Voilà des jours intenses s’il en est. À nos portes, l’Algérie en révolution pacifique envers et contre tout. Et le Royaume-Uni en Brexit de masse. Ici, en France, le pays est entré en ébullition sociale. Vaille que vaille, le fond de tableau est le même. Le peuple est de retour sur la scène de l’histoire politique. Le dégagisme domine la scène.
Après l’énorme vague du 5 décembre, celle du 17 décembre qui vient va balayer le pays jusque dans ses recoins les plus éloignés des chefs-lieux. Et ensuite, rien ne sera plus pareil dans les esprits. Car une telle expérience ne se vit pas sans en être transformé. L’extension du mouvement se constate dans tous les aspects de ce qui se voit. La mobilisation et la détermination sont présentes partout. En force. Exemple : il y avait autant de monde dans les rues de Lons-le-Saunier (Jura) qu’il y en avait le 13 mai 1968 au début de la grève générale. Toutes les générations s’engagent. Les retraités sont souvent en première ligne dans les cortèges de leurs corporations. Et les jeunes ! Du lycée à la fac et dans l’entreprise. Ils sont là. Les jeunes pères et mères de famille aussi sont parmi les plus déterminés.
La forme d’expression et le contenu des prises de parole correspond à un haut niveau d’information et de capacités pédagogiques. On voit, on entend que tout le monde a été à l’école bien plus longtemps que ceux que je croisais il y a trente ans dans ce type de bagarre. Les 80% de la classe d’âge au niveau du bac sont là. Tout cela ne se contente pas de se juxtaposer. Cela commence à s’additionner. À la gare de Lyon, à l’AG SNCF, j’ai noté la présence des agents RATP aux côtés des cheminots. Un fait sans comparaison depuis au moins vingt ans (mémoire des présents sur place). À Marseille, chez les portuaires, j’ai appris la même chose : des profs sont venus, des étudiants. Ceux du port sont allés à l’AG des cheminots à Saint Charles.
J’ai connu il y a très longtemps tout autre chose c’est-à-dire un bien rude cloisonnement. À l’époque, les corporations se sentaient invincibles. Du coup chacun campait dans son coin. Et les syndicats autant que les partis présents dans les entreprises n’aimaient pas trop ce genre de visites mutuelles. C’est du passé à présent. On dirait que sur le terrain se réinventent des choses élémentaires qui étaient là au début du mouvement ouvrier.
À Marseille on a parfois la dent dure. Mais ici cette fois-ci, le « camarade député Mélenchon » fut accueilli en familier. On parla de tout, avant et après les prises de parole officielles. À un moment, je me suis trouvé à bavarder sur le sens de la vie avec des hommes qui avaient un peu de cheveux blancs. Ils philosophaient : a-t-on les mêmes chances dans la vie ? Peut-on toujours se donner les moyens de faire mieux socialement ? Ils évoquaient des conversations de famille, des échanges avec d’autres qui leur disputaient le droit de grève. J’ai appris des arguments et des tours de phrases. Assis sur le banc en mangeant le méchoui préparé par le piquet de grève. Qui aurait dit que je rencontrerais ces hommes si profonds ? Et comment prévoir que, si simplement, on se serait mis à parler aussi facilement de ce qui compte et nous motive dans la vie ?
Cet épisode personnel confirme ce que l’on savait depuis les ronds-points gilets jaunes. Dans ce genre de moment on parle beaucoup, on échange beaucoup. De nouvelles visions du monde se construisent dans ces échanges. La parole organise celui qui la prononce et enrichi qui la reçoit. Le soir à la fin de ce jour- là, Kamel, l’indomptable délégué des Mac Do de Saint-Barthélémy, racontait la fermeture de son Mac Do qui jette à la rue tant de familles. À la fin il conclut sur « le plus important ». Il dit que « le plus important dans une personne » c’est qu’elle « est un être humain comme l’autre, comme toi ». Et que « le plus important c’est de ne jamais renoncer à sa dignité ». Je restais bouche bée devant ce grand gaillard si émouvant qui nous a donné une leçon de vie en même temps qu’une leçon de lutte de classe.
La lutte n’est jamais seulement un moment de crise. Elle reformate ceux qui y participent. Elle reformule leur perception de soi et du monde. Le 17 décembre, des millions de gens vont se voir en masse et se sentir forts. Personne ne pourra effacer l’empreinte de ce sentiment de puissance, quoi qu’il arrive, quoiqu’il se trame dans les coulisses du gouvernement. Et la suite des évènements, de la volonté qui s’exprimera pour les jours suivants, va se construire dans cette journée comme une cornue. Telle est la chimie des mouvements de masse.
En toute hypothèse, le blocage des raffineries et des centres de distribution des carburants va faire sentir son effet dans les tous prochains jours. Cela veut dire que les conséquences économiques de la grève vont devenir des faits sociaux du quotidien. Encore une expérience qui va réorganiser les mentalités. Que Macron l’ait compris ou pas, ce qu’il a enclenché dans les esprits ne se rembobine pas. Et plus il se réfugie dans l’illusion de l’arrangement rusé qui lui permettra de faire avaler la pilule, plus il s’entêtera et construira une nouvelle conscience populaire. Au passage ses copains les riches et les grands patrons vont payer une bonne ardoise de manque à gagner. Pour quel résultat ?
J’ai été sollicité de tant de manière ces deux semaines que j’en ai déserté ce clavier. Je veux dire que j’y suis venu sans jamais pouvoir conclure un ensemble de lignes qui me satisfassent. Je réduis donc mon ambition et je m’en tiens quelques thèmes. L’un explique sur un aspect peu connu et commenté de la réforme de la retraite qui fait encore un somptueux cadeau de plusieurs milliards aux fonds de pension et aux « entreprises ». L’autre publie le délibéré à propos des indemnités versées aux policiers partie civiles, seul document issu du jugement qui m’a condamné avec nos camarades au procès de Bobigny. Le suivant, c’est à propos de l’habillage en vert de la politique de la Commission européenne. Le dernier, pour la rosserie, fait le bilan de la situation de Guaido le président autoproclamé du Venezuela et reconnu par Macron qui s’avère être un corrompu notoire, lié aux narcos. Et « bim dans ta face » à la macronie qui bêle ses Venezuélaaaaa à toute occasion et soutient le putsch fachiste de Bolivie.
Sentir le souffle de ce moment politique m’aide à supporter l’infâme bashing qui se mène désormais en permanence contre moi. A chaque occasion, un mot toujours extrait de son contexte sert de point de départ à de pures affabulations. Sans recul, sans objectivité, l’égout médiatique crache ses effluves sans gêne ni retenue. C’est partout pareil dans le monde. Et partout dans le monde des manifestants vont aux portes des grands médias dire leur amertume. La semaine passée, la bête s’affolait dans l’odeur du sang. Que choisir pour nuire et faire du buzz ? Le procès ? L’accusation d’être un suppôt de Le Pen ? Contre toute raison et toute honnêteté, une semaine je suis peint en islamiste, la semaine d’après en lepéniste, celle suivante en antisémite et chaque fois c’est le même mécanisme des reprises et des commentaires sans fondement. Je ne mentionne tout cela que pour donner un conseil à mes amis : ne commentez pas ce qu’un « journaliste » vous dit que j’ai dit. Ne faites pas comme eux. Vérifiez d’abord.
Pendant qu’il débite des mensonges contre les régimes spéciaux des petites payes, Macron créé un nouveau régime de retraites pour les grosses payes. Mais ce n’est pas sûr que ça leur profite non plus. Car il sera financé par l’ensemble des contribuables. Une autre conséquence de ce dispositif c’est le manque à gagner que cette faveur va entrainer pour les caisses de retraites. Et cela au moment même où il est question de lutter contre un éventuel déficit de celle-ci. Au total, c’est un somptueux cadeau supplémentaire fait au patronat : une somme supérieure à l’abolition de l’impôt sur la fortune. Et un beau trou dans la caisse de 7 milliards par an au total.
Premier volet : le nouveau régime spécial grosse paye. En effet dans la loi PACTE votée il y a quelques semaines, il y a du neuf. Ceux qui cotiseront pour une retraite dans une assurance privée pourront déduire de leurs impôts le montant de leurs cotisations. Génial non ? Ce qu’ils ne paieront pas devra bien être payé par quelqu’un. C’est prévu : tous les autres contribuables passeront à la caisse. Ou bien sinon ce sera des services publics en moins. Ce nouveau régime spécial payé par les contribuables sera en fait quasi obligatoire si les cadres veulent maintenir leur niveau de revenu à la retraite. Ils paient dès maintenant, cela va de soi. Donc pour avoir de l’argent demain ils auront moins de pouvoir d’achat aujourd’hui. Une mesure qui va aggraver le ralentissement de l’activité économique. Pour compenser cette mauvaise affaire d’aujourd’hui, Macron fait un deuxième cadeau qui sera donné après-demain quand les heureux cotisants arriveront à l’âge de payer leur pension. En effet il a décidé que les pensions acquises de cette façon seront dispensées d’impôt pour 70 % de leur montant. Encore un cadeau à la charge de l’ensemble des contribuables. Les bénéficiaires de ces trouvailles devraient se demander à quel prix ils les payent vraiment. Ce qu’ils reçoivent d’une main ils le payent maintenant comme contribuables ou usagers des services publics de l’autre. Toute la classe moyenne supérieure ferait bien de se demander ce qu’elle gagne dans un système ou l’éducation de ses enfants, la santé de la famille et la retraite tout privé coûte autant. Le service public et la solidarité étaient plus économiques.
Et maintenant voyons l’autre volet de ce système c’est-à-dire ce qu’il va couter aux caisses de retraite. Reprenons : au-dessus d’un salaire annuel de 120 000 euros brut, la réforme « libère » 28.29% de cotisations qui ne seront plus versés au régime général. Total 7 milliards d’euros. Je viens de dire que c’est une façon de pousser les cadres et leurs milliards de cotisations les bras de « BlackRock » et des fonds de pensions. Mais ce n’est pas la seule arnaque non dite de cette réforme. Car sur ces 28.28% de cotisations sur le brut (qui font 7mds /an), 60% sont en fait des cotisations patronales et 40% seulement sont des cotisations salariales. Première conséquence : en ne payant plus ces cotisations, les cadres ne vont gagner que 11.3% (28.29 × 40%) en salaire net et encore moins en pouvoir d’achat puisqu’ils paient des impôts sur leur salaires. Après impôts, les cadres ne vont donc recevoir qu’environ 1,3 milliards à placer, s’ils le veulent, chez les « BlackRock » et consorts.
Les « entreprises » de leur côté vont empocher 16.9 % du gain. Un effet non négligeable : le prix réel du travail pour tous ces salariés payés au-dessus de 120 000 euros annuels va baisser d’autant. Une part plus importante de la plus-value produite retourne dans la poche de l’actionnaire. Le total a été chiffré en interne par l’AGIRC ARCO. Ça représente 4.2 mds d’euros par an offerts aux entreprises qui ont des très hauts salaires.
La voilà la vraie arnaque ! Un cadeau égal à une fois et demi l’impôt sur la fortune déjà supprimé. Un cadeau égal à 20% du Crédit Impôt compétitivité emploi offerts aux entreprises qui ont des très hauts salaires. Champagne chez Total, Atos, Sanofi et, surtout, dans les banques les assurances et autres secteurs de financiers.
Autant de nouvelles liquidités qui trouveront un accueil chaleureux dans les fonds de pension et les instituts prévoyance.
Mais le pire pour nous tous c’est que, à partir de 2025, le régime général de retraite perd de son côté 7 milliards d’euros tous les ans.
Ce qui veut dire que pour la période réputée chaude pour les comptes de ces caisses, c’est à dire entre 2025 à 2040, il leur en coûtera plus de 70 milliards d’euros cumulés. Ce qui creusera d’autant le déficit que cette réforme était justement censée combler.
Ce n’est pas fini.
Ceci s’ajoute à la suppression d’une autre cotisation sociale (CET/CEG). Elle permet de payer les droits solidaires (maternité, famille, chômage…). Elle rapporte chaque année près de 3 milliards d’euros.
Nouveau déficit 45 milliards cumulés pour la période 2025 à 2040.
Contrairement au discours racoleur du gouvernement, sortir 10% des cadres du système par répartition est tout sauf une mesure de « justice sociale ». C’est un énorme cadeau à la finance qui sera cher payé par l’ensemble des salariés.
Le 11 décembre, la nouvelle présidente de la Commission européenne présentait un projet de « pacte vert ». Elle ouvrait ainsi la première étape d’une bataille que les insoumis vont porter dans les prochains mois, au Parlement européen et à l’Assemblée nationale. Écologie populaire contre écologie de marché. Le plan présenté par la Commission européenne repose évidemment sur la métaphysique de la main invisible du marché. Une confiance aveugle des libéraux qui fonctionne comme une hallucination permanente. Ursula Van Der Leyen ne prévoit donc d’aucune façon de remettre en cause le libre-échange. C’est pourtant par là qu’il faudrait commencer. L’augmentation constante du transport de marchandises par bateau ou par avion n’est pas compatible avec l’extinction progressive de nos émissions de gaz à effet de serre. Le « deal » de la commission européenne se borne à proposer quelque chose qui existe déjà : l’inclusion d’un chapitre « développement durable » dans les accords commerciaux. Le CETA, avec le Canada, contient ce type de chapitre de bonnes intentions. Cela n’a pas empêché l’un des premières conséquences de ce traité d’avoir été l’augmentation de 50% des importations d’hydrocarbures canadiennes à effet de serre en Europe.
Sur le plan de la production interne, le document de la Commission continue dans la logique cynique du marché carbone. Son principe ? Vendre aux entreprises des droits à polluer qu’elles peuvent ensuite s’échanger entre elles. C’est n’avoir rien compris à la situation : 80% des hydrocarbures doivent rester sous la terre si on veut avoir une chance de limiter le réchauffement climatique. Il ne faudrait donc pas permettre d’acheter la possibilité d’émettre des gaz à effet de serre mais changer les procédés de production pour arrêter ces émissions. Le marché carbone européen aboutit à des résultats ubuesques. Ainsi, l’industrie du ciment est actuellement responsable de 8% des émissions carbones à échelle mondiale. Pourtant, en Europe, le marché des droits à polluer permet aux cimenteries de faire un profit de 5 milliards d’euros par an.
Sur les transports, l’hypocrisie du projet de Van Der Leyen est au paroxysme. En apparence, elle fixe un objectif ambitieux : faire passer 75% du transport routier vers le rail. Mais qui dans les deux dernières décennies a détruit les entreprises publiques du rail en Europe, au bénéfice d’un report sur la route ? C’est l’Union européenne et ses directives de mise en concurrence. Or, il n’y a pas la moindre critique sur ces directives, ni surtout le début d’un recadrage. En France, en 2006, le fret ferroviaire a été ouvert à la concurrence sur injonction européenne. Depuis, la part du rail dans le transport de marchandises a reculé de 20%. La main invisible du marché n’est pas capable de faire passer des milliers de camions sur des trains. Mais elle sait faire l’inverse comme le montre l’exemple français. Cela suppose une planification et donc, des outils puissants à disposition de l’État comme le monopole sur le rail.
Même les objectifs ambitieux affichés par la Commission pour faire la propagande de son plan cachent des entourloupes. Ainsi, elle propose la « neutralité carbone » de l’Union européenne en 2050. Ce concept permet en théorie de compenser certaines émissions par des techniques de séquestration et de captation du carbone. Mais ces techniques pour l’instant ne sont pas au point. Qui est capable de dire quand elles le seront ? Elles jouent plutôt le rôle de prétexte pour les gros pollueurs qui ne veulent pas réduire leurs émissions. On sent ici la patte de la droite allemande sur le projet. Pas question pour Ursula Van der Leyen de taper trop durement les mines de charbon de son pays. Les députés européens France insoumise défendent un autre objectif, plus clair : 100% d’énergies renouvelables en Europe d’ici 2050. Ce qui implique pour l’Allemagne de sortir du charbon et pour la France, de sortir du nucléaire.
La condition sine qua non pour suivre une telle trajectoire est de jeter à la poubelle les règles budgétaires imposées par les traités européens aux États. Mais bien sûr, de cela, il n’est pas question. On note au passage encore une fois le peu d’influence de Macron. Il a quand même déclaré il y a à peine un mois dans « The Economist » que « la règle des 3% appartient au siècle dernier ». Mais apparemment, la présidente de la Commission européenne n’en a rien à faire. Elle reste accrochée aux règles de l’austérité permanente pour l’Union européenne. Mais pouvait-il vraiment s’attendre à autre chose en acceptant la candidate de Merkel pour ce poste ? Toujours est-il qu’il manque 30 milliards d’euros d’investissements par an dans la transition écologique, rien que pour la France. Et cela pour être seulement au niveau des accords de Paris. Ce qui n’est pas non plus le top niveau.
Les députés européens insoumis ont, dans leurs interventions au parlement de Strasbourg, dénoncé ce pacte de l’écologie de marché. Le groupe dont ils font partie a fait de nombreuses contrepropositions dont l’instauration d’un protectionnisme solidaire, la fin des directives de libéralisation dans le domaine de l’énergie, la réforme de la politique agricole commune. Manuel Bompard a été à l’initiative d’un large colloque sur une politique industrielle de planification écologique en Europe. Nous menons cette bataille aussi en France, à l’Assemblée nationale. Mathilde Panot et Danièle Obono présenteront l’année prochaine un « pacte des jours heureux ». Contrairement à Macron et Von der Leyen, il sera basé sur les principes de l’écologie populaire. Pour faire la conversion de nos systèmes de production, de consommation et d’échange, nous avons besoin de plus d’État, de plus de solidarité, de plus d’entraide. Le but est de parvenir au plus tôt et au plus clair à une confrontation de projets qui soit le cœur du débat. Face à la catastrophe du réchauffement climatique quelle logique : tous ensemble ou chacun pour soi ?
Six jours après ma condamnation, je n’ai toujours aucun texte du délibéré sur le contenu du jugement qui me concerne. Je sais que j’ai pris le maximum de ce que demandait le procureur représentant Nicole Belloubet. Plusieurs de mes co-inculpés ont reçu leur jugement. Ils découvrent avec étonnement qu’ils sont relaxés de plusieurs des motifs de leur présence au tribunal. Le juge ne l’a pas dit en nous notifiant nos condamnations. C’était son devoir pourtant je crois. Nous n’avons donc pas pu faire valoir cette circonstance accablante pour Belloubet dans nos réactions devant la presse dans les jours qui ont suivi. C’est un procédé déloyal. Il confirme l’objectif essentiel du procès politique : faciliter le travail du pilori médiatique qui s’est immédiatement mis en place. Souvenons-nous que toute cette affaire n’existe que par certaines images de l’émission « Quotidien ». Qu’en ces temps de manif et de jugement à la chaine chacun se le dise : une caméra de « Quotidien » peut vous mener au tribunal. Eloignez vous dès que vous en voyez une.
Nos avocats n’ont reçu aucune notification non plus. Par contre les parties civiles ont été soignées avec respect. En effet le juge Benoît Descoubes ne s’est pas contenté de nous condamner lourdement pour avoir crié sur notre palier. Il a soulagé avec empathie les souffrances de nos victimes. Car les « parties civiles », juges et policiers responsables du désastreux déroulement de la perquisition au siège des insoumis ont demandé d’importantes indemnités pour compenser leurs souffrances.
Vous avez été nombreux, chers habitués de ce blog, à vous être inquiétés pour la santé de ces policiers traumatisés par notre comportement. Car vous appris avec stupeur qu’ils avaient eu jusqu’à sept jours d’arrêt de travail en raison de nos décibels excessifs. Certains ont eu des cauchemars attestés par un expert. Ils ont même eu un « état de stress » et de mauvaise « humeur » en relation avec ce traumatisme. Il est vrai que je ne mesurais pas le caractère glaçant de mes propos : « Ma personne est sacrée ! », « La République, c’est moi ». J’ai dit à la barre du tribunal que j’étais désolé de leur avoir causé une telle souffrance. Dupont-Moretti a déclaré que c’était là une moquerie méprisante. Pas du tout. Je pensais aux souffrances au travail de milliers des nôtres aux urgences à l’hôpital, dans le chemin de fer, dans le bâtiment et ainsi de suite, aux 565 morts au travail par an. Mentalement je comparais et je me disais que peut-être on pourrait trouver quelque chose pour obtenir à leur avantage des indemnités comme celles-là.
Vous serez pleinement rassuré en lisant le texte du délibéré qui nous condamne à leurs verser de grosses sommes réparatrices. Ce texte est livré ici sans commentaires. Les vôtres suffiront. Le président de ce tribunal s’appelle Benoît Descoubes, un nom que vous aurez à cœur de garder en mémoire chaque fois que vous voudrez affirmer votre « confiance dans la justice de mon pays ». Les procureurs porte-parole de madame Belloubet dans ce grand moment de justice étaient Phillipe Bourrion et Juliette Gest. Leurs réquisitions ont été entendues à la lettre pour ce qui me concerne. Si bien que madame Belloubet peut être contente : bon tableau de chasse. Poursuivis en partie civile par ceux qui sur ordre nous ont envoyé directement au tribunal correctionnel, suivie à la lettre dans ses demandes, elle peut aussi se réjouir de voir tout un tas de gens qui vont passer une joyeuse Noël pour avoir bien obéi. Nous allons de notre côté emprunter pour pouvoir faire face à l’ardoise finale de plus de 30 000 euros à distribuer à nos victimes. Sans compter les amendes et les frais de justice. Quant à vous, contribuables, vous êtes heureux de savoir que cette action et les deux jours de procès ont couté environ 150 000 euros au trésor public.
Bien joué Belloubet ! Un beau feuilleton médiatique. Et taper et taper encore au portefeuille pour mener son combat politique, c’est tout un programme. Nos plaintes contre ceux des indemnisés qui ont jeté à terre des camarades provoquant des côtes cassées et autres dols n’ont été nullement prises en compte. L’IGPN, cet organisme de policiers qui jugent d’autres policiers a dit que tout était normal. Le juge ne s’est pas étonné : pourquoi ne retrouver incriminées aucune des personnes ainsi jugulées ? N’étaient-elles pas censées avoir mis les policiers en danger ?
Bref. Justice est faite telle qu’elle est dans ce pays à cette heure. Le procès politique a eu lieu. Nous sommes condamnés. Tout est dans l’ordre. Le moment venu, si nous sommes victorieux électoralement une commission « Vérité et Justice » sera constituée sur le modèle de ce qui s’est fait la fin de certains régimes autoritaires. On verra plus clair sur ce qui a permis cette dérive. Il faudra établir les responsabilités personnelles, clarifier les mécanismes qui l’ont rendue possible. D’ores et déjà une commission d’enquête a été constituée à l’Assemblée nationale à l’initiative des Insoumis pour identifier les causes qui perturbent l’indépendance politique et matérielle de la justice. Les auditions se déroulant sous serment, on peut penser que beaucoup de témoins hésiteront à mentir. Mais ce n’est pas certain car ils savent qu’ils seront couverts par les réseaux de Belloubet comme l’a montré l’abandon des poursuites contre les responsables du cabinet de l’Élysée poursuivi par la commission d’enquête du Sénat à laquelle ils avaient menti sous serment.
Dans cette affaire et dans ce contexte c’est l’intérêt du pays tout entier de concourir au travail de cette commission dont le but est de contribuer à avoir une Justice digne d’un état de droit républicain. Et dont nous n’ayons pas honte. Mais pour l’instant nos noms s’ajoutent donc à la liste des 3 000 personnes jugées séance tenante pour crime de gilet jaunes dont 1 000 condamnés à de la prison ferme, aux éborgnés et mutilés qui doivent à Nicole Belloubet leur condamnation et aussi l’impunité de leurs agresseurs couverts, protégé et encouragés par le silence approbateur de la ministre. Et maintenant bonne lecture.
« A rejeté la demande de renvoi formulée par le ministère public et joint les incidents de procédure au fond.
Rejette l’ensemble des incidents et inconditionnalité soulevés ;
Sur l’action publique :
Monsieur Manuel BOMPARD : coupable, amende de 7000€
Monsieur CORBIERE : relaxe
Monsieur LACHAUD : coupable, 6000€ d’amende
Monsieur MELENCHON : coupable, 3 mois d’emprisonnement avec sursis et 8000€ d’amende
Monsieur Bernard PIGNEROL : coupable, 8000€ d’amende
Madame Rozenfeld : coupable, 2000€ d’amende
Sur l’action civile :
Sur la réparation des préjudices :
Solidairement à l’encontre de Manuel Bompard, Bastien Lachaud, Jean-Luc Mélenchon, Bernard Pignerol, Muriel Rozenfeld :
1) Madame Pelen sollicite 1€ de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral. Il sera fait droit à cette demande
2) Madame Pesse sollicite 1€ de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral. Il sera fait droit à cette demande.
3) Monsieur Marilly sollicite 1€ de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral. Il sera fait droit à cette demande.
4) Monsieur Frederic VIDAL sollicite la condamnation solidaire des personnes condamnées à lui payer la somme de 5000€. L’expert relève un état de stress avec des troubles du sommeil et de l’humeur. Mais il ne détermine aucune incapacité de travail. En conséquence, le tribunal fixe à 1500€ de dommages et intérêts le montant de la réparation de son préjudice moral.
5) Monsieur Maxime Cuby sollicite la somme de 5000€ en réparation de son préjudice. Il présente selon l’expert deux jours d’incapacité de travail psychologique en raison d’un « état de stress avec retentissements sur l’humeur, des troubles du sommeil avec cauchemars en relation avec les faits subis ». En revanche, son exposition répétée dans les médias n’est pas directement causée par les faits mais relève de la responsabilité des médias concernés. En conséquence, son préjudice sera réparé à hauteur de 3000€ de dommages et intérêts.
6) Monsieur Elvis Bonan demande au tribunal de condamner solidairement messieurs Mélenchon, Pignerol, Lachaud, Bompard, et madame Rozenfeld à lui payer 5000€ de dommages et intérêts. Il présente une incapacité de travail physique de 1 jour et de 7 jours pour l’incapacité totale de travail psychologique. Selon les constations médicales, il souffre d’une érosion de 2 centimètres sur 1 centimètre sur le bras droit et d’un important retentissement psychologique selon l’expert. Compte tenu des conclusions de l’expert : « Au total, la personnalité de Monsieur Bonan Elvis relève des traits sensitifs, des traites psychasthéniques, sans relations avec les faits subis », et de la relaxe de Monsieur Alexis Corbière, le préjudice de Monsieur Bonan sera réparé à hauteur de 3000€.
7) Madame Marie-Christine Andrieu sollicite la condamnation solidaire de messieurs Mélenchon, Pignerol, Lachaud, Bompard et madame Rozenfeld à lui payer 3000€ de dommages et intérêts. Mais, en l’absence d’incapacité totale de travail médicalement constatée, son préjudice moral sera réparé à hauteur de 2000€ compte tenu de la bousculade subie.
8) Madame Louyat présente la même demande. Le tribunal condamne messieurs Mélenchon, Pignerol, Lachaud, Bompard et madame Rozenfeld à lui payer solidairement la somme de 3000€ de dommages et intérêts compte tenu de l’incapacité de travail de deux jours médicalement retenus.
9) De la même manière, Monsieur Esbelin sollicite la somme de 3000€. En l’absence d’incapacité totale de travail médicalement constatée, le montant de la réparation de son préjudice sera évalué à 1500€ de dommages et intérêts.
10) Monsieur Montmory demande également la condamnation de messieurs Mélenchon Pignerol, Lachaud, Bompard, et madame Rozenfeld à lui payer 3000€ de dommages et intérêts. Mais, en l’absence d’incapacité totale de travail médicalement constatée, son préjudice moral sera réparé à hauteur de 2000€ compte tenu des contacts physiques subis.
11) Monsieur Guimard présente la même demande. S’il est retenu en ce qui le concerne une incapacité totale de travail psychologique de trois jours, il déclare lors de ses auditions qu’il ne s’est pas senti blessé et qu’il ne se souvenait pas de la clé de bras de monsieur BOMPARD. Compte tenu de ces éléments la somme de 2000€ de dommages et intérêts lui sera attribuée.
12) Madame Clotilde Objois sollicite 1€ de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral. Il sera fait droit à cette demande.
13) Monsieur Benjamin Bredon demande la réparation de son préjudice à hauteur de 3000€. Mais, en l’absence d’incapacité totale de travail et la médiatisation répétée des images étant sans lien direct avec les faits, son préjudice sera indemnisé à hauteur de 1500€.
14) Monsieur Pascal Fontenille sollicite une réparation à hauteur de 3000€. En l’absence d’incapacité totale de travail, son préjudice sera réparé à hauteur de 1500€ de dommages et intérêts.
15) Enfin, monsieur Tony Sartini demande au tribunal de « s’entendre Messieurs Mélenchon, Pignerol, Lachaud, Bompard, Corbière et madame Rozenfeld et le cas échéant Coquerel, Prud’homme et Quatennens au paiement in solidum de la somme de 3000€ en réparation du préjudice moral subi et de l’atteinte à son image ».
Outre le fait que le tribunal ne peut condamner que les personnes citées devant lui, il constate que la médiatisation excessive et répétée des images n’est pas en lien direct avec les faits reprochés aux prévenus dont il est saisi et relève de la responsabilité des médias concernés.
En conséquence, en l’absence d’incapacité totale de travail médicalement constatée, le tribunal condamne messieurs Mélenchon, Pignerol, Lachaud, Bompard, et madame Rozenfeld solidairement à payer 1500€ de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.
A l’encontre de Jean-Luc Mélenchon et Bernard Pignerol solidairement :
16) Monsieur Fabrice Kaiser demande au tribunal de condamner solidairement Messieurs Mélenchon et Pignerol à lui payer la somme de 10 000€ de dommages et intérêts. Toutefois, l’absence d’incapacité totale de travail et la médiatisation excessive des images étant sans lien direct avec les faits reprochés aux prévenus, son préjudice sera indemnisé à hauteur de 3000€.
Sur les demandes formulées en application de l’article 475-1 du code de procédure pénale :
Il n’est pas inéquitable d’allouer respectivement la somme de 3000€ sur le fondement de l’article 475-1 du code de procédure pénale ç Monsieur Marilly et à Madame Clotilde Objois et Monsieur Fontenille et 1000€ à Monsieur Bredon.
Messieurs Mélenchon, Pignerol, Lachaud, Bompard, et madame Rozenfeld seront condamnés à payer in solidum à madame Andrieu, Madame Louyat, Monsieur Esbelin, Monsieur Guimard et Monsieur Monmory la somme de 3000€ au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale.
Messieurs Mélenchon et Pignerol seront enfin condamnés à payer Monsieur Kaiser la somme de 1500€ au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale.
La technique des « présidents autoproclamés » est à la mode dans l’extrême-droite latino-américaine. C’est ce qui s’est produit récemment en Bolivie où une sénatrice est entrée dans le palais présidentiel avec une bible à la main pour se faire passer l’écharpe de présidente par des militaires qui venaient d’en chasser Evo Morales. Le prototype de ce type de coup d’État c’est celui de Juan Guaido, l’opposant vénézuélien. Il s’était lui aussi autoproclamé président du Venezuela le 23 janvier dernier. Il avait alors été aussitôt reconnu par les États-Unis et une cinquantaine de pays qui leur sont assujettis. Dont la France. Les médias nous racontaient que son arrivée au pouvoir était imminente, porté par une intense mobilisation populaire. 11 mois plus tard, en entend beaucoup moins parler. « Le Monde », journal qui lui était intensément favorable, s’était désolé : « rien ne s’est passé comme prévu » le jour qui devait être celui de l’entrée en triomphe au Venezuela de la marionnette putschiste. Ce fut un bide total et la droite locale pris avec ce pantin les distances que la presse française n’est jamais arrivée à prendre. Il se prétend pourtant toujours président. Et il est là, libre et jacassant.
Pourtant à la fin du mois de novembre, une information a détruit l’image personnelle de cette marionnette. Il est pris au Venezuela dans un scandale de corruption. Les liens entre neuf députés de sa garde rapprochée et un chef d’entreprise colombien sont pointés. Ce chef d’entreprise est accusé d’avoir surfacturé des importations de denrées alimentaires dans le cadre d’un programme gouvernemental, les « comités locaux d’approvisionnement et de production » dont l’objectif est de fournir des produits de base à très bas prix au peuple. C’est non seulement illégal au Venezuela et en Colombie mais aussi aux États-Unis qui condamnent toute participation à ce programme. Une enquête publiée par un média vénézuélien montre que les proches de Guaido sont intervenus auprès des autorités états-uniennes pour demander l’indulgence pour ce patron voyou. L’affaire a, sur tout le continent, un grand retentissement. Parasiter un programme d’aide alimentaire de son peuple, quel « président » voici là !
D’autant plus que ce n’est pas la première fois que Juan Guaido se retrouve épinglé dans des affaires de la sorte. Le mois dernier, son ancien représentant diplomatique en Colombie avait déclaré être témoin de détournement d’argent versé pour aider les militaires vénézuéliens déserteurs au profit de réseaux de trafiquants. L’autre scandale est celui qui a révélé les liens entre le président autoproclamé et les pires narcotrafiquants colombiens. En effet, en septembre, une ONG publiait des photos où l’on voit Guaido poser fièrement à côté de deux chefs du gang « Los Rastrojos ». Il s’avère que l’opération de communication durant laquelle il avait franchi illégalement la frontière colombienne en février 2019 pour superviser lui-même un convoi « d’aide » des Etats-Unis avait été entièrement organisée par ces criminels.
Tout cela a considérablement terni la réputation de Guaido, et d’abord auprès des Vénézuéliens eux-mêmes. La droite et les organes de propagande de l’Empire lui avaient bâti une image de chevalier blanc anti-corruption. Depuis plusieurs mois, il patauge dans les bides. On se souvient du ridicule de son appel au soulèvement des forces armées en avril. Aucun régiment n’avait bougé. Depuis, il a fait exploser le cadre de négociations dans lequel il était avec le gouvernement, espérant retrouver sa stratégie frontale. Raté : un mois plus tard, les autres partis d’opposition signaient avec le gouvernement un accord qui permettait le retour des chavistes à l’Assemblée nationale dominée par l’opposition et une réforme du comité national électoral. Le 16 novembre, son appel à manifester n’a été suivi que par à peine un millier de personnes à Caracas. Désormais, ceux qui l’ont mis là ne savent plus qu’en faire. Il pourrait perdre son poste de président de l’Assemblée nationale en janvier. Oui, « rien ne s’est passé comme prévu ». La marionnette était juste un nul, un menteur, un putschiste sans contenu. Maintenant on sait qu’il est aussi un corrompu. Et que même l’opposition de droite au Venezuela ne veut pas de lui. Seuls les médias français et les macronistes le soutiennent. Et bêlent en cadence Vénezuelaaaa à tous propos et surtout hors de propos.