Madame Loiseau, tête de liste de la Macronie aux européennes, est allé à la Réunion. La population de ce département dans l’Océan Indien est une des plus politisées de France. On ne la lui fait pas. « La République en marche » y est donc très mal cotée car ses mensonges y sont très mal vécus. Un mouvement « gilets jaunes » extrêmement actif a paralysé l’île pendant de longs jours d’intenses mobilisations populaires. C’est dire qu’il existe sur place une conscience politique éveillée et vigilante.
Ce genre de possibilité n’est jamais pris en compte par les stratèges des états-majors lointains du genre de celui des macronistes. Au dernier moment, en réalisant l’état de détestation qui entoure la Macronie officielle, les comparses de madame Loiseau se sont donc dit qu’une petite gesticulation affective ferait du bien à l’image de ces gens si mal aimés. Hop ! Voilà comment une petite messe des rameaux s’est installée dans le programme officiel des déplacements de madame la tête de liste ! Ridicule récupération d’une fête chrétienne de la part de quelqu’un dont le programme, le gouvernement et les référents représentent davantage la « profitation » (comme disent les Guadeloupéens) que les vertus de partage du christianisme. De plus, en campagne électorale, et plus encore quand on représente le parti au pouvoir, participer officiellement à un office religieux c’est une idée très mal venue et mal acceptée de tous à juste titre.
En effet l’esprit laïque veut que chacun se fasse un devoir d’incarner des idées mais de ne s’identifier à aucune religion, orientation sexuelle, couleur de peau, philosophie dont aucune idée politique ne saurait se réclamer. Les chrétiens de l’île n’ont d’ailleurs pas été enthousiasmés par cette intrusion ostentatoire qu’ils ont jugée mal venue, y compris ceux qui votent « La République en marche ». J’ai cru comprendre que d’autres éminences de la Macronie n’ont pas apprécié non plus cette pointe de bigoterie publique. Madame Loiseau s’est donc rendue compte qu’elle avait fait une boulette. Aussitôt, la mention de la messe fut retirée du programme des éditions en ligne suivant celle qui avait déjà été distribuée.
Mais qui lui a dit de venir nous chercher querelle et de faire polémique ? Merci madame ! Ceux qui n’y avait pas porté attention ont donc pu s’y intéresser. Madame Loiseau prétend que la liberté de croire ou de ne pas croire est mise en cause par ma remarque ! La pauvre ! Naturellement il n’en est rien. Décidément, ils ne connaissent rien non plus au maniement de cette question de la laïcité. Après le coup du SMIC rabaissé au niveau du seuil de pauvreté que madame Loiseau avait déjà annoncé sans précaution ni connaissance du sujet, la voici à confondre séparation des Églises, de l’Etat et du politique, incontournable en République laïque avec la tolérance non moins impérative comme vertu privée.
Résumons. Madame Loiseau croit ce qu’elle veut, elle pratique comme elle le veut, personne ne lui reproche rien à ce sujet. En tous cas pas moi. En fait, personne ne s’y intéresse car 60% des Français n’ont aucune religion. Mais comme candidate, comme élue très probable, comme membre du parti au pouvoir, comme ancienne ministre, elle ne doit pas donner un rôle ostentatoire particulier à une religion quelle qu’elle soit. Ce qu’elle a pourtant fait par sa participation à une messe annoncée en public et par l’invitation à la rejoindre à cet office.
Mais si madame Loiseau veut faire la maline à propos de son droit de croire et de pratiquer, il lui reste aussi à apprendre que le contenu de la foi chrétienne ne se limite pas, comme dans la vieille religion des romains antiques, à la pratique des rituels, fusse la messe elle-même ! Je l’invite à lire l’encyclique « Laudato Si » du pape actuel. Elle y trouvera dès les premières lignes une injonction à exiger l’arrêt immédiat du glyphosate et l’interdiction de produire les pesticides que son gouvernement a autorisé à fabriquer pour l’export alors qu’ils sont interdits en France.
Et ensuite, elle pourra méditer les paroles du pape en faveur de « l’option préférentielle pour les plus pauvres ». Comme elle va à la messe elle sait ce que ce concept a généré dans l’Église catholique et spécialement dans celle d’Amérique latine et la place particulière de la plume du pape actuel dans les premiers textes sur ce thème. Si elle ne le sait pas, qu’elle se le fasse expliquer. En tous cas, « l’option préférentielle pour les pauvres » suggère sans erreur de renoncer à l’abaissement des APL et des petites pensions, par exemple. Si cette référence lui parait trop latino pour encombrer ses prières, je lui recommande très modestement mon discours à la Fête de l’humanité en 2015 qui était bâti sur le thème des domaines dans lesquels la pauvreté se réalise et le petit chapitre de L’Ère du peuple qui s’y rapporte.
Mais pendant qu’elle y est, elle pourra aussi s’inspirer des paroles du pape quand il invite « à forger des alternatives à la fois critiques et constructives pour nettoyer nos démocraties fragiles et ouvrir l’espace pour réinventer de nouvelles instances représentatives d’origine populaires ». Cela veut dire que le RIC dans ses diverses déclinaisons, mérite mieux que les mauvaises paroles prononcées par tous les chefs de la Macronie.
Bref, en christianisme comme en républicanisme, les macronistes sont des Tartuffes qui gesticulent, récupèrent sans vergogne et profanent tout goût pour l’authenticité et les convictions sincères. Ce sont des Tartuffes, c’est-à-dire des hypocrites. Sans cesse occupés à dire des choses et à faire le contraire. Aller à la messe au son des tambours et trompettes puis faire les poches des pauvres pour remplir celles des riches en est un exemple. Rendez l’ISF, madame Loiseau, car le paradis de riches est l’enfer des pauvres, et cela n’est pas chrétien !