Intervention de Jean-Luc Mélenchon à l’Assemblée nationale le 3 novembre 2021 contre la prolongation du pass sanitaire. Voici la retranscription de cette intervention :
« À force d’écouter, j’ai toujours pas compris, y compris la dernière intervention… Vous disiez : “Puisqu’on avait neuf mois maintenant on a sept mois, et c’est bien.” Pourquoi ? Pourquoi c’est bien sept mois? Pourquoi neuf mois ? Pourquoi juillet ?
Je me suis demandé ce qui se passait en juillet, à part la fin de la présidence française de l’Union européenne qui sera exercée, on ne sait pas par qui d’ailleurs, puisque entre-temps, il y a une formalité administrative qui s’appelle l’élection présidentielle.
Peut-être que c’est juillet parce que c’est le mois de Jules César et ils veulent en quelque sorte se protéger du fantôme des ides de mars. Pourquoi pas ? Mais est-ce que vous ne voyez pas à quel point progressivement – collègues, on verra bien ce que sera l’histoire après – progressivement, tout le monde s’accoutume au passage des situations exceptionnelles et des états d’urgence dans la loi la plus ordinaire. Rappelez-vous l’état d’urgence qui avait été imaginé pour faire face aux événements qui ont entouré la guerre d’Algérie.
C’était bien l’état d’urgence, c’était exceptionnel. On l’a mis en place, répété, recommencé et à la fin, le ministre est venu en nous disant : “Écoutez, on ne peut pas vivre tout le temps dans un régime d’exception, alors on le passe dans le droit commun.”
Est-ce que vous vous souvenez – non, vous ne vous en souvenez pas – de la période où le Sénat avait réussi à obtenir du Conseil constitutionnel qu’on interdise de fouiller les coffres des voitures parce que c’était une extension du domaine privé.
Aujourd’hui, quoi de plus banal que de fouiller des pieds à la tête tout le monde à n’importe quelle occasion. Est-ce que quelqu’un se souvient de la période où il n’y avait pas l’obligation de présenter sa carte d’identité à tout bout de champ ?
Maintenant, ça peut être à tout bout de champ et plus personne ne se demande pourquoi. À quoi ça sert de présenter sa carte d’identité? Est ce que cela a jamais permis d’élucider quoi que ce soit ? Non, ça ne sert à rien.
Les mesures d’exception, c’est comme les passions, ça parait toujours tout neuf à ceux qui en sont la proie. Mais la vérité et la sagesse de l’histoire consiste à se méfier des élans de cette nature et à se référer à l’histoire longue.
Le temps que prend la démocratie, ce n’est jamais du temps de trop. Il y a que les brutes qui disent le contraire. »