Ce n’est pas banal du tout. C’est la première fois depuis que je suis parlementaire que je vois ça. Des gens en lutte pour qu’une loi soit appliquée ! C’est ce qu’est venu nous demander fin janvier, une délégation de conducteurs de taxis que nous recevions à l’Assemblée nationale.
La loi en question est dite « Grandguillaume ». Elle a été votée il y a …. 4 ans. Son article 2 a pour objectif de poser les bases d’un meilleur contrôle des plateformes VTC qui concurrencent de façon bien sauvage les taxis réguliers. La loi, si elle était appliquée, permettrait aux autorités d’exiger des plateformes VTC la transmissions d’un certain nombre de données numériques : nombre de chauffeurs en circulation, temps cumulés de travail, etc.
Or, 4 ans après, cet article n’est toujours pas applicable. Il semble que le gouvernement fasse preuve d’une particulière mauvaise volonté. On peut même parler d’un refus pur et simple de faire réellement appliquer cette disposition. Il a fallu attendre août 2019, soit 3 ans après la promulgation de la loi pour que le décret indispensable à la mise en œuvre de cet article soit publié. Malin le gouvernement ! Agir pour ne rien faire ! Car les taxis se sont aperçus que des arrêtés complémentaires à ce décret sont encore nécessaires. Ceux-ci n’ont pas été pris. De fait, leur absence empêche donc toujours que l’article 2 soit réellement applicable.
L’ensemble des syndicats de taxi s’arrachent les cheveux pour sortir de cet imbroglio ! Pendant ce temps, évidemment, la situation de concurrence déloyale continue. En effet, les plateformes VTC se soustraient régulièrement aux règles établies. Par exemple, la maraude électronique, c’est-à-dire le fait de circuler à vide à la recherche de clients est interdite aux chauffeurs VTC. Cette pratique est réservée aux taxis qui paient une licence pour cela. Pourtant, les plateformes VTC encouragent les chauffeurs à y avoir recours aussi.
À Paris, les taxis sont équipés d’horodateurs qui limitent leur temps de travail journalier à 11h par jour. Au-delà, ils sont en infraction. Au contraire, le modèle économique des plateformes VTC pousse les chauffeurs à travailler toujours plus sans que cela ne soit ni encadré ni surveillé.
Ainsi, on comprend tout l’intérêt de ce fameux article 2. En effet, la transmission des données aux autorités permettrait de faire réellement respecter l’interdiction du maraudage électronique. Celle-ci permettrait aussi de prendre la mesure des journées à rallonge auxquelles sont contraints les chauffeurs VTC pour pouvoir survivre. Il est donc plus qu’urgent de permettre à l’État d’assurer sa mission de contrôle du respect de la législation, y compris pour protéger les travailleurs de ces plateformes de l’exploitation qu’ils subissent.
Surtout, les multiples sollicitations des syndicats de taxis au ministère des transports pour les interpeller sur le sujet sont restées lettre morte. Pendant ce temps, les multinationales VTC sont, elles, régulièrement conviées à ce ministère. Le président de la République a même reçu en entretien particulier, Monsieur Khosrowshahi, président-directeur général d’UBER, à l’Élysée en mai 2019. Dès lors, on a le droit de se poser des questions ! Tout cela est trop bizarre pour être au net.