La technique des « présidents autoproclamés » est à la mode dans l’extrême-droite latino-américaine. C’est ce qui s’est produit récemment en Bolivie où une sénatrice est entrée dans le palais présidentiel avec une bible à la main pour se faire passer l’écharpe de présidente par des militaires qui venaient d’en chasser Evo Morales. Le prototype de ce type de coup d’État c’est celui de Juan Guaido, l’opposant vénézuélien. Il s’était lui aussi autoproclamé président du Venezuela le 23 janvier dernier. Il avait alors été aussitôt reconnu par les États-Unis et une cinquantaine de pays qui leur sont assujettis. Dont la France. Les médias nous racontaient que son arrivée au pouvoir était imminente, porté par une intense mobilisation populaire. 11 mois plus tard, en entend beaucoup moins parler. « Le Monde », journal qui lui était intensément favorable, s’était désolé : « rien ne s’est passé comme prévu » le jour qui devait être celui de l’entrée en triomphe au Venezuela de la marionnette putschiste. Ce fut un bide total et la droite locale pris avec ce pantin les distances que la presse française n’est jamais arrivée à prendre. Il se prétend pourtant toujours président. Et il est là, libre et jacassant.
Pourtant à la fin du mois de novembre, une information a détruit l’image personnelle de cette marionnette. Il est pris au Venezuela dans un scandale de corruption. Les liens entre neuf députés de sa garde rapprochée et un chef d’entreprise colombien sont pointés. Ce chef d’entreprise est accusé d’avoir surfacturé des importations de denrées alimentaires dans le cadre d’un programme gouvernemental, les « comités locaux d’approvisionnement et de production » dont l’objectif est de fournir des produits de base à très bas prix au peuple. C’est non seulement illégal au Venezuela et en Colombie mais aussi aux États-Unis qui condamnent toute participation à ce programme. Une enquête publiée par un média vénézuélien montre que les proches de Guaido sont intervenus auprès des autorités états-uniennes pour demander l’indulgence pour ce patron voyou. L’affaire a, sur tout le continent, un grand retentissement. Parasiter un programme d’aide alimentaire de son peuple, quel « président » voici là !
D’autant plus que ce n’est pas la première fois que Juan Guaido se retrouve épinglé dans des affaires de la sorte. Le mois dernier, son ancien représentant diplomatique en Colombie avait déclaré être témoin de détournement d’argent versé pour aider les militaires vénézuéliens déserteurs au profit de réseaux de trafiquants. L’autre scandale est celui qui a révélé les liens entre le président autoproclamé et les pires narcotrafiquants colombiens. En effet, en septembre, une ONG publiait des photos où l’on voit Guaido poser fièrement à côté de deux chefs du gang « Los Rastrojos ». Il s’avère que l’opération de communication durant laquelle il avait franchi illégalement la frontière colombienne en février 2019 pour superviser lui-même un convoi « d’aide » des Etats-Unis avait été entièrement organisée par ces criminels.
Tout cela a considérablement terni la réputation de Guaido, et d’abord auprès des Vénézuéliens eux-mêmes. La droite et les organes de propagande de l’Empire lui avaient bâti une image de chevalier blanc anti-corruption. Depuis plusieurs mois, il patauge dans les bides. On se souvient du ridicule de son appel au soulèvement des forces armées en avril. Aucun régiment n’avait bougé. Depuis, il a fait exploser le cadre de négociations dans lequel il était avec le gouvernement, espérant retrouver sa stratégie frontale. Raté : un mois plus tard, les autres partis d’opposition signaient avec le gouvernement un accord qui permettait le retour des chavistes à l’Assemblée nationale dominée par l’opposition et une réforme du comité national électoral. Le 16 novembre, son appel à manifester n’a été suivi que par à peine un millier de personnes à Caracas. Désormais, ceux qui l’ont mis là ne savent plus qu’en faire. Il pourrait perdre son poste de président de l’Assemblée nationale en janvier. Oui, « rien ne s’est passé comme prévu ». La marionnette était juste un nul, un menteur, un putschiste sans contenu. Maintenant on sait qu’il est aussi un corrompu. Et que même l’opposition de droite au Venezuela ne veut pas de lui. Seuls les médias français et les macronistes le soutiennent. Et bêlent en cadence Vénezuelaaaa à tous propos et surtout hors de propos.