. Le ver est dans le fruit dès le principe énoncé : des policiers évaluent des policiers. J’avertissais déjà de l’issue dans ma dernière note de blog en ces termes : « On peut être assuré que l’IGFPN fera son boulot habituel : passer l’éponge et accabler la victime. »
Pour l’affirmer, je me fonde sur les faits. Ainsi, en 2019, l’IGPN n’a proposé que 2 sanctions sur les 378 enquêtes pour violences policières ouvertes liées au mouvement des gilets jaunes. La répression a pourtant été massive : 2500 blessés, 32 éborgnés, 5 mains arrachées.
Cet énième accès de violence connaîtra probablement la même issue. On peut déjà le lire entre les lignes des propos du Parquet. Ainsi, cette enquête aura pour but « notamment de déterminer avec exactitude les circonstances des faits au regard du contexte général de l’intervention des forces de l’ordre ». On connaît la suite. Les éléments de langage justificateurs sont déjà tous disponibles sur le twitter de la Préfecture de police. Il suffira donc désormais d’un caillou lancé ou d’un regard de travers des manifestants pour justifier les pires agissements des forces du désordre. Glaçant.
J’avertis : nous ne laisserons pas passer. Et je le redis : attendez-vous à un grand coup de balai en 2022. Cette officine obscure sera dissoute. Elle sera remplacée par une instance indépendante où de véritables experts examineront les faits à l’abri de toute pression de la hiérarchie policière.