D’abord, j’ai cru a une blague. Mais non ! Un responsable allemand a osé proposer de transformer le siège français au conseil de sécurité de l’ONU en siège européen ! Rien de moins ! Je préfère ne pas commenter cette proposition et son auteur et je laisse mes lecteurs chercher tout seuls quels partis, en France, sont tellement d’accord avec cette proposition de la droite allemande qu’ils l’ont eux-mêmes proposée avant elle. Mais cette semaine, c’était vraiment la semaine des gags européens.
Par exemple : le Brexit ! Tout le monde sait qu’il existe un accord pour organiser la sortie de la Grande-Bretagne de l’Union Européenne. En effet les Anglais respectent leur démocratie et le vote des Anglais est respecté par son gouvernement, chose inouïe en Europe. Le texte de cet accord passe au Parlement français dans 15 jours. Il fait 650 pages, parait-il. Les parlementaires ne l’ont toujours pas reçu. De toute façon on se demande ce qu’on en ferait car il n’existe pas de version française. Juste une version anglaise. Mais avant que ce bazar ne se déclenche en France, si les insoumis ne sont pas les seuls a protester, il ya déjà un autre bon morceau à vivre. Ecoutez, vous ne le croirez pas !
Un traité est en train de s’auto-détruire. C’est le TSCG. Il est bien possible que vous ayez tous oublié cette histoire de traité TSCG. Pas moi. Donc quand j’ai reçu cette nouvelle, que je vais vous raconter, mon sang n’a fait qu’un tour. Ce TSCG c’est le fameux traité « Merkozy ». Préparé par Merkel et Sarkozy, il avait été ensuite validé par Hollande, qui avait pourtant prétendu le renégocier. Ce traité est arrivé en fin de vie légale.
Ce n’est pas rien que ce texte ! Sa principale disposition est le « pacte budgétaire », qui oblige les 22 États signataires à adopter une règle d’équilibre budgétaire corrigé des variations conjoncturelles. Il fixe une limite inférieure incroyable de « déficit structurel » au niveau de 0,5% du PIB. Cette règle de fer absurde a été obligatoirement transposée dans le droit interne de tous les États signataires. Mais ce texte prévoyait une limite dans le temps à l’application de ses règles. Ça, je l’avais oublié totalement, je l’avoue. Pourtant cette limite juridique du TSCG est bel et bien inscrite à son article 16 : « dans un délai de 5 ans maximum à compter de la date d’entrée en vigueur du présent traité, sur la base d’une évaluation de l’expérience acquise lors de sa mise en œuvre, les mesures nécessaires sont prises conformément au Traité de l’Union européenne, afin d’intégrer le contenu du présent traité dans le cadre juridique de l’Union européenne ». Le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union Économique et Monétaire (TSCG) a été signé le 2 mars 2012. Il est rentré en vigueur le 1er janvier 2013. Donc le délai de vie juridique prévu est dépassé.
Affolée, la Commission a donc proposé une directive transposant les dispositions du fameux TSCG dans le droit communautaire ordinaire. La directive est passée devant la Commission des Affaires Économiques et Monétaires du parlement européen ce 27 novembre 2018. Patatras ! Cette Commission a rejeté la proposition de directive ! Hourra ! Tout est bloqué ! Le rejet par la commission parlementaire compétente entraîne l’impossibilité de présenter le texte à la plénière du Parlement européen. Impossible de contourner le refus de cette Commission ! Alors ? Les règles du TSCG vont-elles être intégrées ou non dans le droit communautaire ? Rien n’est moins sûr dans le nouveau contexte. Il existe donc une probabilité de vide juridique sur l’application effective du TSCG.
Certes, ses règles sont intégrées au droit national des pays membre de la zone euro puisque tous ont adopté ce traité. Mais le moment venu, on sait que tel ou tel état peut dire « stop » et crier son ras-le-bol des cures d’austérité auxquelles le traité assigne chaque pays. Aujourd’hui, les dogues de la Commission montent aussitôt en ligne pour réprimer le retour de volonté d’autonomie d’un des peuples aujourd’hui enfermé dans la camisole de force du traité. On vient de le voir avec l’Italie. Mais demain, dans le nouveau contexte, comment un État pourrait-il être sanctionné au niveau européen, en cas de non-respect de la règle absurde des 0,5% de déficit structurel ? Voila ce qu’on ne sait pas ! Ce désordre aggrave l’ambiance de fin de partie de cette période où les traités allemands tombaient comme à Gravelotte et que tous les pays adoptaient sans discuter. C’est une excellente nouvelle. Le terrain est mûr pour que la « sortie des traités » commence tout simplement par la disparition de traités…
C’est une manière de dire. Car le traité de fonctionnement de l’Union reste là, bien sûr. Celui là, c’est le traité de la honte pour les Français puisqu’il correspond à une réécriture du texte rejeté par les Français en 2005 mais adopté quand même par le Parlement à Versailles. Quoi qu’il en soit, tout l’édifice juridique est désormais bancal. Au risque de vous lasser et peut être de perdre votre attention, il faut quand même que je dise pourquoi…
Ce TSCG désormais en vie suspendue prend place dans toute une construction sophistiquée de réglements et dispositions de toutes sortes dont il est la plateforme de connexion en quelque sorte. En effet le TSCG a été conçu en complément de règlements aux noms abscons : le « two pack » et le « six packs », deux monstres de confiscation de la souveraineté des peuples. Pour votre culture, je résume en gros ce que sont ces deux machins. Le « two-pack » c’est un texte qui organise la surveillance budgétaire des pays, les transmission d’informations régulières à la Commission, la police du suivi/évaluation/correction des déficits excessifs et qui fait obligation de présenter des plans de réformes structurelles à la Commission. Il est entré en vigueur en 2013. De son côté le « six-pack » est une autre camisole de force qui oblige à des objectifs de réduction de la dette publique. Il comporte une réforme du Pacte de Stabilité, la création des procédures du « semestre européen » et la mise en œuvre des sanctions en cas de non-respect des engagements. Saoulant n’est-ce pas ? Retenons l’essentiel à cette heure : la principale machine de guerre contre la souveraineté des États est encalminée jusqu’aux essieux.